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hergé - Page 3

  • Revue de presse BD (224)

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    + Sur son site "Gallica", la Bnf exhume des petits trésors graphiques en numérisant ses archives. Les services de la bibliothèque ont ainsi publié le carnet de voyage de l'explorateur René Caillié (1799-1838), qui fut le premier Européen à pénétrer dans la cité (interdite aux blancs) de Tombouctou, au Mali (et à en revenir vivant), déguisé en Arabe musulman. Ce fils de bagnard, originaire de Mauzé-sur-le-Mignon près de La Rochelle, fut qualifié d'"explorateur le plus intrépide de son temps" par Jules Verne, et décoré de la Légion d'Honneur par le gouvernement français.

    Le carnet comporte quelques dessins descriptifs, dont ce lavis à la fois précis et émouvant représentant la façade de la grande mosquée de Tombouctou (folio 73r).

    + Rien n'indique mieux la valeur religieuse de l'art moderne que les ventes auxwebzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,revue,presse,hebdomadaire,février,2017,actualité,info,gallica,bnf,rené caillié,tombouctou,mosquée,verlaine,rimbaud,six-coups,sotheby's,charleville-mézières,karl marx,girgir,moïse,erdogan,satirique,siné,charlie-hebdo,nicolas canteloup,homphobe,europe 1,liberté d'expression,thèse,universitaire,alain saint-ogan,julien baudry,hergé,zig et puce,charivari,intransigeant,humour enchères de reliques ayant appartenu aux représentants emblématiques de l'art moderne occidental. Rimbaud en fait partie ; le revolver six-coups qui avait servi au poète Verlaine à tirer sur son jeune amant s'est ainsi vendu un prix fou lors d'une récente vente (un demi-million environ).

    Plus récemment une petite planche de bande-dessinée tracée d'une main maladroite par Rimbaud enfant a été vendue aux enchères par la maison Sotheby's, qui l'estimait à 150.000 euros (finalement préemptée par le musée de Charleville-Mézières) ; cette somme stupéfiante illustre la convergence de nature entre l'art moderne et l'argent.

    La poésie de Rimbaud n'a plus grand-chose à voir dans cette excitation charognarde autour de sa dépouille. Certains journaux s'interrogent parfois sur ce qui demeure actuel dans le propos de Karl Marx : son propos sur la valeur mystique de l'argent, et l'aliénation qui en découle, est on ne peut moins démodé - Marx demeure aussi subversif parce qu'il prive de toute crédibilité l'argumentaire des "valeurs laïques républicaines", en montrant que le fanatisme religieux peut parfaitement revêtir le costume laïc (ce qu'il a déjà fait pendant une bonne partie du XXe siècle).

    + Un dessin publié dans le magazine satirique "Girgir" a été censuré par lewebzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,revue,presse,hebdomadaire,février,2017,actualité,info,gallica,bnf,rené caillié,tombouctou,mosquée,verlaine,rimbaud,six-coups,sotheby's,charleville-mézières,karl marx,girgir,moïse,erdogan,satirique,siné,charlie-hebdo,nicolas canteloup,homphobe,europe 1,liberté d'expression,thèse,universitaire,alain saint-ogan,julien baudry,hergé,zig et puce,charivari,intransigeant,humour gouvernement turc ; ce dessin ironique à l'égard de Moïse a provoqué les réactions outrées des représentants des communautés juive et musulmane en Turquie ; le porte-parole du président R. Erdogan a qualifié le dessin "d'indécent et haineux".

    Pour autant on ne peut opposer la liberté de la presse française à la censure turque ; les tabous ne sont tout simplement pas les mêmes en France et en Turquie. Récemment, l'humoriste et imitateur Nicolas Canteloup a jugé bon de s'excuser après un sketch estimé "homophobe", diffusé par "Europe 1". Ce cas de censure est particulièrement intéressant, car il met en avant une cause de censure rarement évoquée, bien que puissante : le clientélisme ; en effet, au-delà des principes, on peut penser que c'est la peur de perdre des auditeurs qui a motivé les excuses de la station de radio pour ce "dérapage".

    Le cas de "Girgir" n'est d'ailleurs pas sans rappeler "l'affaire Siné", puisque le directeur de la publication  de "Girgir" s'est désolidarisé du dessin et du dessinateur, publié selon lui par erreur, à cause de la fatigue. Philippe Val, pour tirer du pétrin "Charlie-Hebdo", aurait eu bien du mal à contraindre Siné à des excuses.

    Quoi qu'il en soit, la limite du respect de l'ordre public, assignée à la liberté d'expression, souligne à quel point celle-ci est "théorique" ; d'une part parce que la notion d'ordre public est parfaitement arbitraire ; secundo parce que, derrière la censure religieuse, c'est largement une notion d'ordre public qui se cache. Rien de plus mensonger et/ou idéologique que "l'histoire du progrès de la liberté d'expression".

     + Dans sa thèse universitaire (2015 - Université Paris-Diderot), Julien Baudry traite d'un aspect méconnu de la carrière d'Alain Saint-Ogan (1895-1974), dessinateur parisien de BD connu pour son oeuvre propre ("Zig & Puce"), mais encore plus pour avoir nettement influencé Hergé ; l'aspect méconnu est la carrière de dessinateur de presse et d'humoriste de Saint-Ogan ("Le Petit Parisien", "Le Charivari", "L'Intransigeant", "Dimanche illustré", "Le Rire", "La Dépêche de Toulouse", etc.). Cette étude est d'abord l'occasion de se pencher sur l'articulation entre la bande-dessinée enfantine et le dessin de presse (dont le support commun furent les journaux), deux genres qui entretiennent des rapports étroits, en même temps qu'ils peuvent s'opposer.

    C'est avant tout pour des raisons lucratives que Saint-Ogan changea d'orientation professionnelle et abandonna le dessin d'humour dans la presse au profit de la BD enfantine. Dessinateur médiocre, il était plus doué pour cette dernière activité, et de plus le déclin de la presse satirique l'y poussa. J. Baudry note le goût marqué de Saint-Ogan pour la presse et les médias, plus encore que pour le dessin (formé aux "Arts Déco") ; cela explique sa reconversion ultime dans la radio.

    L'épaisse thèse (500 p.) comporte heureusement une annexe regroupant un grand nombre de dessins humoristiques de Saint-Ogan.

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    Couverture par Saint-Ogan de "L'Anti-Boche", journal de propagande publié pendant la guerre (1915).

     

  • Revue de presse BD (220)

    + Le Festival d'Angoulême qui commence tout juste est une foire aux livres qui draine une foule dewebzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,revue,presse,hebdomadaire,janvier,2017,actualité,golo,minage,festival,angoulême,argot,marsam graphics,shoah,musée,juif,éthique,histoire,hergé,gestapo,tintin,soviets,communiste,idiot international,hara-kiri,charlie-hebdo,jean-edern hallier,zarka,cruse,parti communiste,bertrand delais,nils andersen chalands grâce aux séances de dédicaces dessinées que les collectionneurs s'arrachent. Les auteurs de BD, en général habitués à une vie d'ermite, peuvent se relaxer le poignet dans l'un des nombreux troquets qui parsèment la ville ; l'un d'entre eux, "Le Café du Minage", propose une expo de planches et illustrations de Golo (pouquoi pas Goulot ?), qui dessine depuis les années 80 les bistrots et leur clientèle et décrit leurs moeurs spécifiques (expo. recommandée par l'atelier international de BD "Marsam Graphics").

    + Le Musée (mémorial) de la Shoah à Paris organise une série de colloques sur le thème de l'extermination des Juifs d'Europe au cours de la 2nde guerre mondiale, et du traitement de cet événement en BD ("Art mineur et questions majeures", le 5 février, "Varsovie en guerre ou en bande-dessinée", le 5 mars).

    Le thème de la Shoah a rarement été abordé directement en BD ; il est difficile de divertir le public à partir d'un sujet aussi dur ; Hergé parvint à amuser le jeune public tout en délivrant un message anticommuniste, ou encore antiaméricain, voire même avec la propagande coloniale belge : mais son style naïf est sans doute démodé aujourd'hui.

    De plus, la Shoah occupe une place centrale dans l'éthique contemporaine, et donc dans le "roman national" français enseigné aux collégiens et lycéens depuis les années 60-70, relayé par un certain nombre d'oeuvres cinématographiques - or c'est un cadre contraignant que celui de la morale publique pour qui veut faire oeuvre d'historien, que ce soit par le truchement de la BD ou non. On se souvient que les films de S. Spielberg et R. Benigni ont déclenché de vives polémiques en France, ceux-ci étant accusés d'irrespect.

    Comme on juge l'arbre à ses fruits, la question de l'efficacité de l'éthique de la Shoah mériterait d'être posée : - suscite-t-elle un plus grand respect des opprimés ? Ne risque-t-elle pas, comme la morale catholique autrefois, d'être rejetée par les milieux populaires ?

    + Un lecteur de Zébra m'écrit pour me signaler que le choix de la couverture du "Tintin chez les Soviets" colorisé, en vente partout actuellement, et plutôt étonnant puisqu'il montre Tintin & Milou fuyant la... Gestapo allemande (dans une automobile volée à celle-ci). C'est peut-être un clin d'oeil à Hergé, qui n'aimait pas qu'on lui rappelle son anticommunisme primitif (non pas primaire), au plus fort de la domination idéologique du parti communiste.

    + "L'Idiot international" fait partie des très rares titres de presse anticonformistes à côté de "Hara-Kiri"/"Charlie-Hebdo" au cours de la seconde moitié du XXe siècle (à l'exclusion de titres plus confidentiels).

    Un documentaire de "France 5" (par Bertrand Delais et Nils Andersen - en replay jusqu'à lundi 30) racontewebzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,revue,presse,hebdomadaire,janvier,2017,actualité,shoah,juif,musée,éthique,histoire,hergé,gestapo,tintin,soviets,communiste,idiot international,jean-edern hallier,parti communiste,bertrand delais,nils andersen,hara-kiri,charlie-hebdo,zarka,cruse,golo,minage,festival,angoulême,argot,marsam graphics,le parisien,paris,carte,google maps,jacques tardi,boboland,dupuy,berbérian,ile-de-france comment et pour quelles raisons scabreuses quelques cadres haut placés du parti communiste français à son crépuscule (P. Zarka & J.-P. Cruse) décidèrent de financer un journal satirique dirigé par Jean-Edern Hallier (1936-1997), personnalité pratiquement incontrôlable et sans opinion politique fixe. Le PCF et le dandy breton n'avaient en commun que la détestation de François Mitterrand, qui contribua à l'agonie du PCF et l'émergence du lepénisme pour le plus grand profit du parti socialiste.

    La rencontre de Jean-Edern et de Fidel Castro, destinée à légitimer le trublion Hallier auprès des électeurs communistes, reste un grand moment de cinéma, que BHL n'est pas tout à fait parvenu à égaler.

    On mesure à travers ce documentaire l'emprise délétère des partis politiques sur la vie culturelle et intellectuelle française, même si la tentative des cadres du PCF pour redorer le blason du parti était sans doute vouée à l'échec. Grâce à Jean-Edern Hallier, plus romantique que stratège, "L'Idiot international" évita de tomber dans le militantisme et le sectarisme qui va avec.

    On peut reprocher au documentaire d'atténuer la violence de la censure du régime en place et des menaces d'élimination physique à l'encontre de Jean-Edern Hallier ; la bravoure insensée du personnage ne fait qu'accentuer sa ressemblance avec Don Quichotte.

    + Initiative touristique, "Le Parisien" publie avec "Google Maps" une carte interactive de l'Ile-de-France en BD, qui permet de situer sur une carte les lieux qui ont servi de décors à tel ou tel dessinateur. Jacques Tardi est très représenté ; en revanche on note l'absence de Dupuy et Berbérian à travers leur BD satirique "Boboland".

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  • Revue Dada-Hergé**

    La revue «Dada» s’efforce de mettre à la portée du jeune public l’art -contemporain notamment-, à traverswebzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,kritik,critique,dada,revue,hergé,georges rémi,tintin,moulinsart,disney,miro,poliakoff,fontana ses représentants les plus fameux : Magritte, Klee, Warhol, Dali, etc.

    Le n°213 traite d’un cas particulier, Hergé en l’occurrence (Georges Rémi de son vrai nom), dont l’œuvre est d’abord destinée à divertir le jeune public en lui inculquant certaines valeurs. En effet les enfants connaissent bien les aventures de «Tintin et Milou», qui sont toujours largement diffusées grâce aux efforts de la société Moulinsart pour empêcher que Tintin ne se démode (en vendant par exemple les droits d’adaptation à un producteur de cinéma américain).

    Si elle n’a pas la même envergure commerciale que les studios Disney aux Etats-Unis, l’entreprise de Hergé et ses mentors, amis, employés, parents, confrères, est néanmoins en beaucoup de points comparable à celle du cousin d'Amérique. La rédaction de «Dada» fait pénétrer ses lecteurs dans les coulisses des studios Hergé, maison familiale où le père d’Hergé travailla comme archiviste et où cet artiste-entrepreneur fera la connaissance de sa deuxième femme, embauchée comme coloriste.

    « La bande-dessinée est le dessin-animé du pauvre » : cette comparaison est parfois jugée vexante, mais elle a le mérite de rendre compte d’une réalité économique et artistique. La «ligne claire», expression utilisée pour décrire le style de dessin mis au point par Hergé, est bel et bien une méthode cinématographique, qui s’avère particulièrement adaptée au public enfantin et explique le succès mondial de la série auprès de celui-ci.

    "Dada" cite Hergé : «Mon tout premier objectif, c’est de raconter une histoire, et de la raconter clairement.» La ligne claire est un principe de composition, un principe narratif.

    Les aspérités de la biographie d’Hergé (qui fut toujours un artiste « sous influence ») ont été gommées pour faire place à un aspect méconnu : le collectionneur d’art moderne, admirateur de Miro, Poliakoff, Fontana, mécène d’une galerie d’art bruxelloise. Ce violon d’Ingres permettait à Hergé d’échapper aux contraintes de la bande-dessinée et de rêver à une carrière d’artiste plus indépendant.

     Le nom d’Hergé vient s’ajouter à la longue liste des artistes modernes que le succès n’a pas suffi à contenter : mais cette histoire n’a pas été jugée digne de figurer dans une revue d’art pour enfants.

    « Hergé », revue Dada n°213, octobre 2016, 7,90 euros.

  • Revue de presse BD (208)

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    Message peint par Magritte

    + Un autre musée parisien, le musée Pompidou, rend hommage à un autre artiste Belge : Magritte, dont quelques rébus-peints sont imprimés sur la rétine d'à peu près tout le monde (jusqu'au 23 janvier). De l'art de Magritte comme de l'art d'Hergé n'émane aucune sensualité. C'est là un point commun aux deux artistes belges (wallon et bruxellois), et pourquoi ils sont modernes tous les deux - l'art moderne n'est plus tout à fait de l'art (au sens païen du terme). Le parallèle s'arrête là, car beaucoup de choses sont inconscientes chez Hergé, qui pour différentes raisons (son jeune âge, son tempérament introverti...) n'avait pas la maîtrise de son art, mais se focalisait surtout sur le style. L'expo Magritte nous rappelle, au contraire, que le message délivré par Magritte est consciemment dirigé contre la peinture, qui après l'avoir fasciné, avait fini par lui inspirer du dégoût (la peinture de Chirico réveilla un peu le désir de Magritte de peindre). 

    + Reportage confraternel de Coco au concert de Renaud au Zénith fin octobre ("Charlie-Hebdo" 2 novembre). Renaud dit désormais admirer le candidat Fillon, mais les fans du chanteur à textes mettent sans doute ça sur le compte de la tisane qu'il boit avant le début de son concert pour soigner sa voix. Coco rapporte que Renaud, après avoir avoué : "J'ai embrassé un flic", ajoute : "Mais attention : j'ai pas embrassé un militaire." Il est vrai que, si l'esprit bidasse est de droite, l'esprit flic, quant à lui, est le privilège de la gauche.

    + L'éditeur de BD Bamboo, surtout connu pour sa BD satirique "Les Profs" et quelques titres spécialisés dans la caricature de différents sports, vient de racheter la maison Audie, éditrice de "Fluide-Glacial", l'hebdo humoristique fondé par Gotlib. Et la presse de commenter ainsi la nouvelle : "Bamboo va devenir un poids lourd sur tous les rayons humour, que ce soit en librairie ou dans les grandes surfaces."

    + La Foire internationale d'art contemporain s'est ouverte dans un contexte boursier difficile. Comme chaque année, les organisateurs de la FIAC nous promettent : - Le changement, c'est maintenant ! Cela situe l'art au niveau de l'espoir.

    + Frédéric Hojlo dans Actuabd narre la mésaventure posthume de George Orwell, dont le conte "La Ferme les animaux", inspiré par les purges de Staline (bien que le porc-dictateur se nomme "Napoléon"), fut racheté afin d'être adapté en dessin-animé et en bande-dessinée afin de servir d'arme de propagande anticommuniste (lorsque les intérêts des Etats-Unis et de l'URSS commencèrent de diverger). Il n'est pas rare que des ouvrages satiriques soient récupérés par tel ou tel parti politique ; parfois cela se fait avec le consentement de l'auteur, mais Orwell se distingue par son indépendance. F. Hojlo nous rappelle opportunément que Orwell voyait les "comics" américains d'un mauvais oeil, comme une manifestation de la culture de masse totalitaire.

    Les années ont donné raison à Orwell : en effet on a vu l'Union soviétique devenir capitaliste à toute vitesse, signe que l'esprit critique n'était guère développé à l'Est, mais plutôt une forme de nationalisme déguisée en discours pseudo-marxiste. Orwell, issu du peuple, fit notamment un effort pour rendre l'homme du peuple pessimiste, c'est-à-dire plus lucide. Orwell se montre particulièrement vigilant vis-à-vis de la caste des intellectuels, en charge de l'invention des nouvelles chimères modernes.

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    Le dessinateur britannique Norman Pett, chargé d'adapter La Ferme des animaux, était un auteur de comics de propagande nationaliste ("Jane") comme Milton Caniff (comics contenant la ration d'érotisme destinée à émoustiller l'homme de troupe).

  • Revue de presse BD (204)

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    + Difficile d'échapper à Tintin en ce moment ; quelques dessins originaux de Hergé datant des années 1940 -des cartes de voeux- ont été mis en vente aux enchères. La carte ci-dessus montrant Tintin se rendant à la messe de minuit est un des rares exemples où Tintin "assume son catholicisme". On sait que Hergé reçut une éducation catholique, avant de travailler au "XXe Siècle" sous les ordres de l'abbé Wallez, ecclésiastique féru des méthodes modernes de propagande ; cependant Hergé s'éloigna peu à peu au cours de sa carrière des principes qu'on lui avait inculqués dans sa jeunesse. Par ailleurs on sait l'influence sur Hergé du scoutisme, qui enseigne à ses jeunes adeptes le respect de la nature.

    Les influences diverses et contradictions de Hergé ont déteint sur ses BD.

    + Classé parmi les auteurs dessinant "à la manière de Hergé", le scénariste et dessinateur de BD Ted Benoît est décédé fin septembre. Ted Benoît (Thierry Benoît à l'état civil) était peu connu du grand public, travaillant surtout pour la publicité, avant de reprendre en 1996 la série à succès "Blake et Mortimer" créée par Edgar Jacobs. Pour justifier cette reprise, T. Benoît affirmait : "Contrairement à Hergé, dont l'oeuvre est une “comédie humaine” très personnelle qui, sans lui, n'aurait aucun sens, Jacobs appartient à la grande tradition feuilletonesque. (...)"

    C'est inexact ; Hergé s'est efforcé de faire passer "Tintin" pour une oeuvre "personnelle", mais on sait grâce aux témoignages de proches collaborateurs que Hergé a subi diverses influences très nettes, tant sur le plan du dessin que du scénario. Hergé a beaucoup travaillé à polir ses BD, les redessinant méticuleusement, ce qui donne une impression d'homogénéité trompeuse.

    + Le dessinateur Charlie Schlingo était aux antipodes de Hergé, du moins pour ce qui est de la notoriété. Ironiquement, Frédéric Potet, le spécialiste de la BD au "Monde" parle de "ligne crade" pour qualifier le style de Schlingo. C'est un peu exagéré, car Schlingo était aussi très influencé par le savoir-faire américain en matière de BD.

    + Dans une interview donnée mi-septembre à Médiapart, la caricaturiste Coco affirme ne pas avoir changé sa manière de dessiner depuis le massacre de ses confrères de "Charlie-Hebdo". On lit dans cette interview une pique contre Plantu, ainsi que quelques déclarations un peu chauvines : "Je crois que beaucoup de pays nous envient la laïcité" (rien ne prouve que l'on comprend à l'étranger ce que certains Français appellent "laïcité", thème de longs prêches aussi ennuyeux qu'édifiants).

    Mais la remarque la plus intéressante est le point de vue de Coco selon lequel la caricature ne doit pas dépasser les limites assignées par la loi (et par conséquent la police, en charge de l'exécution des lois). Les caricaturistes seraient donc, en France, les seules personnes respectueuses des lois ? Que penserait-on d'un caricaturiste britannique qui dirait : - Je suis prêt à me moquer de tout, sauf de la reine. Ou encore d'un caricaturiste marocain qui dirait : - On peut rire de tout... dans les limites assignées par la charia.

    + La "Une" de "Libération" aujourd'hui nous montre l'ex-président et actuel candidat N. Sarkozy dans le costume d'Astérix, le personnage de Goscinny et Uderzo, escorté d'Eric Zemmour en Idéfix. R. Goscinny avait un certain nombre de points communs avec N. Sarkozy ; on se souvient d'ailleurs que Anne Goscinny a fait récemment partie d'un comité de soutien au président déchu. Jean-Marie Le Pen est surnommé dans son camp "le menhir", ce qui rappelle un autre personnage d'Uderzo.

    "Libération" titre sur l'effort de la droite pour "refaire l'histoire". Mais la droite et Eric Zemmour ne font en cela qu'imiter les idéologues de gauche, qui ont produit et continuent de produire leur propre version du roman national. Que l'on songe, par exemple, à l'extraordinaire opération de blanchiment du terrorisme révolutionnaire par les intellectuels de gauche au cours de la seconde moitié du XXe siècle : cette entreprise négationniste était indispensable pour fonder la mythomanie du "progrès social". Un autre moyen de mesurer à quel point la gauche baigne dans la fiction, c'est de mesurer la distance qui la sépare de Marx (conscient dès le début de l'hypocrisie des "Droits de l'Homme").

    La question est de savoir pourquoi la droite éprouve actuellement à son tour le besoin de produire une version cultuelle de l'histoire de France, au niveau de la bande-dessinée pour les gosses ? La réponse est simple : parce que la gauche se ramène désormais à un point de vue intellectuel et élitiste. Les élites intellectuelles sont fascinées par des fictions et des mécanismes encore plus abstraits, telles que les institutions technocratiques européennes, qui fonctionneraient parfaitement bien si l'homme était un robot.

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  • Revue de presse BD (203)

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    + On a appris cette semaine la mort du dessinateur Fernando Puig Rosado à l'âge de 85 ans ; connu du grand public pour ses illustrations dans la presse enfantine ("Astrapi", "Okapi"...), cet immigré espagnol publiait aussi dans la presse française ("Le Figaro littéraire", "Siné-Hebdo", "Le Canard enchaîné"...) ; il avait fondé la Société protectrice de l'humour, regroupant une cinquantaine de dessinateurs exposant leurs dessins au festival d'Avignon.

    + Avec leurs proverbes absurdes, dont le fameux "Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?", les Shadoks résument parfaitement l'esprit du temps, en l'occurrence son intellectualisme. Le musée international des arts modestes (Miam) à Sète consacre une expo (- 6 novembre) aux créatures bizarres de ce dessin-animé créé par Jacques Rouxel pour l'ORTF.

    + A propos de l'expo Hergé-Tintin au Grand Palais, lancée à grand renfort de publicité, Benoît Mouchard, ancien président du festival d'Angoulême, se réjouit que l'événement "confère enfin une dimension un peu institutionnelle à la BD" ("20 Minutes", 28 sept.) ; c'est ignorer que, depuis des siècles, le meilleur de l'art a un caractère anti-institutionnel et anti-académique affirmé ; une fois la contre-culture assimilée par les institutions, elle perd une bonne part de son intérêt et de sa signification. C'est valable pour la peinture impressionniste, mais aussi pour la philosophie des Lumières, plus récemment de "Charlie-Hebdo" transformé en symbole national.

    "Tintin" n'a jamais fait partie de la contre-culture, mais de la littérature de genre (ce qui explique l'indifférence de la critique d'art). Fait significatif, quand Hergé décide de s'initier à l'art abstrait (pour adultes), celui-ci est déjà devenu le support d'un nouvel académisme.

    Töpfferiana est une mine d'informations sur les pionniers de la BD. Le site d'archives numérisées Gallica.fr (BNF) a interrogé Antoine Sausverd, animateur du site Töpfferiana, sur la manière dont il exploite les archives mises à la disposition du public sur Gallica.fr.

    + Jusqu'au 28 octobre, exposition à la bibliothèque Faidherbe (Paris 11e) de Unes de "New-Yorker" dessinées par William Steig (1907-2003) dans les années 30. Plus connu en France pour ses illustrations de livres pour enfants ("Caleb et Kate", "Shrek", dont l'adaptation par le studio Dreamworks est tout bonnement hideuse) ; W. Steig fut auparavant cartoonist et dessina de nombreuses couvertures du "New-Yorker", dont l'humour a un peu vieilli.

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    Couverture du "New-Yorker" (oct. 1935) signée W. Steig

     

  • Revue de presse BD (200)

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    + Le sociologue Jérôme Berthaut publie chez Casterman, dans une collection qui se donne pour vocation de décrypter la société, "La Banlieue du 20H", une petite BD qui raconte par qui et comment les reportages diffusés par les chaînes de télé sont fabriqués. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le propos n'est pas neuf ; la suspicion qui pèse sur la véracité des infos rapportées par les grands médias alimente largement la "théorie du complot", très en vogue chez les collégiens et lycéens. Néanmoins le propos de J. Berthaut est bien servi par le dessin d'Helkarava, qui lui procure une dimension satirique. La télé n'a pas seulement fabriqué le FN, elle a aussi creusé le fossé avec la banlieue. On voit dans la BD une jeune femme d'origine maghrébine protester contre l'image positive donnée de la banlieue dans un petit reportage, parce qu'il s'agit d'une image d'Epinal fabriquée de toutes pièces, aussi vaine que certaines images effrayantes.

    + Le philosophe Michel Onfray s'est plaint récemment du comportement de plus en plus infantile des adultes ; il en veut pour preuve l'usage de plus en plus répandu de la trottinette chez les personnes ayant atteint l'âge de raison. Cet exemple n'est guère convaincant, car l'usage déjà ancien de l'automobile n'est pas moins puéril que celui de la trottinette ; beaucoup d'automobilistes sont en effet des terroristes inconscients, qui participent au djihad de la consommation de biens inutiles.

    L'engouement actuel pour les albums de Tintin est une bien meilleure preuve d'infantilisme que la trottinette de Michel Onfray. Le Grand Palais s'apprête à célébrer Hergé comme un grand artiste, à travers une exposition de son oeuvre principale et de ses marges. Hergé se disait plus précisément le "reflet de son époque", conscient de véhiculer un certain nombre de clichés ou de préjugés, par conséquent. Il est faux d'écrire, comme on peut le lire ici ou là, que "Tintin" s'adresse aussi aux adultes, à l'instar des fables ou de la mythologie. C'est une littérature de genre qui vise un public enfantin, en dépit de son slogan publicitaire ("de 7 à 77 ans"). Par nostalgie et une sorte de plaisir régressif, certains adultes relisent les BD de leur enfance. Hergé a d'ailleurs connu des épisodes de dépression, dont on peut se demander s'ils ne venaient pas de son enfermement dans un genre de plus en plus étranger à son aspiration.

    + Une polémique ridicule oppose une partie de la presse italienne à "Charlie-Hebdo", qui a récemment publié un dessin de Félix, irrespectueux à l'égard des victimes du séisme qui a frappé la région du Latium. Reprocher à un journal satirique son manque de respect, c'est comme reprocher au pape de manquer d'humour.

    Néanmoins cette énième polémique souligne le statut ambigu de "Charlie-Hebdo" ; cette publication n'est plus, dorénavant, un journal satirique à faible tirage, menacé par la censure ; "Charlie-Hebdo" fait désormais partie du patrimoine national français ; il a été érigé en symbole de la liberté d'expression (strictement encadrée par les tribunaux), ce qui enlève beaucoup à l'impertinence de cet hebdo.

    + La Une du numéro de septembre de "Siné Mensuel", orphelin de Siné, est signée Jacques Tardi. Cet auteur, plus connu pour ses adaptations en BD des aventures du détective Nestor Burma (Léo Malet) que pour ses caricatures, a représenté dans ce dessin tous les jeunes et moins jeunes premiers de la classe politique, ainsi que les cancres ; le képi de de Gaulle figure même au premier plan. Le dessin est presque exhaustif, du coup on remarque plus l'absence de Jean-Luc Mélenchon, représentant du parti communiste ; piètre candidat, celui-ci ferait peut-être un meilleur interprète de Nestor Burma, au cinéma ou au théâtre ?

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