Extraits de la revue de presse illustrée publiée dans l'hebdo Zébra.
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Extraits de la revue de presse publiée dans l'hebdo Zébra.
+ Terreur Graphique et Hervé Bourhis ont récemment publié chez Dargaud "Le Petit Livre de la BD". Les auteurs ont fait le choix de l'anecdote, compilant année après année un tas de faits, d'albums et de dates marquantes, illustrées sous forme de vignettes. Ils ont aussi dessiné ou fait dessiner quantité de pastiches de couvertures d'albums. Elouarn, qui tient lui même un blog abondamment illustré dédié aux clins d'oeil que se font entre eux les auteurs de BD dans leurs albums, répercute une petite info concernant G. Wolinski, membre quand il avait dix ans du club des lecteurs de "Coq-Hardi", en même temps que Jacques Chirac.
+ Le fanzine "Dérive urbaine" a remporté le prix du fanzine décerné par le festival d'Angoulême. Il a été choisi parmi une sélection de trente fanzines en provenance du monde entier. Pour la troisième année consécutive, "Zébra" participait à ce concours unique en son genre, organisé par Philippe Morin, vainqueur il y a plus de trente ans avec son fanzine PLG du premier concours.
+ Est-il permis de se moquer de la Shoah comme du prophète Mahomet dans les pays occidentaux ? Afin de démontrer qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures, D. Pasamonik (Actuabd) publie un article sur les dessins humoristiques concernant la Shoah publiés par "Hara-Kiri" et "Charlie-Hebdo". Mais certains commentateurs de cet article font observer à juste titre que les dessins ne portent pas atteinte à la dignité de la Shoah, mais se moquent de ceux qui ont tenté d'en tirer un profit commercial. De même le dessin signé Cabu en "Une" de Charlie se moquait de certains mahométans, plutôt qu'il ne visait directement le prophète comme les caricatures militantes danoises.
Au-delà de la question de l'équité entre l'éthique de la Shoah et le Coran, on peut d'ailleurs se demander si la loi Gayssot est vraiment dans l'intérêt des Juifs, qu'ils soient descendants ou non de déportés ?
Dans son édition du 15 janvier, à la question : "Pourquoi la loi française traite Dieudonné et Charlie-Hebdo différemment ?", le "New Yorker" répond que la liberté d'expression anticléricale est mieux protégée en France. Il ajoute : "Les médias [français] modernes ou plus traditionnels sont majoritairement non-musulmans. Des programmes de radio et de télé entiers débattent quotidiennement des mérites et des inconvénients de l'islam en France, sans faire beaucoup d'efforts pour inclure dans ces débats le point de vue de membres de la communauté musulmane. (...) Dans ce contexte, la surveillance étroite des provocations obscènes de Dieudonné paraît extrêmement arbitraire et disproportionnée ; elle le sert, hélas, bien plus qu'elle ne le dessert."
+ Quand un tas d'officiels, dont un ministre de l'Intérieur, défile en tête d'un cortège célébrant la liberté d'expression, il y a de quoi se pincer pour vérifier qu'on ne rêve pas. Plus d'un lecteur d'Orwell, d'Hannah Arendt, Simone Weil ou encore Bernanos, a dû écarquiller les yeux. "Nous disposons de moins de moyens pour décrédibiliser la presse qu'il n'en existait dans la société française en 43 ou 44, c'est évident. Donc il est d'autant plus important d'essayer d'expliquer pourquoi la presse est comme elle est." dit Raymond Aubrac dans un entretien avec Mathias Reymond et Pierre Carles (2007) pour l'Acrimed (action-critique-médias). Dans un numéro spécial publié il y a une dizaine d'années par une ligue antipub, l'ancien résistant communiste faisait en outre son "mea culpa", reconnaissant que le PCF, en faisant interdire de très nombreux journaux à la Libération, a involontairement favorisé la mainmise du monopole de l'industrie et des banques sur la presse.
+ Le documentaire sur "Pif-Gadget" (G. Podrovnik), diffusé par la chaîne "Arte", peut être regardé en ligne. Il est à la fois consternant et cocasse. Consternant par l'étalage d'une nostalgie de la culture communiste : que penser de soi-disant antifachistes qui continuent d'ignorer que les massacres perpétrés par le régime soviétique ne sont pas moins étendus que les crimes nazis ? Cocasse, parce que la contribution de la propagande communiste à la culture de masse ressort assez clairement dans ce documentaire, en dépit de sa tentative de démontrer que "Rahan" est un super-héros humaniste. Ce qui ressort au contraire, c'est que la différence entre "Pif" et le "Journal de Mickey" est à peu près inexistante. Comble de l'ironie, on apprend que le marketing autour du fameux gadget distribué avec cette publication, qui lui permit d'atteindre un tirage exceptionnel de 500.000 ex. par semaine, fut inventé par le fils d'un "Russe blanc", aventurier au demeurant peu scrupuleux.
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Revue de presse BD (133)
Extraits de la revue de presse publiée dans l'hebdo Zébra.
+ Pour la troisième année consécutive, le fanzine Zébra (version papier n°8 - couverture par Nabaloum Boureima/Burkina-Faso) participe au concours de fanzine organisé par le festival d'Angoulême. Trente fanzines composent une sélection internationale : produits en France et Belgique, bien sûr, mais aussi en Allemagne, Autriche, Brésil, Croatie, Egypte ("Tok-Tok magazine", ci-dessus), Etats-Unis, Italie, Taïwan et Ukraine. Si l'on note une baisse du nombre de participants par rapport à l'année dernière (15 titres de moins), il faut néanmoins souligner le courage des jurés qui ont eu un mois pour apprendre le croate, le taïwanais et l'ukrainien, et autres langues réputées ardues.
+ Quelques jours à peine après la grande célébration de la liberté d'expression, associée à "Charlie-Hebdo", de nombreux journalistes sont montés au créneau pour souligner la nécessité de poser des limites à cette liberté, au demeurant toute théorique. Quelques semaines avant la gigantesque manif "Tous Charlie", le 24 décembre, est entré en vigueur un décret permettant une surveillance accrue par les services de police, l'armée et le fisc, des informations privées transitant par les réseaux téléphoniques et l'internet. La principale protection contre les abus est indirecte et réside dans le coût de la surveillance.
Assez peu conscient du problème, semble-t-il, feu le "rédac-chef" de "Charlie-Hebdo", Charb, avait lui-même déclaré que la liberté d'expression est presque parfaite en France, en se fondant sur la permission de brocarder ou critiquer l'armée et la police sans pratiquement de limite. Mais c'est sans compter la publicité abondante faite aux services de police et à l'armée par la télévision et le cinéma, propagande en comparaison de laquelle la satire de "Charlie-Hebdo" ne pèse pas bien lourd.
+ La dessinatrice Tanxxx ("Aaaargh !", "CQFD") se fait l'avocate sur son blog d'un jeune lycéen nantais inculpé pour "apologie du terrorisme". Il aurait publié sur Facebook un dessin ironique à l'occasion de la tuerie de "Charlie-Hebdo". Les magistrats ont estimé que publier sur Facebook est un mode d'expression public. A l'exception d'un ou deux blogueurs ayant proféré des injures "ad hominem", très peu de blogueurs avaient été condamnés avant ce précédent. En ce qui me concerne, bien des séries télévisées ou des jeux vidéos en vente libre me semblent relever de l'apologie du terrorisme, voire de la torture, mais je ne suis pas magistrat.
Dans sa note du 17 janvier, Tanxxx ajoute en outre : "La marche de dimanche n'aurait pas été récupérable à ce point si Charlie était resté Charlie. Des textes parlent de la Une du journal pour la mort de de Gaulle pour défendre le journal : ce Charlie là est mort depuis des lustres.(...)" Elle souligne par ailleurs longuement que le débat dans les médias qui a suivi l'attentat sur la liberté de la presse et autres thèmes convenus n'est pas un débat mais une cacophonie.
+ Parmi les ralliements dont "Charlie-Hebdo" se serait sans doute passé, celui du libéral-bougon Alain Finkielkraut, fraîchement - si je puis m'exprimer ainsi -, entré à l'Académie française. Celui-ci ne s'est pas contenté d'un mot de solidarité, mais a rendu un vibrant hommage à "Charlie-Hebdo" et l'esprit français d'autodérision dont cet hebdomadaire était, selon lui, exemplaire.
+ Le festival d'Angoulême avait honoré de son grand prix il y a deux ans le dessinateur de presse néerlandais Willem, un des rares survivants de... bref. Certains fondamentalistes de la BD (la passion implique le fanatisme, et vice-versa) avaient alors reproché à Willem de ne pas obéir assez aux codes et contraintes du genre. Willem s'était cependant acquitté avec maestria de la tâche qui incombe à l'heureux élu de dessiner l'affiche du festival suivant. Mais le dessin de presse et la BD sont historiquement étroitement liés, et d'autres reprocheront au contraire aux organisateurs du festival de ne pas avoir honoré Cabu de son vivant, plutôt que tel... (ce passage a été autocensuré). Le "Grand Duduche" est en effet une excellente BD, dans l'esprit soixante-huitard, qui se moque gentiment mais avec efficacité de l'école républicaine. Qui sait, si l'on s'ennuyait moins à l'école, il en sortirait peut-être moins de terroristes ?
L'édition du festival 2015, qui se tient ce week-end, rendra hommage à Cabu et ses disciples (Charb a avoué que sa vocation lui vient de Cabu) à titre posthume. La ville d'Angoulême tient là l'occasion de faire oublier son récent "couac" en matière de communication (à l'instar de nombreuses municipalités, celle d'Angoulême avait fait installer des pare-SDF aussi originaux qu'indiscrets, qui firent plus scandale que l'urinoir de Duchamp). Si l'on ajoute à ça le plan Vigipirate renforcé et la grogne des dessinateurs de BD sous-payés (qui ont prévu un débrayage des dédicaces), il y a fort à parier que le prochain FIBD sera bouillant.
+ Le dessinateur Riss, dernier "pilier" de "Charlie" vivant, prendra la direction de "Charlie-Hebdo" ; il est apparu à sa sortie d'hôpital un peu dépassé par le phénomène "Tous Charlie" (on le serait à moins), en même temps qu'assez lucide sur les difficultés qui l'attendent, la question du financement étant secondaire pour un titre comme "Charlie-Hebdo", contrairement aux autres titres. Outre le tirage exceptionnel qui devrait dépasser les sept millions d'exemplaires, "Charlie-Hebdo" est passé de 2.000 abonnés à 120.000. Riss est conscient que seule une bonne dose d'imagination permettra à son hebdo de ressusciter (comme le phénix, non pas comme Jésus). Il y a tout de même un gag dans les déclarations de Riss, c'est sa demande d'audit à la Cour des comptes ; d'abord Riss ne semble pas avoir remarqué le caractère parfaitement somptuaire de cette cour (vu le déficit abyssal de la France) ; ensuite on se demande ce que le nouveau patron de "Charlie" craint de découvrir dans les millions d'euros de dons reçus : un chèque de Liliane Bettencourt ? Du Qatar ?
+ Le dernier numéro de l'hebdomadaire "Fluide-Glacial" (n°464), avec son titre burlesque : "Le péril jaune : et si c'était déjà trop tard", a mécontenté les autorités chinoises (quelques extraits en ligne) qui ont manifesté leur désapprobation. Le rédacteur en chef de la publication, Yan Lindingre, tout en invoquant l'humour, a justifié le choix du thème par l'indifférence des organisateurs du festival d'Angoulême à l'égard de "Fluide-Glacial", qui fête ses 40 ans cette année et auraient voulu marquer le coup ; mais les organisateurs étaient trop occupés à recevoir une délégation chinoise. Une BD racontant l'irruption de guerriers chinois armés de kalachnikovs dans la rédaction de "Fluide-Glacial" serait purement fortuite. Le thème n'est pas beaucoup moins risqué que les caricatures du prophète, car la France entretient avec la Chine des relations pour le moins ambiguës, sur fond de monothéisme du dieu Pognon.
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Revue de presse BD (116)
+ Il y a autant de festivals-BD que de fromages en France. Parmi les plus courus, le festival "BD-Fil" de Lausanne qui -fraude fiscale oblige-, est le mieux doté. Plus de 30.000 mille visiteurs s'y sont rendus le week-end dernier. Plusieurs dessinateurs en ont tiré des strips (ci-dessus, Pierre Wazem). Au fait, à quand un festival de BD à Monte-Carlo ?
+ Il paraît que "L'Humanité" pourrait relancer le magazine "Pif-Gadget" !? Pas sûr que ce soit une très bonne idée, car la mort du PCF coïncide à peu près avec le moment où ses adeptes ont commencé de penser que l'accumulation de gadgets pourrait sauver l'humanité, en lieu et place de la science véritable.
+ L'Université de Poitiers a programmé une très sérieuse "Journée d'études autour du caricaturiste Albert Dubout et la France des années 20 à la fin des années 50" (mercredi 8 octobre). Le style des interventions tranche nettement avec celui de Dubout : "Albert Dubout ou les paradoxes de l'humanité", "Albert Dubout face à la reconversion des espaces urbains" ; même si on note l'effort louable de M. Christian Moncelet (université de Clermont-Ferrand) pour introduire un peu de rondeur : "Dubout, du bon, du binaire : duo et couples chez Dubout". Il ne faudrait pas oublier qu'une des tendances lourdes de l'humour français, de Rabelais à L.-F. Céline, en passant par Molière, Voltaire et A. Allais, consiste à se moquer de l'université ou des intellectuels. L'excès d'anthropologie est un véritable tue-l'humour.
+ Le webzine Actualitté (Lionel Davoust) approuve la censure d'une parodie de la série Bob et Bobette par le parti nationaliste flamand "Vlaams Belang", réclamée par les ayants-droits de Willy Vandersteen au prétexte que ceux-ci ne partagent pas les opinions de ce parti. Cependant on peut se demander si la pratique de la censure "au nom de la liberté d'expression" n'est pas parfaitement ubuesque. On est ici plus près du slogan terroriste "Pas de liberté pour les ennemis de la liberté !" que de la défense de la liberté d'expression par Voltaire, en dépit de ses propres opinions.
+ Zélium, gazette humoristique qui défie le clivage pro-Israël/pro-Palestine, non moins machiavélique que l'ancien clivage droite/gauche, organise une fiesta sur la péniche "Antipode" (Paris XIXe, 23 sept.) afin de doper la souscription qu'elle lance afin d'être distribuée en kiosque. En 2014 plus que jamais, il faut mendier pour être libre.
+ Le dessin de la semaine est une planche extraite du comix "Electric Candyland", par l'Américain Jesse Tise (Californie), sorte de remake du conte pédophile de Lewis Carroll. On devine pourquoi "Pif-Gadget" a perdu la guerre froide.
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Revue de presse BD (114)
+ Ci-dessus : la rentrée littéraire vue par l'illustrateur franco-québécois Tiffet ("Le Devoir").
+ L'Etat portugais envisage de se renflouer en vendant une petite centaine de toiles de Miro. La France pourrait peut-être en faire autant en vendant le Sacré-Coeur ou l'Opéra Garnier à des fonds de pension japonais ? L'Etat, qui est lui-même une fiction ou une oeuvre d'art abstrait, intervient souvent en faveur de l'art et des artistes : quoi de plus normal que l'art lui rende, quand c'est nécessaire, la monnaie de sa pièce ?
+ Une société de location de bureaux (Domaine des entrepreneurs) organise un concours de BD sur le thème du "coworking" (un seul bureau pour plusieurs ronds-de-cuir), avec à la clef un contrat portant sur 12 planches (jusqu'à fin sept.)
+ Les supermarchés Aldi ont retiré de leurs rayons "Revolting Rhymes", recueil de parodies de contes par Roald Dahl, après que des clients ont dit avoir été choqués par l'emploi du terme "slut" dans la parodie de Cendrillon. Ainsi que le précise le webzine "Actualitté", "slut" peut se traduire par "salope", mais aussi par "souillon". Comme dit le proverbe : "Le client est roi des cons."
+ Short-Edition, maison spécialisée comme son nom l'indique dans la publication de courts poèmes, nouvelles et BD, organise chaque saison un concours dans chaque catégorie. Philgreff (Zébra 7 & 8) participe à la compet' d'automne avec "Avec un simple crayon". Scrutin ouvert jusqu'au 22 sept.
+ Tandis que Finkielkraut dénigre la BD sur "France-Culture", "France-Inter" propose "Pop-Fiction", une nouvelle émission qui fait l'apologie de la culture de masse industrielle et commerciale et consacre quelques minutes à la BD. "Pop-Fiction" s'efforce de donner des lettres de noblesse à la culture de masse : des universitaires sont invités à disserter sur les séries TV et les super-héros, on fait référence à des philosophes fameux, Tintin est comparé au Talmud, et la production pléthorique d'albums de BD est présentée comme un signe de bonne santé (D. Pasamonik). "Pop", comme "populaire" est mensonger, puisque la culture de masse est produite par les élites économiques et politiques. La référence à la fiction est révélatrice, en revanche, puisque les partis et mouvements populistes s'ordonnent toujours autour d'une fiction, tandis que la culture populaire est plus satirique ou réaliste.
+ Le dessin du jour est un cartoon de Mark Anderson :
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Revue de presse BD (111)
+ Le Musée de Montmartre propose une exposition autour de la bd en quatre volumes sur Picasso par Julie Birmant et Clément Oubrerie (jusqu'au 31 août) : planches originales, photos d'époque, toiles de maîtres montmartrois... Clément Oubrerie a su éviter le kitsch dans lequel le cinéma tombe dès qu'il s'agit de montrer Montmartre.
+ Sous prétexte qu'elle dresse un portrait de François Hollande peu flatteur ("Un bourgeois moralisateur portant les oripeaux du peuple") et de quelques autres grosses légumes, faut-il censurer le polar en BD "Zombies néchrologies", s'interroge "Le Figaro" ? Le président de la République n'a pas porté plainte pour diffamation.
+ Jamais à court d'idées et de projets, l'illustrateur Philgreff propose chez "Thebookedition" cinquante devinettes pour les cinéphiles : à l'aide de quelques dessins, le but du jeu est de retrouver les titres de classiques du cinoche.
+ Le dessin de la semaine, intitulé Made in China, est signé Julien Gutieres et il est extrait de son bordelijistan :
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Revue de presse BD (101)
+ Cette scène de plage dramatique signée Picasso (Le Sauvetage) s'est vendue à un prix astronomique la semaine dernière. Au grand dam de l'héritier du peintre, les travaux du musée Picasso ont pris du retard et il ne rouvrira ses portes qu'au mois de septembre prochain.
+ L'académicien fraîchement élu Alain Finkielkraut a repris son antienne contre la bande-dessinée ; selon lui, elle est un art mineur ; or notre philosophe déplore la disparition de la hiérarchie et des classements artistiques. Le hic, c'est que Finkielkraut n'a pas lui-même les idées très claires sur le sujet. Il ne condamne pas l'art moderne au bénéfice de l'antique, comme Nietzsche, sous prétexte que la culture moderne serait macabre et infectée d'idées chrétiennes ; pas plus Finkielkraut ne méprise comme Marx l'opéra ou le théâtre de Racine, divertissements typiquement bourgeois. Bref, Finkielkraut a le goût du critère pour le critère, tel un maniaque. Son mépris pour l'art populaire est un simple réflexe de parvenu. Puisque Finkielkraut appelle au retour de saines discriminations, rappelons une fameuse discrimination de Voltaire : "Il y a une fatalité sur les académies : aucun ouvrage qu'on appelle académique n'a été en aucun genre un ouvrage de génie. Donnez-moi un artiste tout occupé de la crainte de ne pas saisir la manière de ses confrères, ses productions seront compassées et contraintes. Presque tous les artistes ont fleuri avant l'établissement des académies ou ont travaillé dans un goût différent de celui qui régnait dans ces sociétés (...)".
+ Dans cette vidéo, Gérard Depardieu fait partager son goût pour l'art moderne et commente sa collection d'objets d'art pour les lecteurs de "Télérama" (à jeun, hélas) ; comme quoi il n'y a pas que les parvenus de droite qui éprouvent le besoin d'exhiber leurs trophées, les esthètes de gauche aussi.
+ Après avoir longtemps eu une image lisse, de dessinateur attitré du bien-pensant quotidien "Le Monde", Plantu est en passe de devenir le caricaturiste le plus censuré du moment. Après la censure des éditions Bayard d'un dessin représentant le pape Benoît XVI dans une position sexuelle scabreuse, c'est carrément cette fois-ci la rédaction du "Monde" qui a caviardé un dessin où le président était montré copulant avec Marianne. Ce n'est quand même pas la faute de Plantu si on a choisi comme symboles, avec Marianne et Europe, des marie-couche-toi-là plutôt que des vierges féministes farouches.
+ La "technique du périnée" est une méthode appliquée par certains hommes pour retenir leur éjaculation le plus longtemps possible et satisfaire ainsi les partenaires les plus exigeantes ; c'est aussi le titre de la dernière BD de Ruppert et Mulot, actuellement prépubliée dans "Le Monde". Mais les amateurs de porno risquent d'être déçus : le propos de Ruppert et Mulot se situe plutôt au niveau de la philosophie du sexe, et donc des préliminaires et titillements divers autour du nombril. Il faut dire que BD et coït ont en commun d'être des arts "séquentiels". Peut-être un tel raffinement de concepts pourra-t-il enfin réconcilier l'auguste Finkiekraut avec le "9e art" ?
+ Le dessin de la semaine est un autoportrait du duo minimaliste Ruppert et Mulot, véritables apologistes de la théorie du genre, puisque on ne sait pas vraiment s'ils font de l'art ou de la bande-dessinée, s'ils sont gais ou pessimistes, s'ils sont mûrs ou obsédés sexuels comme des nourrissons, etc.