Affiche publicitaire de Jossot pour les sardines Saupiquet.
+ La pédophilie a le vent en poupe, se dit-on en traversant l'expo "Barbie" organisée par le musée des arts décoratifs, concurremment à une expo dédiée aux caricaturistes et la réclame commerciale, nettement moins achalandée (-septembre/gratuite pour les - 26 ans).
Nous le répétons souvent dans cette revue de presse, satire et propagande ne font pas bon ménage, d'autant moins que cette dernière se dissimule sous la formule pernicieuse de "l'art engagé", forgée par les nouveaux curés des temps modernes afin d'inculquer au peuple l'esprit de sacrifice. Cependant, pour être satirique, l'esprit n'a pas moins un estomac à remplir ; les industriels s'avisèrent très tôt de l'impact des caricatures, très expressives, dans le public, et du profit qu'il pouvait retirer de cet "impact".
L'expo. des arts déco. manque de relief critique, bien que les affiches soient bien "mises en valeur". L'expo commence après la vogue des Lautrec et Mucha (aux styles opposés) ; cependant Capiello, largement représenté, s'il fut bon caricaturiste-portraitiste, s'est surtout épanoui dans la réclame pour divers produits de consommation courante. L'intérêt du thème est la confrontation d'auteurs satiriques à une pratique qui ne l'est pas. Il est intéressant de voir les nombreuses publicités pour la presse satirique, bien plus vivace qu'aujourd'hui, mais dans ce cas les caricaturistes se limitent à faire l'apologie de leur art.
L'hybridation est parfaitement réussie avec Henri-Gustave Jossot, pourtant parmi les plus anarchistes et indépendants, mais dont le style est particulièrement adapté au format de l'affiche, ses larges aplats de couleur, dont l'artiste sait habilement jouer. Il reste que sur certaines affiches, Jossot et d'autres caricaturistes comme Bofa conservent le "trait satirique" ; la clientèle de la revue des "Folies Bergères" est ainsi dépeinte sous un jour peu flatteur par une affiche d'A. Barrère.
Hors sujet, un corridor est tapissé de plusieurs "Unes" de "Hara-Kiri" et "Charlie-Hebdo" ; on est plus près ici de l'esprit réac de "Mai 68", hostile à la publicité et la société de consommation modernes. A ce stade, on peut dire que les caricaturistes se réapproprièrent l'impact de la caricature et de l'affiche et en usèrent comme d'une arme contre le pouvoir. Exposer des dessins de Siné dans ce cadre aurait été plus opportun, lui qui fut l'auteur d'affiches subversives en "Mai 68", en même temps qu'il collabora en tant que dessinateur avec certains industriels.
(NB : La plupart des affiches présentées sont dans le domaine public, mais il est interdit de prendre des photos, probablement pour protéger ce "non-droit".)
+ L'annonce d'un nouvel attentat sur le sol européen est désormais prétexte à un déferlement d'images pieuses laïques sur les réseaux sociaux ; les attentats sur le sol étranger, notamment en Irak, laissent beaucoup plus indifférents pour des raisons psychologiques qu'il n'est pas difficile de deviner.
On peut décréter l'abolition de dieu, il n'en subsiste pas moins la nécessité pour l'élite d'une culture capable de cimenter les "masses" derrière elle, c'est-à-dire de jouer le rôle de la religion, au sens social le plus primaire. Le "traitement de l'information" par les médias participe à cette réaction des masses sur le mode du réflexe.
Le Premier ministre Manuel Valls a curieusement évoqué au micro d'"Europe 1" mercredi matin la nécessité d'un combat "théologique" (sic) contre le djihadisme (se souvenant peut-être qu'il fut ministre des Cultes ?). Mais c'est un mélange de naïveté et de mépris de croire que l'on peut imposer une lecture anthropologique moderne des textes sacrés musulman et biblique, quand ces derniers consacrent et imposent le principe de la "révélation" (voire récusent carrément toute forme d'idéal social). La culture occidentale moderne est, avant tout, une culture dominante - sa force de persuasion vient de là, et non de prétendues études théologiques.
+ Sur le site "Caricatures & Caricature", Cyril Bosc inventorie la carrière du caricaturiste Maurice Sinet, alias Siné, reproduisant de nombreux dessins et unes, dont la suivante de "Siné Massacre" n°6 (1963).