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laïcité

  • Petite histoire de la laïcité

    ...à l'attention des Français musulmans roulés dans la farine par les "valeurs laïques".

    Pourquoi "roulés dans la farine" ? Parce que la ritournelle laïque a introduit la polémique politicienne dans l'institution scolaire, rendant la tâche des enseignants plus difficile encore. Moins aisées que la moyenne des familles françaises, les familles françaises musulmanes comprennent en général pour leurs enfants l'intérêt de la meilleure scolarité possible.

    Les Français musulmans ont donc intérêt à faire "le dos rond" face à ces provocations politiciennes, à ne pas tomber dans le piège tendu par le RN ou "Charlie-Hebdo" (sous prétexte d'une "liberté d'expression" dont les Français musulmans ne disposent pas autant) - de faire le dos rond, tout en se défendant sur le terrain judiciaire, ainsi que le font d'autres minorités religieuses lorsqu'elles se sentent diffamées.

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  • Culs-bénis laïcs

    Caricature par ZOMBI

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  • L'Arabe du Futur - tome 3***

    Succès de librairie inattendu en 2014, "L'Arabe du Futur" compte depuis deux tomes supplémentaires, et unwebzine,bd,gratuit,zébra,fanzine,bande-dessinée,kritik,critique,riad sattouf,arabe,futur,syrie,satirique,laïcité,islam,bachar el assad quatrième devrait paraître en 2018. Pour mémoire cet auteur franco-syrien y raconte son enfance, dont le plus clair se déroula au Moyen-Orient, notamment en Syrie où le père de Riad Sattouf exerçait un emploi de fonctionnaire (prof de fac).

    Le tome III retrace les souvenirs des années 1985 à 1987, quand l'auteur avait de sept à neuf ans.

    Le principal reproche que l'on peut faire à l'auteur est de ne pas se renouveler : les tomes se suivent et se ressemblent. Cependant les lecteurs agacés par les récits d'autofiction un peu vains trouveront ici leur compte car l'auteur parvient à donner à son récit une portée générale.

    Alors que Riad Sattouf s'est fait remarquer au cours des dernières années par des prises de position publiques assez démagogiques (typiques de la gauche libérale), "L'Arabe du Futur" aborde au contraire sans hypocrisie, de manière satirique, le problème du rapport de la culture laïque moderne avec la religion; c'est d'autant plus utile que cette question donne lieu en France à des débats aussi stériles que passionnés, orchestrés par les partis politiques.

    "L'Arabe du Futur" nous montre que la religion mahométane est, en Syrie, la religion des familles paysannes pauvres et frustes. Dans ce milieu, dont le père de R. Sattouf est issu, sévit en outre un antisémitisme à la fois viscéral et superficiel, conséquence du nationalisme arabe et de la haine de l'Occident, à commencer par les Etats-Unis. "Juif" est à peu près synonyme de "traître" dans le vocabulaire des gosses syriens, ce qui n'est pas sans rappeler le "Boche" de la France de la fin du XIXe siècle, et l'assimilation dans la littérature antisémite de ce temps-là des Juifs aux Allemands.

    Le père de R. Sattouf est un personnage charnière: son ambition sociale le place en porte-à-faux vis-à-vis de sa famille et de son éducation traditionnelle. Il penche du côté du modèle laïc républicain à la française, incarné à la fin des années 80 par le père de l'actuel président-dictateur, Hafez el Assad. De façon significative, l'esprit de revanche des élites arabes ne les empêche pas d'imiter la formule laïque occidentale qui, à leurs yeux, a fait ses preuves sur le plan politique. La réussite scolaire est une des principales valeurs inculquées à Riad par son père.

    La position de monsieur Sattouf père est comparable à celle des catholiques en France, militant à la fois pour la laïcité et pour la religion, c'est-à-dire le maintien de certaines coutumes religieuses. On le voit ainsi se plier au ramadan, non par conviction religieuse mais par piété filiale, tout en vantant le mérite du jeûne... sur le plan médical.

    Cet homme relativement émancipé des prescriptions religieuses, qui a osé épouser une "infidèle" française, se montre d'ailleurs lucide à propos de la culture laïque occidentale: celle-ci accorde à l'argent une place au moins aussi importante que la place accordée par la culture traditionnelle à dieu. Or le noeud du problème est bien là: le culte du veau d'or entraîne-t-il moins de superstition et de fanatisme que le culte d'Allah ou Mahomet ? Certains aspects de la culture occidentale indiquent qu'il n'en est rien.

    Le tableau que R. Sattouf brosse parallèlement de sa famille maternelle française, installée dans la région de Saint-Brieuc (Bretagne), indique bien que la principale différence culturelle est en termes d'aisance matérielle et de confort. R. Sattouf ne se montre par moins critique avec sa mère, pour qui l'exil en Syrie est de plus en plus pesant, et dont les revendications féministes ont une connotation assez matérielle.

    R. Sattouf ne tombe pas dans le piège d'une opposition manichéenne entre les différentes cultures de ses parents. 

    L'Arabe du Futur- tome 3, par Riad Sattouf, Allary éditions, 2016.

  • Revue de presse BD (256)

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    Extrait du recueil "Un certain climat".

    + Le dessinateur satirique René Pétillon a déclaré au magazine "Bretons" (août-sept. 2017) prendre bientôt sa retraite du "Canard enchaîné" ; à vrai dire il pourrait s'agir d'une "retraite de chanteur", avec de nombreux "come backs". Extraits de l'entretien accordé à cette publication identitaire où Pétillon a le culot de déclarer qu'il rêvait plutôt de travailler pour "Charlie-Hebdo".

    - Je n'ai pas candidaté [au "Canard"], ce sont eux qui sont venus me chercher. (...) Au tout début des années 1990, je commence à renouer avec le dessin d'actu dans VSD. C'est là que "Le Canard" me repère. Eric Emptaz, rédacteur en chef, me demande de le rejoindre. Il voulait un strip.

    - Nous sommes une dizaine de dessinateurs. Moi, je suis salarié. Mais nous ne le sommes pas tous. Cabu, par exemple, ne l'était pas. Quand vous l'êtes, vous réservez l'exclusivité de vos dessins politiques au Canard(...) Ils tiennent à l'exclusivité de la signature. Je le comprends tout à fait : en tant que salariés, nous sommes très bien payés et bénéficions de tous les avantages : intéressement, participation, etc. Il est logique qu'ils aient leurs exigences.

    - L'humour est incompatible avec le militantisme. Nous, dessinateurs de presse, sommes des tordus. Nous dessinons toujours contre. Le militantisme et l'engagement ont sans doute des vertus admirables. Mais il y a toujours, là-dedans, une dose de sectarisme et un certain caporalisme.(...)

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    Johnny Hallyday, un bel exemple de culture laïque (le chanteur sert ici de modèle au dessinateur Jijé).

    + De nombreux caricaturistes et titres de presse satiriques revendiquent les "valeurs républicaines laïques". A ce compte-là, on pourrait aussi bien créer une chaire pour enseigner la satire à la Sorbonne !

    La République française et la laïcité sont-elles particulièrement favorables à la caricature ? Pas plus que le régime de Louis XV, et probablement moins que le Royaume-Uni voisin où une poignée d'intellectuels imposera plus difficilement au reste du pays son opinion qu'il peut le faire en France, par le canal médiatique.

    A l'étranger, la prétention des Français à défendre la liberté d'expression mieux que quiconque prête d'ailleurs à sourire.

    La presse satirique a connu son âge d'or au XIXe siècle, sous le régime monarchique libéral de Louis-Philippe. Les profs laïcs eux-mêmes ont du mal à soutenir que le régime républicain est favorable à la caricature ; à mots couverts, D. Moncond'huy dans sa "Petite histoire de la caricature de presse en 40 images" (Folio) écrit le contraire : "Gageons que le recul relatif de la satire de presse, à sa manière, constituait un signe de l'affermissement de la République elle-même." Notons qu'il est nécessaire d'employer une litote pour dire que la République moderne est hostile à la caricature.

    Certains Français sont fascinés par le droit (les moins fascinés d'entre eux sont ceux qui connaissent le mieux l'appareil judiciaire et ses limites), mais c'est l'esprit le moins disposé à la satire qui assimile la réalité au droit, et le droit à la réalité. C'est là une tournure d'esprit équivalente au fanatisme religieux, qui attribue au fantasme une valeur supérieure à la vie.

    + Retour sur le SoBD (salon de la BD indépendante) qui s'est tenu le week-endwebzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,actualité,revue,presse,hebdomadaire,décembre,2017,rené pétillon,canard enchaîné,bretons,éric emptaz,cabu,charlie-hebdo,johnny hallyday,laïcité,république,caricature,louis-philippe,moncond'huy,sobd,philippe simon,sylvain insergueix,libraire,papiers nickelés,case,strip,alain boillat,marine borel,raphaël oesterlé,françois revaz,in-folio,feuilleton,olivier tallec,toutenbd,duperré,sempé,voutch dernier à la Halles des Blancs-Manteaux (Paris 5e) : j'ai bien écouté les explications du libraire (spécialisé dans la BD) Sylvain Insergueix, et j'en déduis que le métier de libraire et les librairies n'ont désormais plus aucun intérêt, autre que commercial.

    + Il apparaît d'autre part que la "reconnaissance de la BD" par les autorités culturelles est comparable au label rouge en charcuterie, puisque les auteurs de BD sont les derniers à en profiter, comme les cochons de leur label - sans compter les lecteurs, cinquième roue du carrosse, à qui on vend des livres comme on vend des petits pains.

    + Petit éditeur indépendant (éditions "Lapin") depuis quelques années, après avoir monté un site internet diffusant de la BD gratuitement, Philippe Simon a expliqué qu'il était plus habitué à gérer des dettes que des bénéfices. De plus, son domicile est encombré de cartons de livres ; malgré ces inconvénients, celui-ci a encouragé les passionnés à se lancer dans ce métier. Son catalogue compte désormais une centaine de titres.

    + Le prix "Papiers Nickelés" a été décerné au cours du SoBD à "Case, strip, action !", un copieux ouvrage qui étudie les feuilletons en BD parus dans les magazines pour la jeunesse de 1946 à 1959 (Alain Boillat, Marine Borel, Raphaël Oesterlé, Françoise Revaz (éd. In-Folio).

    + Olivier Tallec, formé à l'école Duperré, est illustrateur de livres pour enfants et publie aussi des dessins humoristiques.

    Sempé et Voutch sont ses références, ainsi que le "New-Yorker", et dans un entretien au site d'actu "Toutenbd" il explique sa méthode pour concevoir un gag.

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  • Revue de presse BD (172)

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    Charb, entouré par la rédaction de "Charlie-Hebdo" en p.2-3 du "Charlie-Hebdo" "spécial attentat", par Catherine Meurisse, parodiant ainsi la "cène" (dernier repas de Jésus avant son assassinat).

    + Hier (6 janvier), la rédaction de "Charlie-Hebdo" a publié un numéro spécial souvenir de l'attentat qui coûta la vie à une bonne partie des dessinateurs. On peut y lire notamment un récit détaillé plutôt macabre de la tuerie (un plan des lieux est même fourni) par Fabrice Nicolino ; celui-ci fut touché lors de la fusillade par trois balles de fusil-mitrailleur. Le même jour, ce journaliste a fustigé avec véhémence au micro de Jean-Michel Apathie (11') ("Europe 1") la récupération de cet événement sinistre par le chef de l'Etat afin de "relancer sa carrière".

    La Une signée Riss représente cette fois, non pas Allah ou le prophète Mahomet, mais un dieu plus difficile à identifier - le dieu des juifs et des chrétiens ? Ce pourrait aussi bien être le "grand architecte de l'univers" de Voltaire, ou bien "l'être suprême" des pères fondateurs de la République française. La rédaction de "Charlie-Hebdo" a sans doute voulu éviter l'accusation d'acharnement contre la communauté musulmane, tout en maintenant une ligne anticléricale.

    Un an après, ce qui a changé, c'est surtout que "Charlie-Hebdo" n'est plus un petit hebdo satirique acculé à la faillite, mais un titre de presse à fort tirage, connu dans le monde entier, et devenu "à l'insu de son plein gré" un "symbole national". Quelques dessinateurs s'efforcent d'ailleurs de plaisanter sur ce nouveau statut encombrant pour un journal satirique. D'autres mettent en avant leur combat pour la laïcité ; mais de quelle laïcité parle-t-on ? De celle qui a servi à justifier idéologiquement la conquête de territoires africains peuplés de mahométans ? Etre antimilitariste et républicain à la fois, comme l'étaient Cabu et Charb, revient plus ou moins à être schizophrène.

    + Un petit scandale ne peut pas nuire à la publicité, et chaque année le festival de BD d'Angoulême connaît son esclandre, quelques semaines avant l'ouverture (fin janvier). Riad Sattouf ("L'Arabe du Futur") a mis le feu aux poudres cette semaine en demandant que son nom soit retiré d'une liste de nominés au grand prix décerné par le festival, au motif que cette liste est exclusivement composée d'hommes. Rappelons que l'année dernière Riad Sattouf s'était vu décerner le fauve du meilleur album.

    Accusé de sexisme, le festival s'est défendu par la voix de son directeur Franck Bondoux ; celui-ci a fait remarquer que le métier d'auteur de BD est très majoritairement un métier d'homme, et que de même ne sont exposés au Louvre que très peu de tableaux peints par des femmes. Cela dit la direction du festival a cédé à la pression médiatique et décidé d'inclure quelques femmes dans la sélection ; on peut se demander si cette sélection ne sera pas encore plus humiliante pour les auteures choisies ?

    N'y a-t-il que Claire Bretécher pour avoir les couilles de dire que le féminisme est souvent chiant et dogmatique ? Par ailleurs il faudrait se demander si la morale américaine des quotas en faveur des noirs a véritablement été efficace pour diminuer la ségrégation raciale ? Rien n'est moins sûr.

    + Le concours "Jeunes talents" du même festival propose quant à lui une liste de candidats nominés majoritairement de sexe féminin. Les candidats sont départagés à partir d'une planche. Elles seront exposées au festival et l'on peut se procurer le catalogue de l'expo en écrivant à info@bdangouleme.com. Outre une Emilie Charia très oecuménique, Zébra a remarqué les illustrations de Clémence Hanssler (25 ans, LISAA Strasbourg) et les paysages inquiétants de Claire Le Gal (Ecole Estienne-Arts déco. Paris), ci-dessous :

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    "Tonnerre", par C. Hanssler

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    Paysage, par C. Le Gal

     

     

  • Revue de presse BD (168)

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    + Il ne s'agit pas de militer ici pour l'abstentionnisme en cette période de scrutin régional, mais plutôt de mesurer l'évolution de "Charlie-Hebdo", moins militant et moins proche du pouvoir dans sa version "canal historique", comme témoigne la "Une" ci-dessus, signée Wolinski (on en trouvera d'autres signées Reiser). On a tort d'imputer au seul Philippe Val le changement de cap opéré par l'hebdomadaire lors de sa refondation en 1992. Il s'agit d'un mouvement plus profond, qui a d'ailleurs permis à l'islam et au FN, dans des milieux différents, d'incarner une forme de contre-culture, comme "Hara-Kiri" autrefois.

    + Le site "La Quadrature du Net" reproche au gouvernement d'avoir prorogé l'état d'urgence sans raison valable, et d'avoir profité ainsi de l'aubaine des attentats ; de fait, on n'interdit pas la circulation automobile sous prétexte qu'elle fait des milliers de morts par an. "La Quadrature du Net" fait aussi le bilan du renforcement des prérogatives accordées à la police sans contrôle judiciaire, à l'occasion de la nouvelle loi sur l'état d'urgence... votée en état d'urgence (le 19 novembre). Les principaux membres du gouvernement et des partis d'opposition ratent rarement une occasion, à la suite d'un attentat, de mettre en cause l'internet.

    + L'ancien ministre du gouvernement Sarkozy et député Laurent Wauquiez a récemment avoué publiquement sa... bédéphilie. Les aventures de Blueberry et les BD de Bilal seraient ses préférées. Faut-il faire un rapprochement, certain psychanalyste a fait la comparaison entre la lecture de bandes-dessinées et la masturbation chez l'adolescent de sexe masculin ?

    Certains prétendent que la BD a acquis le statut d'art, avançant comme preuve les records atteints dans les ventes aux enchères par des planches originales. Mais cela revient à réduire l'art au côté "bling-bling" des salles de vente. Bien que la BD soit le sujet de thèses universitaires de plus en plus souvent, voire enseignée en fac, on s'interroge rarement sur ce qui, dans la BD, appartient au domaine de la culture de masse, et ce qui au contraire y échappe. Le plus souvent c'est l'étude stylistique qui est préférée, c'est-à-dire un angle technique assez creux.

    + Certains voudraient opposer à l'islam la laïcité ; c'est sans doute voué à l'échec. Non seulement parce que, en matière de laïcité, chacun voit midi à sa porte, mais aussi parce que la culture laïque républicaine a joué un rôle important afin de légitimer les guerres coloniales.

    Au demeurant l'art et la culture ont une dimension religieuse éminente ; on peut même dire qu'à travers la culture dominante et la contre-culture, ce sont deux conceptions religieuses de l'art qui s'affrontent. Prenons, par exemple, le fameux tableau de Delacroix représentant la "Liberté guidant le peuple" : son symbolisme est on ne peut plus mystique ou religieux, et son interprétation relève le plus souvent de la catéchèse naïve, occultant des pans entiers de l'évolution politique de la France depuis l'Ancien Régime. La révolte parisienne des "Trois Glorieuses", dont Delacroix part pour peindre son allégorie, contribua à renverser une monarchie, certes, mais cela au profit d'une autre monarchie. La République n'est pas moins vierge que la monarchie d'actions répressives contre le peuple et les ouvriers. On voudrait faire croire que la République moderne descend directement de la philosophie des Lumières, mais elle découle beaucoup plus probablement de l'Empire napoléonien, le plus restrictif en matière de libertés publiques. Pour finir, l'incarnation de la liberté par une femme à demi-nue est une mythologie pour le moins rocambolesque. Cette femme est la même que l'on retrouve sur les pièces de monnaie française, "semeuse" représentant la fécondité. On voudrait poser l'équation de la liberté et de l'argent, on ne s'y prendrait pas autrement. D'ailleurs Delacroix n'était pas dupe de ces symboles, qui vitupérait son époque en parlant de "régime d'agioteurs" et de "panhypocrisiade universelle".

    + Le webzine Zébra se décline cette année en un petit mensuel de 4 p., auquel il est possible de s'abonner en écrivant à zebralefanzine@gmail.com, ou bien de lire gratuitement sur le site de partage de fichiers issuu.com. Le n° de décembre vient de paraître.

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  • Revue de presse BD (137)

    Extraits de la revue de presse illustrée publiée dans l'hebdo Zébra.

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    + Critiquer "Charlie-Hebdo" ou Cabu, comme on ne s'interdit pas de le faire dans "Zébra", permet au moins d'éviter la récupération ou l'amalgame. Ainsi le dernier magazine "Lire" (mars 2015), dont la couverture est signée Cabu, n'hésite pas à titrer : "Rire, provoquer, écrire... de Rabelais à Charlie, avec Elisabeth Badinter, Michel Onfray, Umberto Eco". S'il y a sans doute quelque affinité entre Rabelais, Charlie et Cabu, bien qu'on peut penser que Rabelais est plus subversif (car raillant la religion dominante), en revanche je ne me souviens pas d'un seul trait d'humour chez Elisabeth Badinter, Michel Onfray ou Umberto Eco. A moins que ce ne soit la tradition, à "Lire", de faire traiter tel ou tel sujet par des spécialistes qui n'y entendent rien ?

    + Richard Malka, avocat de "Charlie-Hebdo" et scénariste de BD (pour Catherine Meurisse, notamment), a maladroitement exercé des pressions pour que ne paraisse "Charpie-Hebdo", pastiche de l'hebdo dont il assure la défense. Maladroitement, parce qu'on ne peut pas se revendiquer du mauvais goût et le refuser aux autres en même temps ; ensuite parce qu'il risque ainsi de faire de la publicité à cette publication.

    + Ne ménage pas non plus ses critiques à l'égard de "Charlie-Hebdo" le philosophe Alain Badiou. Dans un article paru dans le "Monde", intitulé "Le Rouge et le Tricolore" (28 janvier)Badiou s'attaque notamment aux valeurs républicaines et à la laïcité, notions à géométrie variable derrière lesquelles "Charlie-Hebdo" s'abritait parfois, et qui ont servi à fédérer le mouvement des "Tous Charlie" : "Dans cette guerre des identités, la France tente de se distinguer par un totem de son invention : la "République démocratique et laïque" ou "le pacte républicain". Ce totem valorise l'ordre établi parlementaire français - au moins depuis son acte fondateur, à savoir le massacre, en 1871, par les Adolphe Thiers, Jules Ferry, Jules Favre et autres vedettes de la gauche "républicaine", de 20.000 ouvriers dans les rues de Paris. Ce "pacte républicain" auquel se sont ralliés tant d'ex-gauchistes, parmi lesquels "Charlie-Hebdo", a toujours soupçonné que se tramaient des choses effrayantes dans les faubourgs, les usines de la périphérie, les sombres bistrots banlieusards. La République a toujours peuplé les prisons, sous d'innombrables prétextes, des louches jeunes hommes mal éduqués qui y vivaient. Elle a aussi, la République, multiplié les massacres et formes neuves d'esclavage requis par le maintien de l'ordre dans l'empire colonial. Cet empire sanguinaire avait trouvé sa charte dans les déclarations du même Jules Ferry - décidément un activiste du pacte républicain -, lesquelles exaltaient la "mission civilisatrice" de la France.(...)"

    On peut cependant s'étonner que, dans le même article, rappel historique de faits opposés à un catéchisme scolaire, A. Badiou qualifie Jeanne d'Arc "d'héroïne sublimement chrétienne", alors même que Jeanne d'Arc est l'exemple flagrant d'un détournement de la religion à des fins politiques ; personnage mystérieux et légendaire, Jeanne d'Arc incarne la continuité entre l'ancienne morale catholique religieuse et la nouvelle éthique républicaine, officiellement neutre.

    + Le trophée "Presse citron" 2015 du dessin de presse, organisé par l'école Estienne et la BNF sera décerné dans deux catégories distinctes, "étudiants" et "professionnels", le 26 mars, à la mairie du XIIIe arrondissement (dessins à envoyer avant le 16 mars), dans le cadre de la semaine de la presse et des médias. "Professionnel du dessin de presse" est un libellé qui fait un peu froid dans le dos. Qui sait s'il y a en face, dans les camps d'entraînement pour les terroristes, des trophées remis aux "pros" et aux "bizuts", par exemple pour récompenser le tir de précision au fusil d'assaut ? Ou bien s'ils font ça "à la bonne franquette".

    + Plus modestement, la firme japonaise "Posca" offre une mallette de ses marqueurs à qui dessinera la meilleure caricature de Marine Le Pen (à rendre avant le 2 mars) ; Loïc Sécheresse et Thibaut Soulcié ("La Revue dessinée") désigneront le gagnant.

    + La mode est, dans les festivals-BD, aux concerts dessinés. A force de vivre en ville, on peut finir par trouver la musique de vil prix en comparaison du silence ; il n'est pas vrai que la musique adoucisse les moeurs ; seule la chanson à texte satirique est vraiment désarmante ; ça tombe bien, puisque c'est la spécialité de Philgreff et son complice Monsieur Pyl, qui font profiter le public, notamment vendéen, de leurs talents convergents de portraitistes, à travers une série de concerts. Derrière l'étiquette des "Jean Quelque-chose", collée à leurs chansons, ils croquent les deux France, la profonde et la superficielle, avec impertinence mais sans méchanceté. Les compères ne manquent pas non plus d'idées variées pour distraire le public de leurs blogs respectifs, comme cette série de pastiches du (présumé) portrait de Gaby d'Estrées et sa frangine dont voici un extrait (ci-contre).

    + Le festival de BD d'Aix-en-Provence, qui s'étale du 23 mars au 23 mai, c'est assez rare pour le souligner, propose une programmation logique d'auteurs plus ou moins "underground", et une affiche bien dessinée par Sergio Mora (ce qui est loin d'être le cas de tous les festivals, y compris les plus prestigieux). Outre diverses expositions consacrées à "Fluide-Glacial", Dimitri Planchon, Gus Bofa, le point culminant sera le week-end des 10,11 et 12 avril permettant de rencontrer de jeunes auteurs talentueux, dont Joan Cornella, Marion Fayolle, Pluttark, Terreur graphique, Simon Roussin, Miroslav Sekulic-Struja, etc. (entrée gratuite). Programme complet disponible sur le blog dédié.