BD pleine d’ironie de Nicolas Presl, comme sa précédente «Hydrie» qui m’avait emballé (cinq étoiles au
guide Zombi 2012). Le titre confronte d’emblée le voyage initiatique du héros antique, son cheminement vers la sagesse dans un décor et parmi des monstres symboliques, au circuit touristique par où l’homme moderne passe, fuyant ses démons au lieu de les affronter.
Si «Heureux qui comme…» se contentait d’illustrer la folie du touriste occidental ordinaire, en quête d’exotisme, ce serait une observation de second ordre, déjà faite; mais c’est tout le transport humain, au sens propre comme au figuré, à l’échelle mondiale ultime, que la BD de Nicolas Presl rassemble dans ses planches, formant tableau. Une BD muette, encore une fois, mais néanmoins plus expressive que la parole. Le «Guernica» de la guerre tiède où nous trempons, lorsque l’empoisonnement discret est préféré au coup de poignard trop franc.
Puisque N. Presl joue du noir et du blanc, du fossé entre l’Afrique et l’Occident que l’hypocrisie ne fait que creuser plus encore: qui peut dire pourquoi la France envoie des troupes au Mali? Pourtant, elle est aussi contrainte de s’exécuter qu’il lui est impossible de fournir une explication sérieuse, de comment elle en est arrivé là, et comment elle compte s’en sortir? D’autres nécessités viennent en face, plus ou moins puissantes: télescopage, affrontement, coït, tuerie, rebondissement, pause culturelle… Presl peint tout ça, comme le chassé-croisé d’une myriade de destins. C’est à peine si l’on trouve le temps de s’arrêter sur un visage, animé par un rictus…
Se souvenant de «L’Hydrie» précédente, drame situé dans l’Antiquité, on peut en conclure que rien n’a changé. Rien ne s’est perdu du sacrifice humain antique, il ne s’en est pas créé de manière plus radicale ; seule la culture ou le vernis a changé. Bien qu’il donne l’illusion de bouger, comme le cinéma ou la BD, le plan social est statique. Le regard exercé de Presl ne tombe pas dans le panneau ou le détail, par où les choses paraissent mobiles.
Les bouquins de Presl sont des cauchemars ; sans doute cette matière-là se vend moins bien que les rêves, mais l’avantage du cauchemar sur le rêve, c’est qu’au réveil on n’est pas déçu.
Heureux qui comme... - Ed. Atrabile, 2012.
son propre père, enrôlé dans un régiment de char français en 40. Comme l’auteur se plaint lui-même d’avoir subi, enfant, les radotages plein d’amertume de son paternel, le moins qu’on puisse dire est qu’il avait conscience du défi qu’il se lançait… et qu’il n'est pas parvenu à relever.
dit dans "Télérama"; j’en soupirais d’avance, vu que tout est dionysiaque aujourd’hui: du supermarché en période de fête à la boîte de nuit «California Dream» en bordure de la voie express, jusqu’aux plateaux télé de Patrick Sébastien, sans oublier le look de croque-mort «too much» de Karl Lagerfeld… on n’en sort plus de la bacchanale mollassonne et quasi-quotidienne, si bien que, sans une petite tuerie de temps en temps, du côté de l’Ohio ou d’Oslo, on finirait par prendre le divin Bacchus pour un vulgaire guignol.
est mort jeune, mais ce n’est pas une raison. Chez Reiser, dans le tas, il y a trop de blagues centrées sur le cul, si je peux m’exprimer ainsi. C'est un genre un peu trop facile ; il n’y a pas beaucoup d’efforts à faire pour rendre un plan cul comique; la position scabreuse est en elle-même grotesque. Voyez le lion, noble et fier animal bouffeur de zèbres, pas le genre à laisser sa femme tenir la culotte comme la hyène: eh bien même le lion, dans cette posture, a tendance à déchoir. C’est beaucoup plus difficile de parler sérieusement de cul, comme dans «36 Nuances de grey».
et de la sauvagerie, mais par goût du réalisme.
les manières de dire l’entre-jambe féminin qui manquent dans le lexique, croyez-moi… ou si vous ne me croyez pas, rendez-vous à la Bibliothèque nationale.
Quand j’étais gamin, ayant déjà cessé de téter mon pouce vers treize ans, François Bourgeon était connu pour un roman historique en BD, campé dans le genre de XVIIIe siècle que les gens aiment regarder par-dessus leur épaule pour se donner un air avant-gardiste. Moins critique qu’aujourd’hui, je ne savais alors qu’en penser...