Croquis extrait du carnet de dessin de Louise Asherson :
FANZINE ZEBRA BANDE-DESSINEE ET CARICATURE
-
Tout s'envole !
-
Humbug
Retrouvez chaque semaine un gag de W.Schinski traduit de l'allemand dans Zébra :
...W.Schinski publie aussi dans nos colonnes son premier webcomic (feuilleton-BD), un polar intitulé G-1759 (A suivre).
-
Petite annonce
Urgent ! Ch. jg ou jf, 8-12 ans p. critique bd "Astérix chez les Pictes" dans Zébra. Bon niv. cult. générale, goût pour calembours de préf. Pas sérieux s'abstenir. Ecrire à la rédac. zebralefanzine@gmail.com
-
Golden Blog Awards 2013
Les "Golden Blog Awards", cérémonie de haute volée (beaucoup moins truquée que les Oscars ou la Palme d'or de Cannes, vu l'enjeu), aura lieu le 13 novembre prochain.
Dans diverses catégories plus ou moins indispensables, dont la BD, un trophée sera remis. Le Belge Ben Dessy et son blog "Macadam Valley" l'avait emporté en 2012 ; ça n'a pas changé sa vie, puisqu'il continue de publier d'excellents strips sur son blog, comme on peut voir ici.
Il vous reste une semaine pour voter pour le blog "Zébra" :
...ou bien pour le blog des strips de Lola :
-
La Vie de Mahomet
Le moins qu’on puisse dire, c’est que Charb et Zineb ne plaisantent pas avec les valeurs laïques républicaines. Alors qu’un observateur indépendant pourrait croire que ces valeurs, sonnantes et trébuchantes, sont plus proches du second terme de leur évolution que du premier, nos deux héritiers des Lumières françaises, pour leur part, n’ont pas perdu la foi dans la vertu pédagogique des devises républicaines.
Déplorant l’ignorance crasse des Français et leur inculture religieuse, nos deux compères se sont fait un devoir de leur narrer par le menu la vie du prophète Mahomet, vénéré par les mahométans, pour combler cette lacune de l’Education nationale. Les confrères de Charb et Zineb, postés à l’avant-garde de la civilisation, apprécieront sûrement ce matériel pédagogique à sa juste valeur :
- Eh, m’sieur, pourquoi il lui a une aussi sale gueule, mon prophète, dans votre bouquin pédagogique ? Ce serait pas un peu raciste, des fois ?
- Mais non, pas du tout, monsieur Charb est un artiste incrédule, dont le parti-pris est de dessiner tout le monde sans exception avec une sale gueule, pour ne pas faire de jaloux. Il est moderne, point à la ligne. Tout comme vous, Oussama, vous vous exprimez à la manière de Louis-Ferdi…, d’un écrivain moderne très connu, cela sans même vous en apercevoir ! Vous aussi vous êtes moderne, Oussama, comme tout le monde.
- Ah non, moi, m’sieur, j’veux pas être comme tout le monde, j’veux être différent.
Tant qu’on y est, emporté par l’élan scientifique imprimé par Charb et Zineb, on pourrait carrément supprimer l’instruction civique au collège et la remplacer par… des cours d’histoire. Stupéfaits, nos chères têtes blondes découvriraient que la loi républicaine, sans l’appui des forces armées et de la police, ne serait rien. La neutralité, t’as qu’à croire… ou encore que, loin de répondre au calcul algébrique de la moyenne générale, l’intérêt collectif défendu par les lois de la République se trouve soumis à certaines pressions qui le décalent assez nettement de son point d’équilibre idéal.
C’est-à-dire que les valeurs dont Charb et Zineb sont si fiers, au point de friser l’arrogance, ne sont que le produit d’un rapport de forces, dont la rhétorique est loin d’être le seul appui. L’éthique républicaine, en ça, est conforme à n’importe quelle religion, tirant argument de dieu pour renforcer les intérêts les plus terre-à-terre. A la place de dieu, les sectateurs de la République mettent la loi républicaine ; et la pureté de la loi républicaine, ils l’inventent de toutes pièces en s’asseyant sur l’histoire.
L’argumentaire scientifique de Charb et Zineb ne vaut donc pas un clou. Bien sûr les lois contre le blasphème n’ont jamais protégé que les religions dominantes, et non les cultures minoritaires ou démodées.
La Vie de Mahomet, Charb et Zineb, eds. Charlie-Hebdo, 2013.
-
Revue de presse BD (72)
+ Le street-artiste Banksy a récemment "décoré" les rues de New York à l'oeil. La fresque ci-dessus est son oeuvre (représentant les cavaliers de l'apocalypse ?). Certains graffeurs expliquent que les villes les plus laides au monde sont celles où l'on peut observer les plus beaux graffitis, et qu'à cet égard la ville de Sao Paulo bat tous les records.
+ Le 3e festival de l'auto-édition organisé par l'association "Papier Gâché" se tient ce week-end, samedi 19 et dimanche 20 octobre à la médiathèque Marguerite Duras (Paris XXe).
Quand on pense que le ministre Montebourg veut réindustrialiser la France, alors que, de toute évidence, l'avenir est au "Fais-le toi-même !", voire carrément au "Pense par toi-même !"
+ Documentaire sorti en salle mercredi, "La Ruée vers l'Art" froisse apparemment la presse française. Il serait "démagogue" (sic). Il est vrai que ne pas croire dans l'art en 2013, revient à peu près au même que ne pas croire en dieu aux alentours de 1780 ; et que les éditoriaux jouent à peu près le rôle des sermons en chaire. Il faut donc laisser les esprits se préparer petit à petit à l'idée que l'art, à son tour, est mort.
+ Ceux qui croient que l'art dure toujours pourront aller lire l'interview que Michel Houellebecq vient d'accorder à "Liaisons" ; après avoir séduit le public féminin, le public allemand, BHL, le jury Goncourt, Houellebecq séduit la police judiciaire, qui publie cette gazette (et moi qui croyais que "Liaisons" était l'annuaire des partouzes de France).
+ Banksy, encore lui, a décidé de brader quelques-unes de ses oeuvres sur le trottoir près de Central Park. Après tout le mal qu'il a dit du capitalisme et de la propriété intellectuelle, il ne manquerait plus que Banksy favorise une bulle spéculative autour de son nom. Comme elle est un signe d'inefficacité économique, la spéculation est aussi un indice de débilité artistique.
+ L'idée que la BD est un "art séquentiel" s'accorde très bien avec l'idée que les auteurs de BD sont les rois du bricolage. La lecture d'une notice de montage Ikéa est certainement une chose aisée pour un auteur de BD, surtout s'il a passé l'option turbomédia (c). L'idée de Pacco de faire une BD en cheville avec Leroy-Merlin est donc géniale. "Je pense que bien des lecteurs vont se retrouver dans ces situations à la fois drôles et parfois même épiques.", décrit Mathieu, du webzine Hellocoton, enthousiaste (je confirme que les blogueurs-BD s'habillent vraiment comme dans les BD de Pacco).
+ Une planche originale d'Astérix et Obélix a été retrouvée dans une benne à ordures du XVe arrondissement, rapporte "Le Figaro". Pour une valeur estimée entre 70.000 et 90.000 euros. Comme quoi les riches ne respectent rien, même pas l'argent.
+ Le dessin de la semaine est un doodle de Google ; les usagers de cette multinationale sont familiers de ces illustrations ; publiés régulièrement sur la page d'accueil, les doodles célèbrent tout et n'importe quoi ; cette semaine, le 169e anniversaire de Nietzsche. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais chacun voit Nietzsche à sa porte; ainsi, chez Google, on lui a collé un cerveau en ébullition et une gueule moderne, quand bien même la philosophie de Nietzsche est des moins intellectuelles.
-
Retour au Congo***
Le genre de dessin sensuel, ou bien encore «païen» de Hermann, se fait de plus en plus rare en bande-
dessinée ; il est combattu par des grammairiens de la BD, qui préfèrent mettre à l’honneur des albums qui sont au 9e art ce que les manuels "Bled" sont à la littérature.Cette sensualité tient au charisme du dessin d’après nature, quand il n’est pas excessivement virtuose ou académique, et sans doute plus encore au plaisir manifeste que Hermann prend à dessiner, et qui se communique au lecteur. On peut le comparer à cet ancien pilier de la BD belge, Joseph Gillain alias Jijé, doué du même talent pour imiter la nature (bien que l’adjectif «païen» lui eût déplu).
Dans ce «Retour au Congo» fraîchement paru, on ressent en particulier le plaisir de dessiner des lions, des zèbres, des rhinocéros et des crocodiles dans des paysages africains.
Hermann a cherché et trouvé également des solutions pour remplacer les couleurs d’imprimerie artificielles et peu adaptées à son style ; une lumière grise pour rendre l’atmosphère de la Belgique, une lumière bleutée pour le Congo.
On peut craindre de la part de ce type d’artiste, chez qui le goût du dessin l’emporte, le choix de scénarios indigents. De fait, Hermann comme Gillain ont dessiné beaucoup d’albums presque «paysagers», dont on retient peu le propos, qui sonne à chaque fois comme un prétexte.
Cette fois-ci, dans «Retour au Congo», dont Hermann a délégué le scénario à son fils, un jeune dessinateur de BD belge s’embarque pour le Congo afin d’y déterrer quelque vilain secret enfoui dans le passé de sa famille et de son pays. Les anciennes colonies restent une grande source d’inspiration pour la littérature occidentale, peut-être parce que le Royaume-Uni, la France et la Belgique ont définitivement perdu leur âme et leur vertu dans cette aventure, comme dit Senghor ?
Les meilleurs romanciers en ont tiré des œuvres ambigües ou vénéneuses, à mille lieux de la sérénade de l’amitié entre les peuples, officielle ou publicitaire. Mais ces romanciers avaient un minimum d’expérience de la vie coloniale, qui fait défaut ici au scénariste pour rendre l’âpreté du mélange des cultures et de la concurrence des intérêts ; on s’approche plus ici d’un clin d’œil ou d’un pied de nez au naïf «Tintin au Congo» d’Hergé ; mais on sent que le scénario laisse surtout la plus grande marge afin que l’art de Hermann puisse se déployer.
Retour au Congo, Hermann & Yves H., Glénat, oct. 2013.