Image extraite de la série débile "Pr Moustache", diffusée par "Arte".
+ Comme je le disais la semaine dernière, en matière de féminisme les hommes en font parfois un peu trop. Ainsi, pour voler au secours des auteures de BD opprimées, Yan Lindingre ("Fluide Glacial") a cru opportun de créer le prix "Couilles au cul", destiné à récompenser au prochain festival d'Angoulême une auteure pour son courage. Ce n'est même pas un gag : un sculpteur, Denis Hilt, a été chargé d'exécuter le trophée saugrenu (même pas une sculptrice). Comme c'était à prévoir, la réaction des ligues de vertu féministe à cet hommage a été rien moins qu'unanime.
+ Après pas mal de tergiversations et un "mea culpa" de son directeur F. Bondoux, le FIBD a désigné trois auteurs parmi lesquels sera désigné le gagnant du "grand prix" de la foire internationale : Hermann, Alan Moore et Claire Wendling. Le premier, Hermann, est un auteur actif depuis longtemps et réputé pour son dessin énergique, inspiré des comics américains ; cependant le dessin d'Hermann n'a jamais été mis au service d'un scénario mémorable ; le britannique Alan Moore revendique un propos et une BD destinés aux adultes, mais il ne s'élève guère au-dessus du niveau puéril des comics américains et d'un érotisme racoleur ; quant à Claire Wendling... ce n'est pas vraiment une auteure de BD.
+ La chaîne franco-allemande "Arte" diffuse depuis quelques semaines le "Pr Moustache", un petit dessin-animé de vulgarisation scientifique, dessiné par Marion Montaigne (et lu par François Morel). Ce feuilleton, qui se veut désopilant, est complètement débile ; mais avant de dire pourquoi, disons deux mots des obstacles auxquels se heurte la "vulgarisation scientifique".
L'histoire de la science est négligée dans l'enseignement scolaire ; celui-ci se situe souvent au niveau de la légende dorée - le récit de la pomme de Newton, par exemple, donnée pour cause de l'intuition géniale du savant anglais. De ce point de vue, l'effort de vulgarisation et de démystification paraît donc justifié. Néanmoins les difficultés sont nombreuses : la science actuelle est faite de raisonnements et de démonstrations imbriqués les uns dans les autres, à la manière de poupées russes ou d'un film dont il faudrait comprendre le sens global en n'ayant vu seulement quelques images.
De surcroît la science actuelle est en perpétuel mouvement ; dominante encore il y a une quinzaine d'années, la théorie physique dite "des cordes" est déjà en train de se démoder. De même la théorie du "Big-bang" ne fait plus l'unanimité depuis quelques années - ses nombreuses lacunes ont ouvert de nouvelles voies de recherche. Cette instabilité rend la tâche du vulgarisateur ardue. Ajoutons encore un dernier obstacle - les lois mathématiques sont paradoxales et heurtent le sens commun ; comment expliquer que les lois de la gravitation de s'appliquent pas aux "composants" des particules élémentaires, électrons, protons et neutrons ? La loi de gravitation de Newton elle-même est loin de permettre tous les calculs. Les suiveurs de Newton (le Français d'Alembert) ont dû lui appliquer bon nombre de correctifs complexes.
Toutes ces complications font apparaître la science contemporaine comme un langage d'initiés. L'initiation évoque plutôt la religion, mais on aurait tort de sous-estimer les rapports étroits que la religion et la science entretiennent depuis toujours. D'ailleurs le concept de "science laïque", défendu par certains vulgarisateurs français (C. Allègre) ne pèse pas lourd scientifiquement.
Le feuilleton de Marion Montaigne est débile car il contribue à fait passer la technologie pour la science fondamentale ; le propos de Marion Montaigne est entièrement dépourvu de recul critique ; il présente les dernières données de la science comme sûres, alors que ce ne sont que des hypothèses. Le cas du boson de Higgs est significatif : 4 milliards d'euros ont été dépensés au bas mot afin de construire un accélérateur de particules géant (Large Hadron Collider) ; quelques années après sa mise en service et une panne ayant entraîné un surcoût, le Cern (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) a annoncé la "très forte probabilité" d'avoir découvert ce qu'il cherchait : le fameux boson de Higgs. Une jolie histoire... dont les tenants et aboutissants sont difficile à saisir pour le grand public, voire les instances politiques qui valident l'allocation de crédits.
De plus nous vivons une ère technologique et industrielle aux implications politiques considérables. Ladite "science physique fondamentale" actuelle est-elle si fondamentale que ça, ou un ensemble de démonstrations théoriques brillantes destinées à servir d'alibi à l'industrie ? Compte tenu des milliards brassés et de l'enjeu politique, ne pas se montrer un minimum circonspect, c'est faire preuve d'une grande foi et non d'esprit critique.
Les régimes totalitaires sont des régimes technocratiques, et l'incitation à la méfiance vis-à-vis du jargon scientifique ou intellectuel est le fait de tous les essayistes qui ont étudié la dérive totalitaire de l'Occident : Orwell, Bernanos, Hannah Arendt, Simone Weil, pour n'en citer que quelques-uns. Contre la physique quantique, cette dernière écrivait : "la formule de Planck, faite d'une constante dont on n'imagine pas la provenance et d'un nombre qui ne correspond à aucune probabilité, N'A AUCUN RAPPORT AVEC AUCUNE PENSEE." ; ou encore ceci : "Les quantas d'énergie sont contraires à la raison." ("Réflexions à propos de la théorie des quantas")
+ Le 21 janvier est l'occasion pour de nombreux internautes de célébrer sur les réseaux sociaux la mort de deux despotes : Louis XVI (1793) et Lénine (1924). Curieusement, certains qui regrettent le premier vantent la monarchie comme un obstacle au capitalisme et à la mondialisation ; en réalité, la monarchie française a précédé les Républiques bourgeoises dans la voie du capitalisme. Les historiens qui étudient le capitalisme situent ses débuts au XVIIe siècle, voire au moyen-âge. Le culte de Lénine relève lui aussi de l'idéologie ; le révolutionnaire russe finit par reconnaître son échec (dans des écrits publiés à titre posthume) et compara le régime soviétique à celui de Louis XIV, qui fit accomplir à la France le même progrès technique et politique brutal.
+ Pour la quatrième année consécutive, le fanzine Zébra concourt au prix du fanzine ("BD alternative") d'Angoulême, avec 28 autres petites publications venues du monde entier (Taïwan, Japon, Espagne, Ukraine, Allemagne, Russie, etc.). L'année dernière le fanzine "Dérive urbaine" (Paris) s'était vu décerner le prix, et son rédac-chef Boris Hurtel avait répondu à une petite interview pour présenter "Dérive urbaine".
Couverture du fanzine "Maidan" n°1 dans le style soviétique (concours fanzines du FIBD)