Caricature par ZOMBI
louvre
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Dans quelle galère ?
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Le Strip de Lola
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Revue de presse BD (324)
+ La succursale du Louvre à Lens propose actuellement une exposition sur Homère et les héros de "L'Iliade" et "L'Odyssée" (-22 juillet), très différents des super-héros modernes reflétant une culture où la technique occupe une place prépondérante.
Les commissaires de cette exposition n'hésitent pas à qualifier Homère de "poète fondateur de la culture occidentale" ; mais parler de "culture occidentale", c'est comme dire "Dieu existe !". La culture occidentale n'existe que sous la forme d'un amalgame hétéroclite, non d'un bel ordonnancement.
La culture contemporaine, ultra-élitiste et intellectuelle, est bien plutôt rattachable à Platon, premier détracteur de Homère. Les philosophes allemands du XIXe siècle qui ont promu l'Idée au-dessus de tout, n'ont fait que reprendre et adapter Platon, non Homère, beaucoup plus matérialiste.
On dit que Homère était aveugle ; c'est étonnant car il est beaucoup plus imagé que Platon. On dit qu'il était peut-être plusieurs. C'est étonnant car il est particulièrement cohérent. Achille et Ulysse sont ainsi parfaitement opposables. La force d'Ulysse est la faiblesse d'Achille, et vice-versa. Ulysse n'est pas mû par le destin.
Il est fascinant d'observer qu'à travers les millénaires et les écoles, l'opposition entre l'idéaliste Platon et le matérialiste Homère (sous l'influence du judaïsme ?) perdure.
+ Découvert le week-end dernier à l'exposition à Clichy de plusieurs caricaturistes exerçant dans "Siné-Mensuel" (Waner, Micaël, Pakman...), le jeune caricaturiste FRiLOUZ, dont les silhouettes inquiétantes délivrent des messages ironiques (ci-dessus).
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Revue de presse BD (322)
Bucéphale dompté par Alexandre.
+ Moins célèbre que Géricault, le Baron Gros (1771-1835) fut lui aussi un exceptionnel dessinateur de chevaux, élève de J.-L. David. Du 28 juin au 30 septembre, le Louvre expose sa collection de dessins d'Antoine-Jean Gros.
Qu'y a-t-il de plus difficile à dessiner que les chevaux ? Même pas le corps humain, répondent certains maîtres. Le cheval fascine, en particulier les femmes et les soldats, car il est symbole de puissance (l'équitation est un sport "sexiste", majoritairement pratiqué par des femmes)... du moins l'était-il jusqu'à l'apparition de l'automobile.
L'écologie est à la mode, mais le dessin d'après nature a presque disparu au profit d'une conception mécaniste ou "perspectiviste" du dessin, beaucoup plus proche de la photographie, en réalité, capable de rendre le mouvement mais non la vie.
Il arrive que dans le milieu de la bande dessinée, on ne sache pas faire la différence entre un bon dessinateur et quelqu'un qui a seulement un oeil photographique, dont le travail relève de la "performance". Reiser est ainsi bien meilleur dessinateur que Moebius, car Reiser simplifie tandis que Moebius complique.
"Gros et Géricault, sans posséder la finesse, la délicatesse, la raison souveraine ou l'âpreté sévère de leurs devanciers, furent de généreux tempéraments." écrivait Baudelaire, inventeur de "l'art moderne".
Caricature par Joep Bertrams.
+ La décision du "New York Times", grand quotidien new-yorkais, de ne plus publier de dessins de presse après l'accusation d'antisémitisme visant plusieurs caricatures de B. Netanyahou (par Roar Hagen et Antonio Moreira Antunes) ne surprend personne, quoi que quelques-uns font semblant d'être surpris ("Le Monde"). L'antisémitisme n'est ici qu'un prétexte (ignoble).
On sait très bien que la politisation extrême de la presse et son but publicitaire (mercantile) ont radicalement transformé la presse en quelques décennies, rendant les romans d'anticipation de Georges Orwell plus "actuels" que jamais.
Donald Trump n'a pas tort de dire que les journaux publient des foutaises - il est mieux placé que quiconque pour le savoir. Sa stratégie politique peut d'ailleurs s'interpréter comme une tentative de reprendre les rênes de la politique en main, rênes qui ont complètement échappé à son prédécesseur et l'ont conduit à mille lieues de ses promesses de venir en aide aux communautés les plus démunies.
+ Les auteurs de BD bénéficient depuis peu à Nantes de vastes locaux de travail et d'exposition, la Maison Fumetti ; du 13 au 16 Juin, la Maison Fumetti organise un festival de BD indépendante.
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Dessiner en plein air***
La petite histoire de la peinture en plein air n'aura plus de secret pour le lecteur de cet ouvrage documentaire... et qui plus est de saison, puisque le soleil frappe moins fort (les artistes de plein air sont tributaires -ô combien- de la chaleur ou du froid excessifs).
L'ouvrage traite en particulier de la première moitié du XIXe siècle, sans doute charnière du point de vue de cette discipline. Le dessin en plein air sur le motif n'est pas une innovation du XIXe siècle et des impressionnistes ; on conserve de très belles études de fleurs des champs par A. Dürer, dont les couleurs à l'aquarelle sont à peine altérées par les siècles.
Cependant le XIXe siècle a fait d'un exercice multiséculaire un art à part entière, à la suite des XVIIe et XVIIIe siècles où l'on discernait déjà les prémices de ce nouveau genre.
Bien sûr la peinture en plein air sur le motif est liée à l'essor technique : si dessiner en plein air a toujours été possible, y peindre représente une gageure sur le plan technique. Il faut pouvoir transporter un matériel léger (les tubes de peinture le sont) et exécuter rapidement sur des toiles de petite taille.
Plus difficile encore, la lithographie d'après le motif, revendiquée par de très rares artistes dont un certain Eugène Bléry, graveur de paysages de la région parisienne, dont l'application ne compense pas le manque de grâce.
On voit poindre l'écueil de la "performance" en art, qui guette les artistes au sein d'une civilisation de plus en plus technicienne. Il saute aux yeux que le "coin de campagne" et les tournesols deviennent un "sujet" au moment même où l'urbanisation et l'industrialisation réduisent la nature à un lieu de villégiature charmant.
L'intérêt de ce travail documentaire est accru sous l'angle des rapports entre l'art et la technique qu'il permet d'envisager. Dès le début du XIXe siècle, la production industrielle commence en effet de se substituer à l'art. Les progrès accomplis par la technique photographique au XIXe siècle forcent ainsi les peintres de paysages à s'interroger sur leur pratique. Tandis que la photographie stimule certains et fait naître des vocations, d'autres la perçoivent au contraire comme une menace pour la poésie ; d'autres encore s'en accommodent et savent éviter le piège du détail et de l'anecdote tendu par la photographie.
Les croquis des bords de fleuve (Seine, Oise...) exécutés par Daubigny depuis la petite embarcation spécialement prévue à cet effet, "Le Botin", plaident en faveur de la spontanéité du dessin. S'il est une dimension de la poésie à laquelle le développement de la technique contribue peu, c'est la simplicité.
Dessiner en plein air - Variations du dessin sur nature dans la première moitié du XIXe siècle, ouvrage collectif, ed. Musée du Louvre, 2017.
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Dessiner le quotidien***
La Hollande au Siècle d'or
Quelquefois les catalogues d'exposition font regretter de ne pas s'être déplacé pour admirer les «oeuvres originales», expression qui prend tout son sens s’agissant des dessins hollandais du XVIIe siècle (conservés et exposés récemment au musée du Louvre). On sait l'importance du dessin pour les amateurs d'art éclairés, mais on ne la comprend pas toujours : l’économie de moyens permet d’approcher le cœur de l’artiste.
Ces scènes de genre ont été divisées en scènes de la vie quotidienne à la campagne, ou en ville ; certains dessins illustrent aussi de façon précise des métiers ou des techniques disparus.
Quelques scènes ont une tonalité satirique et montrent les travers de la société.
Des causes religieuses sont parfois invoquées pour distinguer cette petite peinture intimiste hollandaise, discrète, de la grande peinture italienne brillante. Il est vrai que certains théologiens ou pasteurs réformateurs protestèrent contre la grande peinture italienne, cautionnée par l'Eglise catholique et prisée de riches commanditaires désireux d'en mettre plein la vue.
Cependant il ne faut pas sous-estimer l'argument climatique de Montesquieu, plus concret ; celui-ci souligne les contraintes matérielles qui pèsent sur l'art et les artistes, différentes suivant les pays ou les régions (on ne peut pas peindre à fresque dans les pays humides).
La nature, toujours épanouie en Grèce ou en Italie, a plus d'influence sur l'art qu'elle n'a en Hollande ou en Allemagne où on a tout le loisir de se pencher sur la psychologie et les relations humaines.
Si l'art hollandais est plus psychologique, plus littéraire que l'art italien, il n'en repose pas moins sur le dessin et la capacité que les Hollandais ont en commun avec leurs confrères italiens de dessiner des figures qui paraissent vivantes. La méthode de l'apprentissage du dessin d'après le modèle vivant était alors encore vivace dans toute l'Europe.
Un grand maître du dessin, tel Rembrandt, côtoie ici de moins grands, comme Maes ou Dusart, voire de petits maîtres inconnus comme Th, Matham ou J. van de Velde.
Dessiner le quotidien - La Hollande au Siècle d'or, catalogue sous la direction d'E. Brugerolles et O. Savatier-Sjöholm, éd. Lienart, 2017.
Scène de taverne (par Adriaen Van Ostade)
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Revue de presse BD (259)
gag signé Mo/CDM, extrait de "Fluide" hors-série n°81
+ Le musée du Louvre s'efforce de dépoussiérer son image depuis quelques années grâce à la BD. Celle-ci apparaît en effet comme un art plus facile d'accès. Plusieurs albums ont ainsi été coproduits par le Louvre et la maison d'édition de BD Futuropolis. Bien que ces albums soient plutôt ironiques, ils ne remettent pas directement l'institution en cause.
En invitant l'équipe de l'hebdomadaire "Fluide-Glacial" à visiter Le Louvre, à mi-chemin entre le sanctuaire et le parc d'attraction, la direction de l'établissement n'a pas craint de provoquer l'humour. Dans un "hors-série", l'équipe de gagmen de "Fluide-Glacial" répond par une série de vannes plus ou moins subtiles et efficaces. Le public du Louvre est la cible des railleries, mais aussi le personnel et le discours esthétique snob qui accompagne parfois l'exposition des oeuvres.
Le défaut de ce hors-série est qu'il s'agit d'un ouvrage de commande, or la satire répond rarement à une commande.
(Hélas un prof d'histoire de l'art, Martial Cavatz, s'est glissé parmi les gagmen ; il enfourche le dada de la "reconnaissance de la BD" par le milieu des critiques d'art. Outre que ce discours académique est ici hors sujet, même un esprit satirique limité sera conscient de l'impact du marché sur le goût contemporain en matière d'art et sa reconnaissance.)
+ En ce début de nouvelle année 2018, "Siné-Mensuel" et Berth s'approprient une affiche fameuse de "Mai 68", représentant un CRS en pleine opération de maintien de l'ordre public républicain. Le dessin original est signé d'un certain Jacques Carelman, à la fois dentiste, illustrateur, humoriste dans le genre loufoque, et décorateur de théâtre. Celui-ci précise dans une interview que l'inscription SS sur le bouclier du CRS est "apocryphe".
Comme il y a deux "Charlie-Hebdo", on peut distinguer aussi deux sortes de "soixante-huitards" : ceux qui virent dans l'accession de la gauche au pouvoir en 1981 le prolongement de "Mai 68", et ceux qui a contrario furent déçus par ce résultat.
La récupération politique de ce mouvement cache que, à l'instar de la première mouture de "Charlie-Hebdo", il est difficile de dégager un axe politique de cette révolte, qui prit les élites au dépourvu pour cette raison. On ne peut manquer d'observer qu'un certain nombre d'ex-soixante-huitards en vieillissant et se rapprochant du pouvoir sont devenus les pires censeurs.
+ "Les nouveaux Cahiers de la BD se présentent sous une couverture représentant Chihuahua Pearl : un choix relativement étonnant, fait remarquer H. Filippini (BD-Zoom), puisque à quelques exceptions près, les articles proposés ignorent la BD de divertissement !"
Plus étonnant encore le choix d'une "call-girl" machiavélique pour illustrer un n° qui contient une enquête intitulée : "Les Femmes sont-elles l'avenir de la BD ?"
+ La sélection de trente fanzines pour le concours de fanzines organisé par Philippe Morin dans le cadre du prochain festival d'Angoulême est on ne peut plus éclectique. On y trouve en effet un fanzine (marocain) "Halal", à côté d'un fanzine, "La Bûche", exclusivement réservé aux autrices (sic) de BD.
Saluons un tel éclectisme, qui tranche avec l'uniformité ambiante.