Zep a récidivé. Nous avions dit ici tout le mal que nous pensions de sa précédente tentative d’écrire et
dessiner un drame convaincant, sortant du registre habituel de sa série à succès, "Titeuf". Son récit, plus ou moins autobiographique, des boires et déboires d’une bande de jeunes adultes amateurs de rockn’roll, était plein de clichés et, qui plus est, servi par un trait mollasson rehaussé d’un camaïeu couleur guimauve pénible à l'oeil.
Sur ce dernier point, Zep n’a pas fait de progrès ; mais il a changé radicalement de thème, puisque c’est la vocation religieuse qui est le sujet de ce nouveau drame, traité de façon nettement plus subtile. Zep place un moine chartreux cinquantenaire, son personnage principal, sur le fil du rasoir.
Le scénario fait au début craindre le pire, c’est-à-dire le plus prévisible ; en effet notre moine cloîtré, non seulement ascétique mais contraint à la règle du silence, en vigueur dans cet ordre monastique strict, doit quitter son monastère afin d’aller récupérer chez le notaire sa part d’héritage léguée par une tante pleine aux as.
Le plus prévisible va bien se produire lors de cette escapade; cependant Zep propose un portrait crédible ; les dialogues sonnent assez juste, et la vocation du chartreux est présentée avec le recul suffisant ; l'intérêt du lecteur est éveillé pour ce mode de vie on ne peut plus marginal (les moines catholiques ne sont plus qu’une poignée d’individus en Europe), en même temps que la profondeur de cette vocation est remise en question. La confrontation précoce du moine, pendant l'enfance, avec la mort violente d’un voisin, suicidé, explique-t-elle un choix de vie aussi radical et original ? Il semble que le tourbillon de la vie moderne soit une manière d’effort collectif un peu désespéré pour tenir à distance la mort ; la vie de reclus que s’impose notre chartreux pourrait être une méthode alternative pour amadouer cette mort, dont la brutalité l’a surpris un jour, et fortement impressionné.
L’auteur n’enferme pas son personnage dans cette hypothèse psychologique, plausible mais un peu réductrice, en montrant par exemple qu’il mène une existence non moins intense que le commun des mortels, malgré sa solitude et son isolement.
On peut se demander parfois, à la lecture de certain dialogue, si ce moine catholique n’est pas un peu bouddhiste ; l’évangile et ses commentateurs les plus fidèles (Paul de Tarse) tiennent en effet sur la mort des propos nettement différents («somme des péchés», «rançon de la chute») de ceux placé par Zep dans la bouche de son chartreux ("la mort est une forme de communion totale"). Néanmoins on peut penser que l’éthique d’une vie cloîtrée est le principal support de la spiritualité monacale, avant même l’évangile.
Si Zep est plus convaincant sur le thème de la vie religieuse que sur le thème du vice et du rockn’roll satanique, c’est peut-être parce que la BD est un art monacal ?
Un bruit étrange et beau, Zep, éd. Rue de Sèvres, 2016.
Clowes, plus ennuyeuses et laides les unes que les autres ? On comprend que la Série noire (collection de polars française), ait inclus à son catalogue des romanciers américains, seuls capables de rendre la violence extraordinaire des mégalopoles américaines. Mais on est plus près avec Daniel Clowes du mauvais cinéma.
ses représentants les plus fameux : Magritte, Klee, Warhol, Dali, etc.
l’Amour. Dans l’Occident résolument mercantile, la « société de consommation » comme l’on dit poliment, les statues érigées au dieu Amour sont un moyen d'exciter la cupidité, qui est le nerf ou le cerveau de la société.
entreprise éditoriale dans le tempérament de J.-J. Rousseau (1712-78), pédagogue enthousiaste. Il ne s'agit pas de l'un de ces "dictionnaires amoureux" à la mode, souvent légers malgré leur poids, mais d'une tentative pour présenter la pensée de J.-J. Rousseau de façon compacte en même temps qu'étayée. L'auteur a fait l'école polytechnique et son ouvrage est par conséquent structuré, proposant plusieurs portes d'entrée dans l'oeuvre protéiforme de Rousseau (essais, autobiographie, romans, correspondance privée, etc.) :
comporte des réussites ("Picasso" par Birmant et Oubrerie, "Egon Schiele" par X. Coste), et des échecs ("Le Caravage", par Manara, "Dali" par Beaudoin).
égratigne au passage certains régimes totalitaires (URSS, Japon, Amérique...), mais occulte le pillage meurtrier des richesses du Congo par la Belgique ; de même le Québécois G. Delisle propose un angle de vue assez étroit sur Israël, la Corée du Nord ou la Birmanie.