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critique - Page 13

  • Black dog**

    Cette BD donne raison à ceux qui expliquent que la BD ne repose pas sur le dessin, mais qu'elle est plutôt unewebzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,critique,kritik,jacques loustal,jean-claude götting,black dog,polar,casterman forme de littérature un peu bâtarde.

    Une fois de plus, je me suis laissé séduire par la couverture d'un album de Loustal, illustrateur talentueux, au trait français élégant et à la colorisation maîtrisée comme celle d'un peintre ; une fois de plus j'ai été déçu par un scénario creux, pour ne pas dire indigent. Le scénario est de Jean-Claude Götting, illustrateur lui aussi. Il s'agit d'un polar dans le genre américain, un règlement de compte entre gangsters, quelque chose comme ça - je faisais plus attention à la manière de Loustal qu'à l'intrigue. Le précédent album de Loustal était aussi un polar, situé à Paris, (un peu) plus crédible.

    Quelle idée de vouloir faire du polar américain quand on est Français ? Je suppose que les auteurs ont voulu s'amuser. Parfois les artistes ne cherchent pas autre chose ; c'est un peu limité.

    Black dog, par Jacques Loustal & Jean-Claude Götting, Casterman, 2016.

  • Dickie dans l'Espace****

    Le Gantois Pieter De Poortere a vu son premier recueil de gags traduit par Glénat dès 2010 sous le titre "Le Fils d'Hitler", dix ans après ses débuts dans la presse flamande.webzine,bd,zébra,fanzine,bande-dessinée,gratuit,kritik,critique,gantois,pieter de poortere,dickie,hitler,espace,glénat,boerke

    "Traduit" est un grand mot, puisqu'il s'agit de gags muets d'une page. Bien qu'il ménage le "politiquement correct", De Poortere fait tout de même preuve d'impertinence ; il rogne les cornes dont Hitler est le plus souvent affublé, faisant ainsi figure de "grand Satan", pour en faire un personnage toujours aussi antipathique, mais beaucoup plus familier, un personnage plus trivial encore que le "Dictateur" de Chaplin.

    On comprend pourquoi Glénat n'a pas tardé à publier ensuite plusieurs autres recueils, dont le dernier en date : "Dickie dans l'Espace". En effet les bons auteurs comiques sont rares, concurrencés par l'humour gras ou potache plus "vendeur". De Poortere est très efficace. Il s'appuie sur un dessin minimaliste, mais néanmoins expressif, pour distiller son pessimisme. L'humour de Pieter De Poortere n'est pas facile à caractériser, car il reflète des influences diverses ; on pense à cette devise de S. Maughman : "Ne rien dire qui n'égratigne pas"; De Poortere cherche à provoquer chez le lecteur autre chose qu'un rire gras ou même seulement léger.

    Comme son titre l'indique, le dernier opus exploite le thème de la conquête spatiale, fil conducteur de toute une série de gags. Le choix de ce thème est particulièrement judicieux, plus original que celui d'Hitler, et peut-être plus audacieux car il résume parfaitement l'esprit conquérant moderne, la mystique du progrès frelatée qui le soutient.

    De Poortere ne se prive pas, bien sûr, de jouer avec les codes de littérature et du cinéma de science-fiction, genres ô combien propices aux fantasmes et, donc, à la dérision. Dickie ("Boerke" en flamand), c'est l'anti-Tintin, la ligne claire détournée.

    "Dickie dans l'Espace", par Pieter De Poortere, Glénat, 2016.

  • L'Homme qui tua Lucky-Luke

    Heureuse coïncidence, notre rédac chef publie une critique de "L'Homme qui tua Lucky Luke" le jour même oùwebzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,critique,kritik,lucky luke,matthieu bonhomme,dargaud,blueberry,jean giraud j’emprunte le livre à la bibliothèque.

    C’est énervant et décourageant de voir autant de talent dans chaque case de chaque page. Le dessin est vraiment éblouissant de maîtrise, l’œil se délecte tant du trait que du cadrage, du rendu du mouvement, de la couleur. J’ai retrouvé la virtuosité et la force évocatrice d’un Jean Giraud dans les meilleurs Blueberry.

    Mais la lecture m’a un peu ennuyé, j’ai trouvé le scénario faible et les personnages plats, et je partage l’avis de l’hebdomadaire La Vie pour qui « Un peu plus d’humour n’aurait cependant pas nui ». Cela dit, cet album est autrement plus digne de Morris que la reprise de la série par le successeur officiel qui, pour le coup, pourrait bien incarner l’homme qui, véritablement, tua Lucky Luke.

    L’Enigmatique LB (ci-contre : dessin original de Morris)

  • Je voudrais me suicider...***

    ...mais j'ai pas le temps

    « Papa noël, je voudrer silvouplé un arc et deux flaiche et un tintin et milou. Je vous dit le titre on awebzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,critique,kritik,charlie schlingo,florence cestac,jean teulé,jean-charles ninduab,gaspature marcher sur la lune. »

    C’est sur ces mots que commence l’album de Jean Teulé et Florence Cestac. Ils sont gravés sur la page de garde. Comme une prédestination ; ça n’existe pas la prédestination, d’abord... bon, à chacun de voir.

    De toute façon, Charlie aurait répondu ceci : « Que c’est navrant tous ces tracas, tous ces efforts, toutes ces années à supporter son sort, à se demander pourquoi ? Alors qu’il aurait suffit – aussi bête que cela puisse paraître – de ne pas faire naître. »

    Charlie, vilain menteur, ne voulait pas venir parmi nous et, quand il a été là, Dieu, le destin ou je ne sais qui, lui a collé la polio. Quant au reste, c’est Charlie qui l’a choisi.

    Jean Teulé écrit une partie de l’histoire de Charlie Schlingo, et c’est réussi. Il a rassemblé quelques morceaux du puzzle de la vie du dessinateur au trait incisif et puissant. Certains qui le connaissaient davantage pourraient dire que la vie de poète ne ressemble pas tout à fait à ça : moins de « lose », plus de gaieté... qui sait ? Peu importe, le puzzle de Teulé fonctionne.

    Le trait de florence Cestac est vif. Il est aussi rapide ; un peu trop pour cet album ?

    Il y a sûrement, à l’autre bout de l’univers une planète inconnue, tout à fait habitable et respirable, que personne n’a jamais observée. Il y a quelques centaines de personnes qui s’intéressaient aux albums de Charlie Schlingo de son vivant et qui savaient qu’il était là. De ce côté-là, les choses n'ont guère changé. Je suis heureux maintenant de faire partie de ces privilégiés.

    C’est sur ces mots que se termine l’album : « Je pense que j’ai été sage merci. Jean-charles ninduab »

    - Tu as été choisi, Charlie !

    - Y’a pas de quoi, gaspature !

    Florent T.

    "Je voudrais me suicider, mais j'ai pas le temps", par Jean Teulé & Florence Cestac, Dargaud, 2009.

  • La Légèreté*

    Ne vous fiez pas à son titre, "La Légèreté" de Catherine Meurisse est la BD la plus lourdingue de l'année.webzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,critique,kritik,catherine meurisse,légèreté,philippe lançon,libé,dargaud Lourdingue, c'est-à-dire conventionnelle.

    A la télé, une journaliste a déclaré à propos de "La Légèreté" cette chose extravagante : "S'il n'était pas obligatoire de dire du bien de "La Légèreté", j'en aurais quand même dit du bien, car cette BD est magnifique, etc." (je n'ai pas gardé le souvenir de tous les superlatifs utilisés).

    Ou bien cette journaliste est complètement idiote, ou bien elle est très maligne, au contraire. Elle suggère en effet que nous vivons dans un monde où il est obligatoire de dire du bien en public de certains bouquins, indépendamment de leur contenu !? Pourquoi ne pourrait-on pas dire du mal d'un bouquin qu'on a trouvé creux ? Quel sorte de décret tacite l'interdit ?

    En résumé, Catherine Meurisse a perdu ses confrères dessinateurs de "Charlie-Hebdo", abattus presque sous ses yeux par les frères Kouachi. Il y avait de quoi devenir dingue, d'autant plus que les journaux et la télé n'ont pas cessé d'en parler 24h/24. Comment reprendre son souffle après une telle épreuve ? Catherine Meurisse part faire une retraite à Rome, à la Villa Médicis (résidence luxueuse mise à la disposition des artistes français) ; elle peint des aquarelles (bof) ; elle lit Proust et d'autres auteurs moins bourgeois, conseillés peut-être par Philippe Lançon, critique littéraire à "Libé" et à "Charlie" ? P. Lançon a rédigé une préface très confraternelle et assez barbante à "La Légèreté". Du coup, petit à petit, Catherine Meurisse se sent mieux ; son confrère Luz publie une BD sur comment il a vécu les mois suivant l'attentat, et C. Meurisse décide de faire la même chose.

    La morale de l'histoire, c'est : - L'art m'a sauvée. Si Catherine Meurisse avait préféré cuisiner plutôt que lire "La Recherche", on aurait eu le droit à un livre de recettes. Que l'exercice de l'art puisse rendre la condition humaine moins pénible, c'est une certitude en même temps qu'un propos d'une grande banalité.

    Ce qui m'a le moins rasé, ce sont les passages concernant Catherine Meurisse, que je connaissais mal, en comparaison des "piliers" de "Charlie-Hebdo". On apprend par exemple que Catherine Meurisse a été recrutée par Philippe Val. Par souci de parité, je suppose, étant donné que "Charlie-Hebdo" était jusque-là aussi fermé à la gent féminine qu'une assemblée de franc-maçons ou d'évêques catholiques.

    A l'exception de quelques infos, glanées ici ou là, propres à satisfaire ma curiosité, j'ai dans l'ensemble été surpris et déçu par la BD de C. Meurisse ; surpris par son côté "sulpicien", mélange d'académisme et de bondieuseries, pas très éloigné de "Tintin & Milou". Venant d'une humoriste, je m'attendais à autre chose que l'apologie un peu plate de la rêverie artistique. De la part des rescapés de "Charlie-Hebdo", réagir comme ils l'ont fait à la fusillade, en publiant malgré tout le plus vite possible un nouveau numéro, c'était faire preuve d'un sang-froid plus conforme à l'esprit de "Charlie-Hebdo" (même s'ils n'ont pas pu échapper à la récupération politicienne que l'on sait, visant à faire des victimes de cette fusillade des martyrs de la cause et des valeurs occidentales).

    Quelques écrivains ou artistes ont tiré de drames l'inspiration pour écrire des chef-d'oeuvre marquants. Par exemple, le tremblement de terre meurtrier de Lisbonne en 1755 a assez bouleversé Voltaire pour lui inspirer un pamphlet humoristique contre la philosophie "zen" de Leibnitz ; mais il manque à "La Légèreté" l'ingrédient que les grands bouquins écrits pour tenter de sonder la violence de la nature ou de l'homme, à savoir le recul. Probablement y a-t-il une difficulté supplémentaire à se remettre en cause quand on vient de subir une violence quelconque, d'ordre physique ou psychologique, mais dans ce cas pourquoi Luz et C. Meurisse n'ont-ils par attendu avant de publier ce qui ressemble à des confessions intimes ?

    "La Légèreté", par Catherine Meurisse, Dargaud, 2016.

     

     

  • Une Mystérieuse Mélodie***

    M. Mouse est scénariste pour le cinéma et, à son grand désarroi, son patron lui demande d'écrire un grandwebzine,bd,gratuit,zébra,fanzine,bande-dessinée,kritik,critique,cosey,mickey,glénat,mystérieuse mélodie,william shakespeare,disney,oswald,lapin scénario à la manière de William Shakespeare. Il faudra qu'il y ait des larmes, de l'infamie, des trahisons, et, le pire de tout... de l'amour. Comment Mickey va-t-il s'y prendre, lui qui ne connaît rien de tout cela ?

    Et voilà qu'il tombe sur un manuscrit original du grand homme...

    Au cours de son parcours, qui commence en 1927 (Mickey est créé en 1928 pour remplacer Oswald le lapin chanceux, qui joue aussi un rôle dans l'aventure), Mickey se déplace, cherche et finit par rencontrer certains personnages-clefs qui vont peupler son univers et accompagner les lecteurs dans les films et les bandes-dessinées qui vont être créés ensuite.

    La bande-dessinée de Cosey (qui a repris le personnage de Mickey) commence d'ailleurs par une tragédie, ou par ce qui aurait pu l'être. Un petit chat est sauvé de la noyade, mais c'est une tragi-comédie cinématographique. Et ensuite c'est à une naissance à laquelle nous assistons, celle de l'univers Disney, qui va considérablement évoluer jusqu'à nos jours.

    Et puis le voyage... les voyages à pied, en train, en bateau (jusqu'à Cythère ?).

    Ensuite la quête, celle de Mickey, qui finit par trouver son chemin.

    L'histoire sera-t-elle "un roman à l'eau de rose"... ou "un conte moderne et novateur" ? Peu importe, elle se termine par un rêve. Et elle est servie par une narration efficace et des dialogues inventifs.

    Florent pour Zébra

    Disney - Une mystérieuse mélodie, par Cosey, eds Glénat, 2016.

  • Elisabeth Ire***

    Cette souveraine anglaise (1533-1603) joue un rôle comparable au rôle joué par Louis XIV dans l'histoire dewebzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,critique,élisabeth ire,glénat-fayard,regnault,delmas,meloni,duchein,angleterre,henri viii,tudor,shakespeare,tétralogie,margaret thatcher,angela merkel,londres France. En effet, avec Elisabeth Ire émerge un Etat de plus en plus puissant et unifié, dont les ramifications ne cessent de s'étendre... bref, un Etat moderne. L'Angleterre d'Elisabeth sera en mesure de rivaliser avec la France et l'Espagne ; elle mettra même un terme à l'ambition de l'Espagne de dominer le monde en piégeant sa flotte militaire dans le pas de Calais. Elisabeth parachève l'oeuvre de son père, Henri VIII, tout en mettant un point final à la dynastie des Tudor, qui s'éteint avec elle. Sur le plan militaire et économique, Elisabeth fut plus avisée que son homologue français (Louis XIV).

    En collaboration avec les éditions Fayard, Glénat propose ici une bande-dessinée didactique. Pour cela un historien (M. Duchein) a supervisé le récit, visant un juste milieu entre le roman national anglais, peu critique, et le point de vue catholique proche du pamphlet (la rupture des Tudor avec la religion romaine et l'anglophobie ont valu aux Tudor quelques pamphlets catholiques ou français).

    La gageure était double puisque les auteurs se devaient d'être équitables, mais aussi de résumer en une cinquantaine de pages une personnalité et un règne à la fois complexes et denses. Shakespeare, contemporain d'Elisabeth Ire, a d'ailleurs relevé ce défi (faire court et dense en même temps) avec ses tétralogies historiques qui tiennent le lecteur en haleine.

    Le règne d'Elisabeth soulève non seulement le problème épineux de la religion d'Etat, qui évoluera en religion DE l'Etat (le problème reste par conséquent d'actualité) ; mais aussi celui de la centralisation croissante du pouvoir politique, qui va s'accélérer encore par la suite avec le développement de l'économie capitaliste.

    Elisabeth était en outre dotée d'un tempérament hors du commun, que la BD n'omet pas de souligner. Cette reine a laissé le souvenir d'un grand courage physique et d'une abnégation exemplaire. A peine évoquées dans la BD, faute de place, les jeunes années d'Elisabeth ont sans doute contribué à forger un tel caractère. Songez un peu : le père d'Elisabeth a fait décapiter sa mère, inculpée d'adultère ; le sort de la future reine fut on ne plus précaire quand sa demi-soeur Marie la fit emprisonner pour conforter sa position sur le trône (menacée d'exécution, Elisabeth écrivit au commandant de la Tour de Londres pour réclamer l'épée au lieu de la hache, en cas de malheur). Certains sont anéantis par des vicissitudes qui permettent à d'autres, a contrario, de se forger un mental d'acier.

    L'Europe n'a donc pas attendu le XXe siècle, Margaret Thatcher ou Angela Merkel, pour confier à une femme l'exercice du pouvoir suprême. Contre l'avis de ses conseillers, Elisabeth eut l'intelligence de ne pas se marier, ce qui aurait pu l'affaiblir, ne serait-ce qu'en mettant en péril sa santé, et par conséquent son pouvoir et son indépendance. Elle sut dissiper la rumeur de son mariage secret avec Robert Dudley, codétenu à la Tour de Londres, et même la rumeur d'accouchements clandestins. L'union des souverains de sexe masculin n'était pas moins une chose ardue, compte tenu des enjeux diplomatiques et de succession.

    La BD est complétée par un dossier historique illustré de 7 pages, qui permet d'approfondir ce chapitre capital de l'histoire européenne ; la BD fait partie d'une collection comportant une dizaine de titres qui proposent un aperçu sur Louis XIV, Catherine de Médicis, Napoléon, Jaurès, entre autres. Il s'agit là d'un bon moyen pour susciter l'intérêt des adolescents et des grands adolescents pour l'histoire, alors qu'ils sont de plus en plus exposés aux sollicitations de la culture de masse et de la propagande politique.

    "Elisabeth Ire", par Meloni, Regnault, Delmas, Duchein, Eds Glénat-Fayard, juin 2016.