Lundi : les canons à eau sont désormais préférés par les forces de l'ordre aux bons gros canons virils d'autrefois, qui passent beaucoup moins bien à la télé. A la limite, on se croirait à "Intervilles" où des volontaires se font humilier par pur plaisir masochiste.
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La semaine de Zombi
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Editorial Cartoon
Zébra propose un choix des meilleurs dessins de la semaine (Editorial cartoons) tirés de la presse internationale ; pour le meilleur et le pire, le genre connaît un regain grâce à internet, qui permet aux non-professionnels de s'exprimer et aux professionnels de publier des dessins qui n'ont pas été retenus par leur rédaction, pour les meilleures ou les pires raisons.
Ce dessin de Michael Ramirez dans le "Washington Examiner" à propos des tensions entre les Etats-Unis et la Chine, provoquées par une énième affaire d'espionnage signale que la propriété intellectuelle est une cause de conflit ultra-moderne ("Nous soupçonnons que la Chine nous vole peut-être des informations").
Ce dessin de l'Italien Tomas (Cartoon Movement) illustrant la jouissance du pauvre, comparée à celle du riche, évoque une citation de Démocrite (460-370 av. J.-C.) : "Si tu désires peu de choses, ce peu te semblera beaucoup."
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Caricature Président chinois
La Semaine de Zombi. Vendredi : Je suppose qu'on enseigne à Sciences-po la différence entre diplomatie et tartufferie.
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Marco Polo***
Marco Polo est un peu le saint patron des commerçants & des aventuriers simultanément. C’est une figure sympathique du temps où le négoce et les voyages n’étaient pas encore associés à la conquête coloniale, bien que le célèbre voyageur et conteur vénitien soit un pionnier de la «mondialisation». La famille Polo était spécialisée dans le commerce lucratif des pierres précieuses.
Ainsi que les scénaristes de « Marco Polo – Le Garçon qui vit de ses rêves », nouvellement paru aux éditions Glénat, nous le rappellent dans une documentation complémentaire aux aventures de « Marco Polo », l’authenticité du récit du célèbre voyageur vénitien du XIIIe siècle (« Les Merveilles du Monde ») fut contesté de son vivant, et le reste encore par certains érudits aujourd’hui. Mais l’argument de Christian Clot pour dissiper les soupçons fondés sur les inexactitudes du récit m’a convaincu : « (…) le voyage de Marco Polo a duré près de vingt-quatre ans – dont trois de voyage aller, dix-sept en Chine et trois de voyages retours – sur plus de trente-cinq mille kilomètres (sans compter ceux réalisés durant ses années en Chine). Marco était un adolescent rêveur lorsqu’il est parti, un adulte accompli à son retour. Essayez de vous souvenir avec une exacte précision de tout ce que vous avez fait il y a vingt-cinq ans. Les lieux où vous avez été, les distances parcourues, l’ensemble des personnes rencontrées et des événements survenus sur les plans culturel, politique et autres… Faites-le, bien entendu, sans aucune aide, sans internet, amis ou archives pour vous rafraîchir la mémoire (…) »
Au demeurant, que ces aventures aient été vécues ou seulement rapportées par Marco Polo, leur récit mentionne des paysages, des peuples, des coutumes et des rois, inconnus de quiconque n’aurait traversé le gigantesque empire mongol de Gengis-Kahn et ses héritiers, jusqu’à la capitale de l’empire, alors en Chine, avant d’en revenir.
La BD est « librement adaptée » du «Devisement du Monde» et des «Merveilles du Monde» de Marco Polo, parti en 1271 faire du trafic en compagnie de son père et son oncle à l’âge de dix-sept ans. Elle ne s’en écarte que pour combler les lacunes sur la psychologie de Marco Polo (les rapports avec son père) et quelques détails de la sorte, qui mettent du liant dans le récit. Cette fidélité est heureuse et préférable aux scénarios hâtivement construits autour d’un événement historique, qui sert seulement de prétexte à des cavalcades ou des romances qui pourraient aussi bien se situer dans un temps fictif. Pour autant, le côté épique et le rythme n’ont pas été sacrifiés. Shakespeare est la preuve vivante, si je puis dire, qu’on peut faire ouvrage d’historien tout en méprisant les méthodes scolastiques méticuleuses.
Le scénario souligne les lignes étroits qui unissent le commerce, l’aventure et la religion ; le caractère local de la religion, comme de la musique (les deux mots sont synonymes en grec), explique d’ailleurs que Marco, grand voyageur, se soit forgé sa propre religion, des bribes de cultures exotiques s’additionnant à la culture chrétienne de sa région d’origine.
Le vif intérêt de Marco Polo pour les inventions techniques, et le rapport que celles-ci entretiennent avec la magie, en raison des pouvoirs extraordinaires que les inventions confèrent à leurs premiers inventeurs, est également illustré. Cela explique d’ailleurs que, en dépit de la logique rationaliste fréquemment mise en avant dans la technocratie moderne, le merveilleux ou la magie n’est jamais très loin. Le discours rationaliste lui-même est magique du point de vue de celui qui n’y a pas été initié. Ce type de rationalisme (il y en a plusieurs) n’est guère qu’une manière pour l’Occident d’affirmer son avance culturelle sur le reste du monde, ce à quoi Marco Polo ne songeait pas. L’Occident chrétien va alors chercher en Orient un allié contre le monde musulman.
Le dessinateur, Fabio Bono, compatriote de Marco Polo, est influencé par le dessin de manga japonais, ce qui est en l’occurrence une coïncidence plutôt heureuse.
NB : les scénaristes citent notamment en référence "Marco Polo, à la découverte de l’Asie", de Philippe Ménard (Glénat, 2009) et Marco Polo, d’Olivier Germain-Thomas (Folio, 2010), ainsi que les ouvrages de Marco Polo.
Marco Polo - Le Garçon qui vivait de ses rêves, par Christian Clot, Didier Convard, Eric Adam et Fabio Bono, éd. Glénat, oct. 2013.
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Revue de presse BD (55)
+ Dessin de jeunesse d'Antoine Bourdelle (1861-1929) représentant l'ange déchu (plume, pinceau et encre de Chine sur papier) (exposé parmi d'autres au musée Bourdelle jusqu'au 7 juillet).
+ En mal de reconnaissance (officielle), le milieu de la BD s'est ému que le vainqueur de la dernière Palme d'or du festival de Cannes n'ait pas rendu hommage à Julie Maroh, dont l'album ("Le Bleu est une couleur chaude") a inspiré le scénario du lauréat Abdellatif Kechiche.
Submergée par l'émotion quant à elle, Julie Maroh se contente de regretter qu'on ne retienne du film que les scènes de cul. Ce n'est pas le cas de l'organe officiel du Vatican qui parle sobrement d'"un esplorazione della passione femminile". Mais tout ça ne nous dit pas si DSK a apprécié le film...
+ En période de crise, l'or est une valeur refuge ; l'Allemagne va d'ailleurs rapatrier des centaines de tonnes d'or stockées en France depuis la Libération. Pour de plus petites bourses, la BD peut-elle remplir le même office ?
+ Le tampographe Sardon est l'auteur d'une note laconique sur son blog, sobrement intitulée "104", et qui m'interpelle.
+ Le site internet "De lignes en lignes" recueille les croquis effectués dans les rames de métro du monde entier. Le webmaster recommande d'inclure des éléments caractéristiques du métro. Si vous faites des croquis de zèbres dans le métro, n'hésitez pas à nous les envoyer.
+ Une nouvelle revue de BD, "Aaaaarg", fait appel au crowdfunding et vient d'inaugurer son site internet. Zébra se met lui aussi en quête d'un financement pour un magazine gratuit 100% BD (maquette disponible pour annonceurs/sponsors à zebralefanzine@gmail.com).
+ Le dessin de la semaine est un croquis effectué dans le métro parisien L3.
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La semaine de Zombi
Vendredi : Le coup du débiteur français qui fait la morale à son créancier chinois, personne n'y croit. D'ailleurs Confucius a dit : "Je n'ai jamais rencontré personne qui eût autant d'appétit pour la vertu que pour le sexe."
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L'Histoire de Sayo***
J’ai crains d’abord que le dessin tiré au cordeau de Yoshiko Watanabé, professeur de manga en Italie, ne m’empêche d’entrer dans ce petit roman historique en BD… Et puis non, je me suis laissé prendre quand même par l’atmosphère inquiétante de cette espèce de «thriller» historique, tiré d’un témoignage authentique par le scénariste Giovanni Masi.
Nous est narrée l’histoire d’une famille d’immigrants japonais en Chine, qui se retrouve dans une position délicate à la fin de la seconde guerre mondiale, quand l’envahisseur japonais est vaincu. Cette famille composée surtout de femmes et d’enfants en bas-âge se retrouve isolée dans une Mandchourie devenue hostile ; Sayo, l’héroïne du récit, est même sur le point d’accoucher. Le retour au pays de ces Japonais déchus (nikkeijin) s’avère aussi nécessaire que périlleux. A tous ces dangers s’ajoute l’incertitude quant au sort du mari de Sayo, engagé dans l’armée nippone et probablement prisonnier des Chinois.
Le mélange est réussi entre une intrigue dont le ressort est surtout psychologique (comment une jeune femme habituée à une vie paisible et aisée va-t-elle se sortir du pétrin dans lequel elle se retrouve subitement plongée), et l’éclairage d’un épisode méconnu de l’histoire, voire honteux, les récits des vainqueurs offrant peu de place à la compassion pour le sort de leurs anciens ennemis. Le dessin japonais de cet album contribue en définitive à accroître le dépaysement du lecteur français.
L’Histoire de Sayo, par Yoshiko Watanabé et Giovanni Masi, Dargaud , 2011, 19 euros.
(Critique parue dans Zébra 3)