par l'Enigmatique LB (à lire aussi dans "Siné-Mensuel")
zébra - Page 294
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Caricature Donald Trump
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Cachez cette identité...
...que je ne saurais voir.
Les éditoriaux des journaux sont comme les sermons des curés : ils ne méritent pas d'être imprimés et devraient rester du domaine de la culture orale. Philippe Val vient de passer outre cette réserve en publiant chez Grasset un très long édito, sur le thème de l'identité - l'identité de gauche, il va sans dire, pour faire pièce au discours identitaire de droite façon E. Zemmour ou un autre idéologue du même rayon.
Mais, que la tarte à la crème identitaire soit de gauche ou de droite, c'est la même mousse inconsistante; moins xénophobe en apparence, le discours identitaire de gauche conduit au même résultat : les migrants se noient dans la Méditerranée et la colère des populations colonisées par des cartels industriels enfle.
On se souvient peut-être que P. Val est passé du style léger du chansonnier à la mine grave de l'éditorialiste alors qu'il dirigeait "Charlie-Hebdo", publication satirique qu'il a maintenue à flot pendant dix ans ; aujourd'hui qu'il n'est plus directeur, ni patron de rien du tout, ainsi qu'il le souligne avec un brin d'amertume, P. Val a le temps d'allonger ses sermons.*
Cerise sur le gâteau du discours identitaire, de gauche comme de droite, notre éditorialiste en fait des tonnes à ce propos, l'idée que la culture occidentale contemporaine est "judéo-grecque" (P. Val n'ose pas dire "judéo-chrétienne", de peur d'être confondu avec E. Zemmour).
On est un peu éberlué par la persistance de ce gros bobard, déjà taillé en pièces plusieurs fois par des essayistes un peu moins improvisés que Ph. Val : non seulement Karl Marx, mais aussi Nietzsche, ou encore Léopardi, pour n'en citer que trois.
- Marx insiste sur le VEAU D'OR, devant lequel l'Occident moderne se prosterne AU CONTRAIRE des Juifs et de Moïse. S'il y a une religion incompatible avec le discours identitaire ou nationaliste, c'est bien le judaïsme.
Quand Philippe Val marie deux notions opposées et inconciliables -l'identité et l'universalisme juif-, Marx met utilement à jour que le capitalisme altère définitivement la culture identitaire traditionnelle ; autrement dit, le déracinement moderne est un enracinement dans l'argent, qui modèle la société autrement. Quelle culture nationaliste moderne n'est pas modelée par l'argent ? L'axe sur lequel la société globalisée tourne n'est-il pas l'argent ? La valeur mystique de celui-ci n'a fait que croître au détriment de sa valeur pratique d'agent d'échange.
- Passant par l'étude de l'art et de la littérature, Nietzsche et Léopardi aboutissent aussi à la conclusion que l'art et la littérature modernes ont pris une direction tout à fait originale (jugée funeste par Nietzsche).
"L'heure est grave", nous dit aussi Philippe Val, et cette déclaration suffit à trahir le mobile élitiste de cet auteur et de son essai, car chaque heure est sans doute plus grave pour quiconque ne bénéficie pas des privilèges réservés aux Occidentaux.
"Cachez cette identité que je ne saurais voir", éd. Grasset, 2017.
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Une belle jambe
Dessin par Waner (à lire aussi dans "Siné-Mensuel")
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Caricature Daniel Cohn-Bendit
La Semaine de Zombi. Vendredi : En 2017 il est interdit d'interdire de dire n'importe quoi, alors les politiciens s'en donnent à coeur joie.
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Caricature Marine Le Pen
par l'Enigmatique LB (à lire aussi dans "Siné-Mensuel")
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Braconnerie
dessin par Waner (à lire aussi dans "Siné-Mensuel")
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Revue de presse BD (226)
+ "50 Watts" se veut la ressource en ligne la plus riche du monde dans le domaine de l'illustration et des illustrateurs. Ce site répertorie en effet de très nombreux illustrateurs, comme par exemple, ci-dessus le tchèque Joseph Lada (1887-1957), "artiste national" tchèque, connu pour avoir illustré "Le Brave Soldat Chveïk" (Jaroslav Hasek), héros presque aussi populaire en Tchéquie que Tintin en Belgique.
+ En marge du "Trophée Presse-Citron" 2017 du meilleur dessinateur de presse, l'Equipe interdisciplinaire de recherche sur l'image satirique (Eiris) organise dans la bibliothèque Mitterrand un colloque consacré à "Hara-Kiri" (mercredi 15 mars, de 9h30 à 16h30). Au nombre des intervenants : Martine Mauvieux (Bnf), Virginie Vernay (ex-collaboratrice de Cavanna), MRic (caricaturiste), Alexandre Devaux (spécialiste de Topor).
François Cavanna et Georget Bernier (alias Pr Choron) étaient tous deux issus de milieux très modestes, ce qui explique en grande partie la singularité de "Hara-Kiri", puis "Charlie-Hebdo", ainsi que son audace subversive (les pauvres n'ont pas grand-chose à perdre).
Après sa faillite en 1982, "Charlie-Hebdo" sera refondé en 1992 dans un esprit assez différent ; il suffit de lire le dernier essai de Philippe Val, son ancien directeur ("Cachez cette identité..."), pour le comprendre.
(Ci-contre caricature de Choron et Cavanna par le dessinateur Schvartz.)
+ Lu dans le dernier "Siné-Mensuel" (mars) : "Le mouvement anarcho-punk, bien sûr, a souvent été récupéré par les cafards techno-industriels." Noël Godin alias l'Entarteur [des stars du néant].
+ L'équipe de campagne de Jean-Luc Mélenchon, candidat de la "France insoumise", a eu l'idée de proposer un programme politique sous la forme d'une bande-dessinée. L'optimisme du propos et des dessins (signés Mélaka et Olivier Tonneau) nous emmène loin du dessin de presse satirique. Quelques remarques sur cette BD :
- F. Hollande est moqué dans ce programme pour avoir déclaré : "Mon ennemi, c'est la finance !" Mais J.-L. Mélenchon ne fait-il pas la même déclaration, tout aussi tonitruante ?
- On remarque que le communisme, faute sans doute de prolétaires, est enterré par le programme de J.-L. Mélenchon au profit d'un écologisme plus à la mode ; il faut dire que les militants de la "France insoumise" n'ont guère les moyens d'un coup de force révolutionnaire, plus probable en Chine ou en Inde, où le mot "prolétariat" a encore un sens.
- Très peu marxiste l'argument avancé dans ce programme selon lequel l'Etat pourrait offrir une protection contre les dérives du capitalisme ; d'abord parce qu'il n'y a pas de "bon capitalisme" selon K. Marx, ensuite parce que Marx fait la démonstration que l'Etat moderne et les banques capitalistes sont solidaires.
On peut lire Marx comme un auteur satirique, tant la culture contemporaine repose sur l'idéologie et la fiction.
+ En préambule de l'interview de Riad Sattouf à "ParisWorldwide" (mars-avril 2017), ce magazine bilingue (franco-anglais) gratuit distribué dans les aéroports d'Orly et Roissy rappelle que R. Sattouf a vendu un million de ses deux premiers "L'Arabe du Futur" et qu'il est traduit en 18 langues. R. Sattouf a accompli l'ambition sociale de son père, en grande partie aux dépens de ce dernier.
"ParisWorldwide" souligne le paradoxe que "L'Arabe du Futur" n'est pas traduit en arabe :
- Parce que le marché du livre, dans la langue arabe, est encore peu développé. (...) On a reçu des propositions, mais les éditeurs intéressés ne voulaient s'engager que sur le premier volume et ne publier la suite que si ça marchait. Mais de mon point de vue, il était hors de question que les gens de ma famille, qui parlent arabe et qui seraient susceptibles de le lire, ne puissent avoir accès qu'au premier volet. (...) Je proposerai la traduction des cinq volumes d'un coup, quand ce sera terminé.
+ Grâce aux efforts d'une sorte de syndicat des auteurs de BD, la précarité d'une partie des auteurs de BD a été portée à la connaissance du grand public par le biais de quelques articles parus dans la presse nationale. Sur mille auteurs de BD environ, un tiers vit au-dessous du seuil de pauvreté, et un tiers seulement perçoit des revenus confortables.
Le succès rencontré par la souscription de la blogueuse-BD Laurel est donc d'autant plus remarquable. En quelques minutes seulement, cette dessinatrice a récolté les 10.000 euros réclamés sur la plateforme de financement participatif "Ulule" pour financer la publication de son album.
Même si elle n'en est pas à son coup d'essai -Laurel avait récolté 300.000 euros pour financer son premier album de la même façon-, la dessinatrice s'est dite estomaquée. Sa BD raconte l'histoire vraie d'un couple exilé en Californie, parti se frotter au rêve américain. Cela prouve que l'on n'est jamais si bien promu que par soi-même.