Dessin de Gassier (1939), dessinateur au "Canard enchaîné" et précurseur du style de Sennep, Effel, Cabu...
+ Le documentaire filmé de Bernard Baissat, "Aux 4 Coins du Canard" (1987, 3 parties) retrace l'histoire du "Canard Enchaîné" depuis sa fondation par Maurice Maréchal en 1915. Si ce n'est exhaustif, ce docu montre les principaux collaborateurs et directeurs successifs d'une publication qui passe paradoxalement aujourd'hui pour une vénérable institution. Les principaux dessinateurs et des exemples de leurs dessins sont aussi présentés.
L'anticonformisme du "Canard", son esprit contestataire, trouve son origine dans la guerre de 14-18, décidée et planifiée par les élites politiques, mais contre laquelle se rebiffèrent quelques anciens combattants, le plus souvent issus de milieux populaires. "Le Crapouillot" de Galtier-Boissière, ou encore le "Voyage" de L.-F. Céline sont animés par des mobiles similaires.
Autres aspects populaires : une conception artisanale et l'absence de publicité. Un collaborateur, Pierre Scize, fut même viré par M. Maréchal en 1933 pour avoir accepté la Légion d'Honneur, ce qui prouve que le "Canard" ne transigeait pas avec sa propre éthique.
Après la Seconde guerre mondiale, le "Canard" renaît, mais il va s'éloigner peu à peu de son caractère populaire original. Nouveau paradoxe, on constate que plus la démocratie progresse, plus le peuple est privé de moyens d'expression propres.
Cabu (2e partie) a tort de vanter le professionnalisme du "Canard enchaîné", car professionnalisme rime avec académisme, voire autocensure. La politisation du "Canard" rend en outre celui-ci de plus en plus insipide et de moins en moins truculent.
Le "Charlie-Hebdo" de Choron et Cavanna occupera le créneau de la presse populaire laissé vacant par le "Canard".
+ Le site "Gallica", qui fête ses 20 ans, permet la consultation de nombreux titres de presse datant d'avant la censure publicitaire - indirecte mais néanmoins très efficace.
Lire les "Lettres Françaises" de 1944 est assez instructif sur cette période cruciale dans l'histoire de la presse française et de la censure. Cet hebdomadaire d'obédience communiste, qui sera dirigé par Aragon ultérieurement, est bizarrement plus américanophile et anglophile qu'il n'est russophile -comme quoi BHL n'est pas seul responsable du changement de cap américanophile de l'intelligentsia française (plus disciplinée que la soviétique).
En 1944 les "Lettres Françaises" publient un poème d'Eluard en face d'une caricature de Sennep (ci-contre) (anticommuniste mais gaulliste) ; l'heure est à "balance ton collabo" et de nombreuses caricatures de J. Effel, Sennep, Monier, Ferjac, visent les écrivains soupçonnés de sympathie avec l'occupant allemand (Abel Hermant, Sacha Guitry, C. Maurras...) ; comme la télé ne livre pas encore son stock de divertissements à domicile, le journal publie sous forme de feuilletons des romans illustrés (de Queneau, Claude Aveline, E. Triolet, Steinbeck, Hemingway...).
Les encarts de publicité pour les grandes enseignes parisiennes n'ont pas encore la taille des placards d'aujourd'hui ; la rubrique "mode féminine" est intitulée "Souvent femme varie..."
+ L'asso. "Dessinez, créez, liberté" ("Charlie-Hebdo") en partenariat avec "L'Etudiant", propose un concours (ouvert aux 15-25 ans) sur le thème de "le rire ou la peur". A la clef, 500 euros de fournitures et bouquins divers à gagner.
+ Les plus grands dessinateurs de "Siné-Mensuel": Jiho, Desclozeaux et Fernand, exposent ensemble à Lunel, non loin de Montpellier, jusqu'au 10 avril. Une grande affiche !