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michel lafon

  • Revue de presse BD 2023 (101)

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    - Au programme cette quinzaine (3-16 déc.) :  1. Cabu et le sport ; 2. La SF de Métal Hurlant est-elle ringarde ? 3. Le magazine britannique Private Eye ose défier la censure de l'OTAN ; 4. Caricatures fraîches par Kurt, Goubelle, Philippe Tastet & Zombi.

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    Vive le Sport ! (par Cabu, éd. Michel Lafon)

  • Cabu vs Daumier

    En guise de revue de presse cette semaine, le script d'un débat au sein de la rédaction de "Zébra" : Heldar estime que Cabu vaut bien Daumier, tandis que Zombi, lui, argumente en faveur de la supériorité de Daumier sur son "héritier".

    HELDAR : Vraiment pas mal le dernier Cabu ("Le Rire de Cabu", ed. Michel Lafon) ; Cabu est bien "notre" Daumier. Bien sûr la comparaison est boiteuse parce qu'esthétiquement Daumier est un cran au-dessus, mais pour la variété de sa caricature politique et le comique de ses légendes, Cabu est très supérieur (pas difficile, d'ailleurs !)

    ZOMBI : La variété ? Non, Daumier dépasse nettement Cabu ; d'abord Daumier est contemporain de l'âge d'or de la presse, de Paris "capitale des beaux-arts" ; Cabu, lui, est contemporain d'un monde américanisé, où le dessin et la satire n'ont plus leur place. Cabu n'a pas son Baudelaire, il est isolé, presque incompris - la preuve : les gogos "Tous Charlie" qui pleurent Cabu comme un martyr et déposent des "ex-voto" Place de la République !

    Et puis Cabu a beaucoup trop dessiné le personnel politique ; or la politique ne passionne en 2020 que les intellos. A cause de la télé, de la presse quotidienne, de l'école, le quidam est forcé de s'intéresser à la politique, mais en réalité il n'y a rien de plus ennuyeux que la politique contemporaine, sauf la musique électronique. Cabu rend un peu moins assommant le jeu de ping-pong politicien (exactement comme Trump).

    HELDAR : Tu es sévère pour Cabu... Sed contra... La politique sous Louis-Philippe (1830-1848) était encore plus ennuyeuse qu'aujourd'hui !

    ZOMBI : Oui, et Daumier en a bien résumé l'ennui. J'ai vu ses têtes de parlementaires récemment dans la vitrine d'un antiquaire - des copies ; ils sont tous déjà là : Mitterrand, Sarkozy, Hollande, Le Pen, Mélenchon... On crève déjà d'ennui. Le meilleur de Cabu, c'est du Daumier. Le meilleur de Cabu, c'est la caricature de Paris, sa ville chérie, vendue aux industriels du BTP par ce maquereau féministe de Jacques Chirac.

    HELDAR : Cabu, comme Bretécher d'ailleurs, est quand même moins nul que la sociologie des snobs bobos...

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    Propriétaire parisien saluant son locataire, par H. Daumier.

  • Mai 68***

    Il y a quelques mois de cela, je tombe sur le billet d'un blogueur dont le titre m'interpelle ; un titre en formewebzine,bd,gratuit,zébra,fanzine,bande-dessinée,critique,kritik,mai 68,daniel cohn-bendit,cavanna,cabu,michel lafon,charlie-hebdo de slogan : "Pour un Mai 68 de droite !". Mon étonnement ne dure pas ; en effet cet éditorialiste amateur n'a guère de mal à démontrer que le pouvoir étant désormais "de gauche", la contestation du pouvoir et de l'autorité peuvent se réclamer de la "droite". Raisonnement que l'on trouvera un peu "binaire", sans doute, mais le clivage "droite-gauche" est précisément mécanique.

    N'était-ce pas simpliste de se dire "gauchiste", en "Mai 68", pour s'opposer à un pouvoir gaulliste "droitier" ? Comme le pouvoir est binaire, la contestation du pouvoir se devrait d'éviter de l'être.

    En outre je comprends ce que veut dire "réactionnaire", car plusieurs philosophes ou essayistes ont tracé clairement les contours de la réaction à la culture moderne, dont F. Nietzsche le plus radical d'entre eux, mais je ne comprends pas ce que veut dire "la droite", en quoi de Gaulle était "de droite", lui, un type aussi moderne ?

    Dans "Mai 68", collection d'affiches, de slogans, de caricatures contestataires publiés au cours et autour de Mai 68 (chez Michel Lafon), Daniel Cohn-Bendit définit sa révolution avortée de la façon la plus neutre comme "l'explosion de l'envie de vivre radicalement autrement". Histoire d'être un peu mutin, j'ai envie d'ajouter ici que cette définition est si neutre qu'elle pourrait s'appliquer aujourd'hui à un jeune djihadiste qui prendrait le djihad pour une aventure... C'est bien ce qu'est la guerre : une aventure sexuelle impliquant les deux sexes (contrairement à un stéréotype répandu qui fait porter la responsabilité du poids de la violence sur les seuls hommes). Quand le marteau frappe l'enclume, le manche y est aussi pour quelque chose.

    François Cavanna, pour sa part, est plus critique que D. Cohn-Bendit ; en effet le fondateur de "Hara-Kiri" écrit : "Ivresse des slogans. Se saouler de mots. De formules bien troussées qui dispensent de penser. Besoin d'idoles. Le Che en portraits géants. Mao. Castro ; ça tournait mal. (...) Quand j'ai vu rappliquer les médecines "parallèles", le petit livre rouge, le bouddhisme zen, le vaudou, quand j'ai vu cette écume de merde, au nom de la liberté, submerger l'essentiel, j'ai senti qu'on se faisait avoir."

    Si Cavanna était conscient du détournement de Mai 68 à des fins politiques et publicitaires, il faisait néanmoins le rapprochement entre Mai 68 et "Hara-Kiri", son journal, assez indéfinissable politiquement lui aussi, peut-être la dernière tentative en France d'imprimer quelque chose qui ne soit pas de la propagande politique ? En ce sens, "Hara-Kiri" faisait plus penser à la presse d'avant-guerre, plus populaire et réservée à l'égard du pouvoir politique, et faisant preuve d'un anticléricalisme englobant l'institution républicaine.

    On trouve la même observation de la part de Cabu d'un "Hara-Kiri" annonciateur de l'esprit de "Mai 68", puis seul dépositaire véritable du combat contre la "société de consommation" : "C'était comme si Hara-Kiri était soudain descendu dans la rue, écrivait Cabu. D'accord : tout ça peut paraître un peu prétentieux ! Disons que soudain, de plus en plus de gens se montraient sensibles à nos idées. Beaucoup plus qu'aujourd'hui."

    La thèse soutenue par des essayistes comme E. Zemmour ou A. Glucksmann de l'influence réelle du mouvement de Mai 68 sur la société française, est ici, au passage, contestée. 

    D'inspiration communiste, on ne trouve pas dans ces témoignages croisés, ni d'invocation de la laïcité ou des valeurs républicaines, bien sûr, puisque le mouvement de "Mai 68" était parfaitement illégal. On note cependant que Marianne apparaît ici ou là, une Marianne toujours vierge en dépit des centaines d'hectolitres de sang, non seulement d'aristocrates, mais aussi de prolétaires, d'Allemands, de Juifs, d'Africains, répandus par les armées de la République - Marianne plus SS qu'un CRS, mais immaculée conception laïque.

    C'était Siné, d'entre tous ces témoins et acteurs plus ou moins conscients, le plus politisé en "Mai 68", ayant foi dans le renversement de la bourgeoisie par la révolution. Plusieurs fois il a témoigné de cette naïveté, tout en exprimant le regret qu'elle l'ait entraîné à célébrer trop vite la dictature castriste.

    Que l'on ait pu prendre - "au nom de "Charlie" et de la loi" -, des mesures policières répressives, en particulier dans les collèges où ces mesures sont parfaitement injustes et inutiles, ce retournement ubuesque en dit long sur ce qui a subsisté de "Mai 68" au plan politique et social : probablement moins encore que le reliquat, somme toute modeste, que Cabu et Wolinski mentionnent.

    On ne peut s'empêcher de voir un signe du destin dans l'assassinat d'ex-rebelles de Mai 68, assez largement désabusés, par des djihadistes, c'est-à-dire des révolutionnaires d'un genre nouveau, dont les élites redoutent qu'ils fascinent et réveillent la jeunesse endormie, à coup de drogues plus ou moins légales.

    "Mai 68", Michel Lafon, 2008. 

     Quelques exemples d'images, dont il suffirait de changer un petit détail pour qu'elles collent parfaitement à l'actualité.

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    Dessin de Siné, où on pourrait remplacer la croix lorraine.

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    Dessin de Reiser, le plus désabusé de tous.

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    Affiche d'inspiration marxiste, adjoignant aux forces de l'ordre bourgeois le savoir bourgeois.

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    Les chars et les ouvriers ont été "délocalisés" en Chine ou en Inde, et sont désormais commandés à distance par les élites occidentales.