Un petit jeu sur Franquin pour les fans du maître bruxellois, sur Babelio.com...
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Un petit jeu sur Franquin pour les fans du maître bruxellois, sur Babelio.com...
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On s'étonne parfois à l'étranger du tempérament "râleur" des Français. Non seulement la vie est atroce, mais il faudrait faire bonne figure, être content de subir la dictature de la vie, la pire de toutes, puisque toutes les autres en dépendent !?
Si appliqué aux choses vaines (travail, famille, patrie), l'étranger ne se rend pas compte que cette absence de décalage le prive de l'humour, et qu'il se laisse ainsi complètement instrumentaliser par la vie. Adolescent, j'ai passé quelques semaines dans le Nord de l'Allemagne: c'est dingue comme ils prennent la vie au sérieux dans ces contrées ! C'était la première fois que je voyais des cours de ferme propres.
L'introduction de l'humour dans les milieux ouvriers, principalement déportés en Asie aujourd'hui, pourrait avoir pour effet de les dissuader de s'adonner à cette tâche pour laquelle l'homme n'est pas fait, comme dit Aristote : le travail (ce qui lui vaut les railleries du Prussien esclavagiste Voltaire).
C'est ce que j'ai pensé en feuilletant le dernier album de Marc Large: comme l'esclavage est largement délocalisé aujourd'hui, la principale tâche des pays riches étant d'absorber les fruits de la croissance, il faudrait larguer des caisses de cette BD au-dessus des pays où l'esclavage sévit. Ils verraient que la crise n'empêche pas les Français de se marrer. Bien sûr, on est tous conscients que nous devons des tonnes de milliards aux dirigeants des dictatures où la sueur et le sang sont meilleur marché. Peut-être seront-ils ainsi renversés bientôt, à cause du défaut de paiement de nations mieux armées qu'eux ? Leurs têtes coupées, voire pire encore. Mais bon, c'est la vie, et ce n'est pas en lui léchant le cul, ni en faisant les trois 8 qu'on trouvera une solution.
Le paradoxe de cet album est de mélanger des dessins humoristiques qui prennent le parti de rire de la crise économique, qui n'est jamais que le symptôme du vieillissement d'un système, avec des bafouilles de Christophe Alévêque, qui manquent de sérieux. L'humour est un truc sérieux. Voyez les universités : elles sont remplies ou presque de statisticiens, c'est-à-dire de prévisionnistes, qui ont été les premiers surpris par l'aggravation subite de la crise. Donc pleine de gens pas très sérieux. Tout en étant parfaitement sinistres, comme il vous suffit de vérifier en ouvrant la télé sur la première émission consacrée par de doctes experts à la question économique.
M. Alévêque prétend que les patrons se servent de l'argument de la crise pour baisser les salaires et rogner les primes. Evidemment, je comprends que le type qui a pris un crédit sur trente ans pour s'acheter un pavillon puisse être emmerdé. Mais, s'il avait eu des instituteurs un peu plus responsables, ils lui auraient enseigné à se méfier des banquiers comme de la peste. C'est donc plutôt un problème d'éducation. La réalité des catastrophes engendrées par la mécanique économique au cours des derniers siècles est bien différente de ce que décrit M. Alévêque. Elle vient bien de la foi inébranlable dans la croissance économique et l'éternel retour du profit.
"J'aime pas la crise", M. Large et C. Alévêque, éd. Hoëbeke, 2013.
(Zombi - leloublan@gmx.fr)
Extrait du carnet de croquis de Louise Asherson :
Un nouveau strip de Lola (sans Lola) dans Zébra - chaque semaine un nouveau strip, par Aurélie Dekeyser :
Samedi : Les guerilleros ont en Amérique du Sud le statut des saints du calendrier...
Dessin tiré du carnet de croquis de Louise Asherson :
Si la bande-dessinée était un "art séquentiel", pour reprendre cette métaphore mécanique, alors Fred serait le grain de sable dans cette machine; en effet, la "lokoapattes", véhicule bizarroïde inventé par Fred pour simuler le moteur de son imagination (cf. couverture ci-contre), ne tourne pas rond.
Comme toutes les machines à moitié calées en rase campagne, elle pète et elle pue. Tenez, là, Fred envoie un vent: « Dans le monde des lettres et ailleurs, tout le monde fait semblant de se connaître… mais personne ne se connaît… C’est chacun pour soi… »
En définitive, le prolo n’était pas trop à plaindre, sur sa machine-outil: les choses se déroulaient de façon parfaitement séquentielle jusqu’au +décès+, que la concentration sur l’écrou à serrer lui permettait d’oublier, jusqu’au moment fatidique. Le fils de prolo au chomedu, lui, est bien plus dans la merde, à cause de la mélancolie (+/-) qui lui tombe au coin de la gueule; au lieu de marcher droit, il va en zig-zag et se cogne dans les arbres. Le cinéma essaie bien un peu de compenser ça, avec son cliquetis régulier et monotone, mais ça ne marche qu’à moitié.
Fred va bientôt mourir, alors il aimerait bien n’avoir pas dessiné tous ces albums de BD pour des prunes. La mort nous pousse à vivre: on n’ose pas la défier. La société nous en dissuade: toute sa valeur religieuse tient à ça. C'est ce qui fait le succès international du socialisme, son triomphe sur la formule catholique précédente; les papes vendaient du rêve "bio", en quelque sorte, inaccessible à toutes les bourses; le socialisme est un grand supermarché, qui fourgue des rêves de moins bonne qualité, mais en quantité industrielle, à l'échelle mondiale. En matière de rêve, Fred était trop exigeant, c'est pour ça qu'il a calé.
Fred est dégoûté. Pourtant, Philémon a l’air si jeune… Il en prendrait bien encore pour dix ou quinze épisodes.
*
Certains artistes s'évertuent pour durer au-delà de la mort. C'est un vieux débat entre Diderot et le sculpteur Falconet. Diderot dit: -L'artiste vise avant tout la gloire; Falconet répond: -Non, moi je m'en fous de la gloire, l'art me suffit. Et comme Diderot était un vieil hypocrite, sympa mais faux-cul, voyant que les arguments de Falconet sont plus solides que les siens, plus "matérialistes", Diderot s'abstient de publier ce débat, comme il en avait primitivement l'intention. Falconet a raison: non seulement la gloire est un piège, mais l'artiste est dans la meilleure position qui soit pour le comprendre.
Fred, lui, n'est pas assez naïf pour croire dans la gloire; en même temps que son imagination, dont le moteur est sans doute trop mécanique, se heurte à la dure réalité de la mort, sans parvenir à l'écarter.
Les BD de Fred vont à l'encontre de la scolastique, qui veut que le scénario, la fiction l'emporte sur le dessin en bande-dessinée. Chez Fred, c'est l'inverse, le dessin l'emporte. Sans le dessin de Fred, on resterait au niveau de la philosophie à la mords-moi-le-noeud de Moebius+Jodorowsky (qui, soit dit en passant, à passé sa vie à ne pas apprendre à dessiner).
Les BD de Fred sont d'abord et surtout des invitations à dessiner; ça vaut mieux que tout l'art numérique, qui est une invitation à se soumettre à des codes.
(Zombi, déjà mort mais pas tout-à-fait - leloublan@gmx.fr)