par l'Enigmatique LB
FANZINE ZEBRA BANDE-DESSINEE ET CARICATURE
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Caricature Capitalisme
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Revue de presse BD (246)
+ Accusé par certains de nuire au métier de caricaturiste, l'Internet permet quoi qu'il en soit de découvrir certains dessinateurs talentueux, amateurs ou professionnels, lorsque ces derniers publient dans des titres dont la diffusion est restreinte - ainsi du dessinateur Michel Cambon ("Lettre du Cadre") ou de Delestre ("Est républicain" - ci-dessus).
+ "Arrêtez de manipuler l'Histoire !" titre cette semaine l'hebdomadaire "Marianne" en "Une", accusant la classe politique d'instrumentaliser cette science. C'est un comble de la part d'un magazine placé sous le patronage de "Marianne", emblème d'un culte républicain largement négationniste. La République s'enorgueillit ainsi d'être le résultat d'un processus révolutionnaire émancipateur, alors qu'elle est tout autant, si ce n'est davantage, le terme d'un processus répressif et coercitif.
L'instrumentalisation de l'Histoire commence à l'école, où la "mémoire" est substituée à l'Histoire, afin de conférer une signification morale (donc religieuse) à l'Histoire. Il est un exemple récent assez probant, c'est la fabrication de la statue du commandeur de Gaulle, en quelques décennies à peine ; le consensus politique sur ce sujet, qui va pratiquement de l'extrême-gauche à l'extrême-droite, s'oppose à l'exigence d'un bilan critique.
Ce n'est pas tant à la classe politique que l'on peut reprocher d'instrumentaliser l'Histoire, d'ailleurs. En cela elle ne fait que se comporter comme les générations de politiciens qui l'ont précédée depuis que la France est "laïque", et même avant. Plus inquiétante et plus récente l'instrumentalisation par la presse et les élites intellectuelles. Celle-ci constitue un des symptômes du totalitarisme, repéré à la fois par H. Arendt et G. Orwell ; chacun à sa manière a signalé la confusion du registre scientifique et du registre politique dans la culture totalitaire, alors même que la politique et la science ne répondent pas au même besoin ou attente.
+ Les "comics" échappent rarement au domaine de la culture de masse, cet opium du peuple américain. Elsa Charretier, jeune Française dessinatrice de "comics" invitée à la récente "Comic Con" parle de la dimension "stakhanoviste" de son métier :
- Le comics US est synonyme de publication hyper-rapide, parfois infernale. Faire vingt-deux pages par mois, c’est difficile. L’endurance, c’est la clé, pour savoir durer dans le métier.
Caractéristique des ouvrages de pur divertissement, le labeur intense qu'ils réclament. Le divertissement et l'idée moderne du travail ne s'opposent pas, ils sont complémentaires. La religion aurait le grave inconvénient, aux yeux de certains, d'exciter le sentiment de culpabilité: en réalité celui-ci persiste de façon non moins contraignante dans les sociétés sécularisées autour de la notion de travail. Le chômeur est le pécheur des temps modernes.
+ Jacques Ferrandez, après avoir adapté "L'Etranger" de Camus en BD, s'est lancée dans une entreprise plus risquée : la transposition du "Premier Homme", roman inachevé du même Albert Camus, sous la houlette de la fille de Camus, avec qui Ferrandez partage ses origines "Pied-Noir". Ferrandez a été interrogé sur les conditions d'une telle reprise par Mathieu Van Overstraeten.
Autoportrait de Derain.
+ On peut encore, à condition de se dépêcher, regarder le reportage que la télévision (France 5) consacre à l'amitié entre le peintre Derain et son cadet le sculpteur Giacometti, deux artistes en proie au doute que leur individualisme entraîna à l'écart de "l'avant-garde", expression de la foi dans l'Avenir.
Les "cas" de Derain, "fauviste malgré lui" et Giacometti, permettent aussi de comprendre que l'opposition entre l'art abstrait et l'art figuratif n'est qu'une question de degré ou de tendance.
Ce reportage fait écho à une expo Derain, Balthus & Giacometti au Musée d'Art moderne de Paris (-29 oct.).
+ La bédéaste-linograveuse anticonformiste & cabalistique Tanx expose son travail à Lyon, dans le quartier de la Guillotière (vernissage ce jour). Tanx tranche avec le style feutré des auteurs de BD, explosant en coups de gueule réguliers contre tout ce qui porte des couilles (au sens propre) ou au contraire n'en porte pas (au sens figuré).
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Caligramme
par Marie-France Ochsenbein
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Caricature Prix Nobel de Physique
La Semaine de Zombi. Mercredi : Si ça se trouve le prix Nobel de Physique est aussi bidon que le prix Nobel de littérature ou le prix Nobel de la Paix ?
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Caricature Terrorisme
La Semaine de Suzette Zombi. Lundi.
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Foie d'électeur
par l'Enigmatique LB
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Loving Vincent***
Ce dessin-animé à partir des toiles de Van Gogh, racontant la fin dramatique de l'artiste, est le projet d'un couple anglo-polonais (Hugh Welchman & Dorota Kobiela), assistés par des centaines de peintre recrutés par petites annonces.
Prouesse technique, sans doute, que d'assembler des milliers d'images peintes sur toile pour former un film, néanmoins l'art de Van Gogh est tout sauf une prouesse technique ; Van Gogh signe des toiles qui émeuvent par leur simplicité. Shakespeare fait cette remarque que la rose, poussée et épanouie au centre du jardin, une fois fanée ne soutient même pas la comparaison avec l'herbe folle du bord des routes ; Van Gogh est cette mauvaise herbe qui éclipse un art devenu académique - pure perspective de voyeur.
Ce n'est d'ailleurs pas une performance d'animer les toiles de Van Gogh, car comme le confesse H. Welchman, "la peinture de Van Gogh remue".
Pour le moins discutable sur le plan esthétique -parfois la lourdeur technique inhérente au cinéma se fait sentir-, "Loving Vincent" permet de s'approcher sans voyeurisme excessif du "suicidé de la société", tel que A. Artaud résume Van Gogh justement, contre la tentative de faire entrer le peintre dans un tableau clinique.
Sautant de tableau en tableau, on suit les pérégrinations d'un jeune modèle de Van Gogh rencontré en Arles, que son père charge d'acheminer une lettre de Vincent à Théo, peu après la mort du peintre des suites d'une blessure par balle. Cela commence minable, comme une enquête de police ; qui plus est, les circonstances de la mort du peintre, présumé suicidé, sont troubles, et les histoires crapuleuses la société aime ça, pour ne pas dire qu'elle l'adore.
On comprend mieux grâce à cet enchaînement de petites mailles biographiques que l'art de Van Gogh forme un tout, dont on ne peut isoler telle ou telle toile. Vincent est pratiquement indissociable de son frère. Sa peinture est aussi étroitement liée à une quête d'infini, dévoilée par l'abondante correspondance ; Van Gogh est plus "chercheur" qu'artiste. Elle est aussi indissociable de l'insensé pari d'un pur autodidacte, venu à la peinture à l'âge de... 28 ans, et dont le temps est compté.
Difficile de ne pas croire au destin, après la cruelle ironie de la "gloire posthume" infligée à Van Gogh, ce faisceau de lumière sale, qui contraste de façon saisissante avec la quête de pureté de Vincent.
On pense ici à la fable conçue par Villiers de l'Isle-Adam, du cygne étranglé par un bourgeois à la nuit tombée, afin d'en recueillir le dernier chant mélodieux.
La Passion Van Gogh ("Loving Vincent"), par Dorota Kobiela & Hugh Welchman (Good Deed Entertainment) 2017 (à partir du 18 oct. en salles).