La Semaine de Suzette Zombi. Dimanche.
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Caricature Président Macron
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Ni Dieu ni Eux*
Mauvais titre (abscons) donné à une anthologie des dessins anticléricaux de Tignous, récemment publiée par les éds du Chêne (2017).
Pour mériter l'adjectif "satirique", il convient de faire preuve d'esprit critique ; or, rares sont les dessins subtils dans ce recueil ; la compilation de caricatures donne l'impression que Tignous était un anticlérical obsédé, tirant à boulets rouges sur tout ce qui porte mitre, voile ou calotte, comme s'il avait un compte personnel à régler avec la religion... et surtout comme si nous étions encore au XVIIIe siècle, quand le clergé catholique exerçait quasiment sans partage l'autorité morale, ce qui n'est plus le cas depuis belle lurette.
Le bouquin se situe plutôt au niveau de la polémique ou du militantisme que de la satire. Or le militantisme politique mérite les mêmes sarcasmes ou critiques que le fanatisme religieux ; au cours du siècle écoulé, le militantisme a fait des ravages et un nombre effrayant de victimes - nettement plus importants que ceux imputables aux partisans d'un Etat islamique "au nom d'Allah".
Le fanatisme peut très bien se passer de l'invocation de dieu ; dans les temps modernes, celle-ci n'est plus qu'une "option", sur laquelle ce bouquin se focalise, donnant du fanatisme une image biaisée. Quid du fanatisme de l'argent, du fanatisme juridique, du fanatisme technocratique, typiquement occidentaux ?
La postface de la veuve du dessinateur (Chloé Verlhac) a elle aussi une tonalité mystique, parlant de "continuer à se battre"... au nom de quelle cause et contre qui, exactement ?
Dieu est mort, mais la "moraline" lui a survécu, soulignait le philosophe athée Nietzsche, conscient que la "moraline" est bien le problème sous-jacent au fanatisme religieux.
L'anthologie de Tignous illustre surtout le déclin de l'esprit critique athée, qui avec Nietzsche, Marx, voire Feuerbach, a connu son apogée au XIXe siècle. Ces essayistes et philosophes, très différents voire opposés, avaient en commun de bien connaître les religions qu'ils critiquaient.
Néanmoins, objectera-t-on, les journalistes de "Charlie-Hebdo" ont été massacrés par des musulmans fanatiques, dont l'acte témoigne d'un regain de la barbarie religieuse.
Certes, mais il y a près d'un siècle et demi, les attentats des militants anarchistes, Ravachol et Caserio en tête, terrorisaient déjà Paris et la plupart des capitales européennes, visant parfois de supposés "traîtres à la cause du peuple".
Un détail saute aux yeux dans cette comparaison : les anarchistes étaient aussi impies que les djihadistes se disent pieux ; c'est que l'attitude des élites dirigeantes a changé ; celles-ci utilisaient autrefois la foi et dieu comme un argument et un moyen d'oppression ; peu à peu, les élites industrielles et capitalistes ont relégué cet outil - à la limite contre-productif ; dans les régimes totalitaires athées, la sacralité du travail excède largement celle de dieu. Dieu est, cela depuis des siècles, alternativement un argument des peuples qui se révoltent, ou bien des élites dirigeantes.
On se souvient aussi (cela figure dans son CV) de la collaboration de Tignous à des magazines confessionnels : "La Croix", "La Vie" (avant que ce dernier magazine ne soit racheté par "Le Monde") ; cette double casquette de caricaturiste anticlérical pour "Charlie-Hebdo" et de salarié d'un titre appartenant au clergé catholique avait scandalisé les lecteurs de "La Croix", au point qu'une pétition avait été lancée, réclamant à la direction du journal l'éviction du dessinateur.
"Ni Dieu ni Eux", anthologie de dessins signés Tignous, éd. du Chêne, 2017.
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Walking baby
par Naumasq
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Caricature Emmanuel Macron
La Semaine de Zombi. Mercredi : Les élections aussi, c'est la loi de l'offre et de la demande.
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Revue de presse BD (195)
"Une" du "Harper's weekly" par Thomas Nast (représentant le Père Noël, que Nast contribua à rendre célèbre).
+ Le musée Tomi Ungerer de Strasbourg expose (jusqu'à fin octobre) Thomas Nast (1840-1902), considéré comme un précurseur de la caricature américaine et qui inventa le personnage de l'Oncle Sam, personnification des Etats-Unis d'Amérique. Ce dessinateur né en Bavière vint s'installer à New York avec sa mère quand il avait six ans ; beaucoup d'artistes américains, en particulier dans le domaine du dessin de presse et de l'illustration, étaient originaires d'Allemagne ou d'Europe de l'Est.
On peut se demander si la faiblesse de la caricature aux Etats-Unis aujourd'hui, tant sur le plan du dessin que de la satire, ne vient pas de la culture démocrate-chrétienne de ce pays ; celle-ci confère en effet à la politique une dimension spirituelle qui contribue à ennoblir exagérément l'action politique. Les caricaturistes américains ("Editorial cartoonists") font de la caricature politique, dans la mesure où ils sont eux-mêmes impliqués dans les débats politiques et les stratégies partisanes ; ils se font un devoir de commenter les moindres péripéties de la vie politique ; Plantu est un exemple français de cette manière américaine de caricaturer. Les cartoons américains présentent de ce fait peu d'intérêt pour qui ne connaît pas bien la vie politique américaine. Les caricaturistes en Europe, surtout en Angleterre, en France et en Italie, sont plus "anarchistes" ou du moins méfiants vis-à-vis du personnel politique et des utopies politiques optimistes.
+ Les admirateurs de Hergé connaissent son goût pour l'art contemporain en même temps que les complexes qu'il nourrissait vis-à-vis d'artistes reconnus comme tels. Le commerce de l'art contemporain est le sujet de son dernier album inachevé, "Tintin et l'Alph-Art". On annonce une exposition au Grand Palais après l'été sur ce thème. On a tort de ne pas considérer Hergé comme un artiste abstrait ; la bande-dessinée, destinée aux enfants, ne repose pas tant sur le dessin que sur l'animation des personnages, comme le dessin animé. Hergé n'est pas un grand dessinateur, en revanche c'est un styliste exceptionnel, deux caractéristiques que l'on retrouve souvent chez les artistes modernes dits "abstraits".
+ Le moins qu'on puisse dire c'est que Robespierre (1758-1794) n'a plus la cote. Le président de la République préfère même invoquer un autre enfant du Nord, Charles de Gaulle, malgré le penchant de ce dernier pour la monarchie. Le célèbre conventionnel révolutionnaire natif d'Arras est en effet ces derniers temps la cible d'attaques répétées de la part d'intellectuels de gauche en vue, dont Michel Onfray et Raphaël Enthoven ; au micro d'"Europe 1", ce professeur de philosophie a même comparé Robespierre à... Pol Pot. Et d'invoquer dans ce cas-là la Terreur, cruelle et sanglante, dont Robespierre fut un des principaux instigateurs. Mais, tandis que la Terreur fit quelques dizaines de milliers de victimes (40.000 ?), le régime de Napoléon en fit, lui, des millions, et cela n'empêche pas la République française d'entretenir son culte, ni maints plumitifs de continuer d'écrire des hagiographies du tyran corse (heureusement illisibles). Et que dire des Soviets, dont le bilan est parmi les plus lourds, mais dont le régime brutal séduisit néanmoins une bonne partie de l'intelligentsia et des artistes français ? Comme quoi il faut bien distinguer le roman national républicain de l'histoire... et se méfier des professeurs de philosophie.
+ Une exposition consacrée à des illustrateurs russes pendant la période soviétique nous apprend que certains artistes (Vladimir Lebedev) firent le choix, sous Staline, d'illustrer des livres pour enfants afin d'échapper à la répression de la police politique à laquelle d'autres choix artistiques pouvaient les exposer.
Ill. de V. Lebedev pour un conte de Kipling.
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Caricature Kévin Philippy
La Semaine de Suzette Zombi. Lundi.
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La Case de Lola