Ah ! Comme c'est triste la pluie et le beau temps !
Il n'est pas permis d'être autant sous l'influence
Des caprices du ciel et toujours mécontent
De sacrifier les lieux à sa désespérance
Lille fume et crie ah ! Mon poème est rance
Mon cher Verlaine oui vois le monde qui attend
Sa fin son apothéose depuis longtemps
Dans le ventre hideux qu'est le Nord de la France
L'amour s'est barré on dit qu'il est en carence
Ici depuis ta mort ou avant tant et tant
Qu'il exhale partout d'affreuses pestilences
Sur les parfums perdus des jeunes de vingt ans
Elle est bien connue hein cette immonde flagrance
Deux siècles nous séparent palpitant
N'est-ce pas cher poète ? La troisième avance
A grand pas forte comme un léviathan
D'en haut tu cèdes chroniquement à Saturne
En m'allouant tes vers fraîchement infusés
Pour me faire croire encore à la blanche cothurne
Grecque mais mon époque est faite de fusées
Dont la gueule défie aussi le triste ciel
Qui a été le tien Lors de nos habitudes
Ne faut-il pas s'accommoder du monde absurde
Et s'offrir tous les paradis artificiels ?
Poème de Bertrand Demagny, illustration d'Aurélie Dekeyser