manifestation - Page 4
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Vieux slogan
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Nouveaux Calicots
par l'Enigmatique LB
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La semaine de Zombi
Lundi : les canons à eau sont désormais préférés par les forces de l'ordre aux bons gros canons virils d'autrefois, qui passent beaucoup moins bien à la télé. A la limite, on se croirait à "Intervilles" où des volontaires se font humilier par pur plaisir masochiste.
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La Science au service de la Police
Il y aurait un volume à écrire, et non des moins intéressants, sur ce thème et avec ce titre : La Manifestation à travers les âges et ses divers modes de répression.
Si nous en croyons les livres sacrés, la première occasion en laquelle un gouvernement régulier crut devoir faire intervenir la force armée pour rétablir l'ordre, fut cette fois en où Dieu expulsa de son Paradis, grâce à l'archange de service, armé d'une épée flamboyante (?), le nommé Adam et sa concubine Eve, tous deux en état d'insurrection contre les règlements horticoles de l'époque.
Depuis ces temps éloignés, le système n'a d'ailleurs que peu changé : des gendarmes au lieu d'archanges, le sabre de cavalerie remplaçant l'épée flamboyante (?).
Parfois, quand les manifestants y mettent de l'obstination, le sabre de cavalerie cède galamment la place à quelques feux de peloton bien sentis : une fois de plus l'ordre règne à Varsovie.
Du canon aussi quelquefois, mais plus rarement.
...Chassons vite ces noirs pensers, en nous remémorant quelques joyeux fantaisistes de la répression.
Ce général, par exemple, de Castellane, noyant les manifestants marseillais sous des flots d'harmonie et les dispersant par le moyen de musiques militaires que les émeutiers dillettanti s'empressaient de suivre.
Le maréchal Lobau n'hésitait pas non plus à inonder les turbulents : mais, lui, c'était sous des flots d'eau que d'énergiques pompiers parisiens leur prodiguaient sans compter.
Le souvenir du maréchal Lobau me hantait, l'autre jour, pendant que, tout fier de son idée, notre excellent préfet de police nous développait le nouveau système de rétablissement de l'ordre dans la rue.
Oh ! il n'y va pas de main morte, M. Lépine !
Reste à savoir comment la population parisienne prendra le procédé.
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Vous avez tous entendu parler de l'air liquide.
Vous n'ignorez pas que, grâce à l'ingénieux procédé de notre ami Georges Claude, la liquéfaction de l'air est devenue un simple jeu d'enfant, à la portée des plus petites bourses.
Je vous sais trop au courant des choses de la science pour insister sur le résultat obtenu dès qu'on met à air libre un gaz liquéfié.
Par sa brusque détente, ce gaz détermine un violent abaissement de la température, abaissement qui va jusqu'à la congélation des liquides ambiants.
Une goutte d'air liquide sur la main, et, crac ! vous voilà la main gelée !
C'est plutôt, n'est-il pas vrai, brutal ?
Eh bien ! Tel est pourtant le procédé que M. Lépine n'hésite point, mesdames et messieurs, à adopter en grand pour la dispersion des manifestants.
Il les dispersera -comme c'est malin !- en les gelant sur place, dans des flots d'air liquide.
Et voilà comment, une fois de plus, mon pauvre ami Claude, la science se verra retournée de force contre la civilisation !
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J'ai visité tout le nouveau matériel de notre ingénieux préfet, pompes et réservoirs.
C'est joli, c'est coquet, c'est scientifique et simple.
C'est bien astiqué ; mais comme cela vous fait regretter ce pauvre Phoebus de Châteaupers et son peloton d'archers !
Alphonse Allais dans "Le Journal" (15 août 1902)
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Félix Vallotton****
...Le Feu sous la Glace
Ce n’est sans doute pas un hasard si Félix Vallotton (1865-1925) resurgit aujourd’hui, en pleine crise des valeurs bourgeoises. En effet, malgré un riche mariage tardif qui le mit à l’abri du besoin, Vallotton n’épousa jamais vraiment la raison de son temps. Son art, si singulier, se détache bien plus de son époque qu’il n'en est l'écho. Contrairement aux impressionnistes, Vallotton ne participe pas à l’enthousiasme général.
L’idée de progrès social, en particulier, est étrangère à Vallotton, trop lucide pour se bercer de ce genre d’illusion ; on l’imagine bien dire, comme Kafka : « Croire au progrès ne signifie pas qu’un progrès a déjà eu lieu. » Le mépris du bonheur, en tant qu’idéal bourgeois, est palpable dans l’oeuvre de Vallotton.
Qui a raté comme moi l’exposition de cet hiver au Grand Palais pourra se rattraper avec l’épais catalogue la retraçant, publié par la Réunion des musées nationaux. Ce volume comporte de nombreuses reproductions de bonne qualité, représentatives de l’œuvre de Vallotton.
Sans être positivement moderne, Vallotton a su s’adapter aux nouvelles modalités techniques de diffusion de l’image, reléguant la peinture d’apparat ou de musée. Les bois gravés de Vallotton, suivant une perspective narrative à laquelle le dessin de presse, l’illustration ou la bande-dessinée nous ont familiarisés depuis, sont très "frais" et efficaces (on peut constater qu'en matière de "ligne claire", les auteurs de BD n’ont pas inventé grand chose, si ce n'est le mot). (...)