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scott mccloud

  • Revue de presse BD (146)

    Extraits de la revue de presse illustrée publiée chaque semaine en intégralité dans l'hebdo Zébra.

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    Hans, par Jérôme Anfré, Delcourt-Shampooing (avril 2015)

    + On ne compte plus les plus ou moins jeunes blogueurs-BD désormais, qui ont trouvé un éditeur ; les professionnels du livre sont sans doute attentifs à ce média, qui permet au public d'être en contact plus étroit avec l'auteur. Vu la quantité industrielle de bande-dessinées publiées, tous les moyens de publicité sont bons -Pénélope Bagieu est ainsi une experte du marketing ; cependant c'est d'abord le côté pratique, ou l'aspect ludique de cette nouvelle technologie, ou encore le contact immédiat avec un public, aussi restreint soit-il, qui constitue la première motivation des auteurs. "Zébra" se fait un devoir de repérer pour ses lecteurs les meilleurs blogs-BD humoristiques, voire d'en publier quelques extraits à l'occasion. Jérôme Anfré, que nous avions interviewé lors de sa participation au webzine expérimental "Mauvais Esprit" (expérience qui a tourné court depuis), vient de publier son premier album chez Delcourt, dans la collection "Shampooing" dirigée par Lewis Trondheim, sobrement intitulé "Hans". Li-An, un confrère plus expérimenté, commente sur son blog : "Il est très rare que je rigole en lisant des BD - j'aurais tendance à ricaner méchamment - mais Jérôme Anfré a un talent unique. Son personnage est hyper-expressif, râleur comme un Fone Bone, enfantin et maladroit. Et, surtout, inattendu." De fait, le talent et l'humour de Jérôme Anfré sont aussi proches de ceux d'un auteur de cartoons (dessins-animés) américain que d'un auteur de BD. On peut peut-être aussi voir une parenté éloignée entre "Hans" et "Max & Moritz", bien que le personnage de Hans soit plus passif que Max et Moritz, actifs garnements.

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  • Un Privé à la Cambrousse*****

    «(…) Nous au village, aussi, l’on a de beaux assassinats.» Ces paroles d’une chanson de Brassens fanzine,bd,zébra,bande-dessinée,critique,kritik,zombi,bruno heitz,un privé à la cambrousse,brassens,paris,scott mccloud,tgv,rothko,yankee,gallimardrésument on ne peut mieux la BD magistrale de Bruno Heitz. J’ai rarement vu un tel niveau en BD, proche de la perfection. Dessin façon Willem, mais mieux utilisé.

    Ne gobez pas les théories pompeuses des thésards de la BD yankees  (façon Scott McMachin, qui ferait mieux de bosser pour la météo): ces types confondent le dessin industriel avec la BD, et, si vous les écoutez, vous ferez des BD aussi chiantes que des rames de TGV ou des toiles de Rothko.

    Si je croyais qu’on peut enseigner la BD (encore une idée allemande ou yankee –imaginez ce que Brassens serait devenu s’il avait fait le Conservatoire), je conseillerais de regarder comment la BD de B. Heitz est faite. Comme on devrait toujours faire le vin, avec modestie et efficacité, sans effets spéciaux comme le baujolais ou le champagne.

     Pour confirmer mon propos sur la perfection de cette BD, étonnamment produite par Gallimard (dont le snobisme est plutôt la marque de fabrique que la sincérité), je fais lire «Un privé à la cambrousse» à mon petit neveu de douze ans. La littérature doit toucher toutes les générations; si c’est un truc «de genre», ciblé, vous pouvez être sûr qu’il y a une opération commerciale ou administrative derrière, en gros un machin éthique pas très honnête.

    Tout le problème de la culture bourgeoise est là, d’ailleurs : elle n’arrive à produire que des trucs pour la mise en rayons. «Girly», «Spécial militante féministe», «Humour réac», «Freluquet libidineux», «Pornographie prolétarienne», «Héroïsme virtuel pour futur diplômé d’HEC», «Bovarysme 2.0», «Indignation certifiée d’origine Soixante-huitarde», «Ménager(e) gay de moins de cinquante ans», «Le Satanisme pour les Nuls» (Je vise plutôt les marques de gauche, puisque les gens de droite, ne sachant pas lire, vont surtout au cinéma.)

    Déjà je n’aime ne pas me sentir «client», quand je lis un bouquin, victime de la mode. Et mon neveu a apprécié; certains trucs lui ont échappé, car les lois et les crimes des adultes sont trop raffinés pour les enfants. Mais il a appris quelque chose: la campagne de Jean-Pierre Pernaut qu’on montre à la télé n'existe pas, encore moins celle de la culture biodynamique du futur, d'où les paysans auraient été expulsés.

    Non, la cambrousse est toujours en bordure de la forêt, et la forêt, c’est le crime (ou les étangs, les rivières, tous les lieux propices pour dissimuler un cadavre, principale inquiétude de l’assassin: sans cet écueil, le nombre des assassins l’emporterait sans doute sur celui des hypocrites, comme dans l’antiquité).

    On pige aussi pourquoi la littérature française est pauvre en polars, quand la littérature américaine, en revanche, en est riche. Un polar, ça doit se situer à la cambrousse, au plus près de la nature, comme la peinture impressionniste. Brassens se trompe sur la première partie : le crime ne fleurit pas tant que ça à Paris, où il y a presque autant de flics que d’habitants. En ville, il faut traiter du crime policé, commis avec des gants et de l’hygiène. C'est moins pittoresque.

    Encore quelques Bruno Heitz comme ça, et Gallimard ne produira plus que des BD. Il serait temps.

    Un privé à la cambrousse, Bruno Heitz, Gallimard, 2012 (tome II), 341p.

    (Zombi - leloublan@gmx.fr)