par l'Enigmatique LB
FANZINE ZEBRA BANDE-DESSINEE ET CARICATURE
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Caricature François Hollande
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Caricature France-Portugal
La Semaine de Suzette Zombi. Lundi : "Liberté, égalité, football, etc."
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Caricature Didier Deschamps
La Semaine de Zombi. Vendredi : La bière a remplacé le vin de messe.
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Qui a peur de Shakespeare ? (1)
Petit feuilleton littéraire estival
Insaisissable Shakespeare
On célèbre cette année dans le monde entier les 400 ans de la mort de William Shakespeare, cet illustre inconnu. L'oxymore permet de souligner le paradoxe suivant : Shakespeare est aussi loin que proche, absent que présent ; présent dans la culture contemporaine via la multitude des poètes modernes qu'il a touchés et influencés, des adaptations de son oeuvre qui ont été proposées au public, tant cinématographiques que théâtrales...
Mais il semble aussi distant en raison du mystère qui entoure son oeuvre ; combien sont partis à la recherche de Shakespeare, de l'homme, de son oeuvre... et n'en sont jamais revenus ? Des milliers ? Peut-être encore plus... Une bibliothèque privée, exclusivement consacrée à la collecte d'ouvrage traitant de Shakespeare, recèle plus de 100.000 bouquins !
A quoi bon la culture, si elle nous pousse à célébrer Shakespeare sans même savoir qui il est ?
La commémoration ne doit pas faire oublier que Shakespeare n'a pas que des admirateurs, mais aussi quelques détracteurs plus ou moins sévères ; Tolstoï, par exemple, le jugeait inférieur à Homère. Pour le peintre Delacroix, qui a illustré le texte de S., ses pièces manquent de perfection. Il arrive que les détracteurs en disent plus long que tel ou tel admirateur, pressé de trouver un appui dans Shakespeare à son système de pensée.
"Catholique", "Luthérien", "Athée", "Libre-penseur", "Païen" : à peu près tous les épithètes ont en effet été attribués à Shakespeare par la fine fleur des intellectuels, philosophes ou essayistes modernes, aussi contradictoires soient-ils entre eux, contribuant à brouiller la piste encore plus.
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Si vous n'aimez pas le mystère, arrêtez-vous ici, car il s'épaissit encore sous l'effet des efforts de certains critiques pour dénier à l'acteur de Statford-sur-Avon la paternité de l'oeuvre qui lui est officiellement attribuée. Il y a de cela quelques années, un film américain ("Anonymous", 2011) broda une intrigue autour de cette suspicion d'un auteur différent.
Auparavant, Mark Twain écrivit et fit jouer une pièce exprès pour persuader le public de la conviction qu'il avait acquise que l'acteur natif de Stratford-sur-Avon n'était qu'un prête-nom. Mark Twain est-il convaincant ? Il l'est au moins sur un point : la notice biographique de Shakespeare est étonnamment concise, limitée à quelques lignes, et donc propice à faire naître tous les fantasmes.
Les "antistratfordiens" sont sans doute plus nombreux aux Etats-Unis, car l'antistratfordisme relève presque du blasphème dans la patrie de Shakespeare. Mais il faut ajouter au moins deux noms allemands prestigieux à la liste des sceptiques : ceux du doctrinaire réactionnaire F. Nietzsche et du médecin fondateur de la psychanalyse S. Freud. Tous deux réattribuèrent l'oeuvre au savant Francis Bacon (1561-1626), en se fondant sur divers arguments. La correspondance privée de Nietzsche montre qu'il fut même, pendant un temps, persuadé d'être la réincarnation de F. Bacon alias Shakespeare !...
Tout cela a bien sûr un parfum de complotisme dans l'air du temps ; mais, avec "Hamlet", Shakespeare n'a-t-il pas élevé le complotisme au rang d'oeuvre d'art ?
(A SUIVRE)
Illustration par E. Delacroix de la scène d'Hamlet et des fossoyeurs (acte V, scène 1) ; au XIXe siècle, la passion de Shakespeare se répand petit à petit dans toute l'Europe ; Delacroix y participe, tout en exprimant quelques réserves dans son "Journal".
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Dickie dans l'Espace****
Le Gantois Pieter De Poortere a vu son premier recueil de gags traduit par Glénat dès 2010 sous le titre "Le Fils d'Hitler", dix ans après ses débuts dans la presse flamande.
"Traduit" est un grand mot, puisqu'il s'agit de gags muets d'une page. Bien qu'il ménage le "politiquement correct", De Poortere fait tout de même preuve d'impertinence ; il rogne les cornes dont Hitler est le plus souvent affublé, faisant ainsi figure de "grand Satan", pour en faire un personnage toujours aussi antipathique, mais beaucoup plus familier, un personnage plus trivial encore que le "Dictateur" de Chaplin.
On comprend pourquoi Glénat n'a pas tardé à publier ensuite plusieurs autres recueils, dont le dernier en date : "Dickie dans l'Espace". En effet les bons auteurs comiques sont rares, concurrencés par l'humour gras ou potache plus "vendeur". De Poortere est très efficace. Il s'appuie sur un dessin minimaliste, mais néanmoins expressif, pour distiller son pessimisme. L'humour de Pieter De Poortere n'est pas facile à caractériser, car il reflète des influences diverses ; on pense à cette devise de S. Maughman : "Ne rien dire qui n'égratigne pas"; De Poortere cherche à provoquer chez le lecteur autre chose qu'un rire gras ou même seulement léger.
Comme son titre l'indique, le dernier opus exploite le thème de la conquête spatiale, fil conducteur de toute une série de gags. Le choix de ce thème est particulièrement judicieux, plus original que celui d'Hitler, et peut-être plus audacieux car il résume parfaitement l'esprit conquérant moderne, la mystique du progrès frelatée qui le soutient.
De Poortere ne se prive pas, bien sûr, de jouer avec les codes de littérature et du cinéma de science-fiction, genres ô combien propices aux fantasmes et, donc, à la dérision. Dickie ("Boerke" en flamand), c'est l'anti-Tintin, la ligne claire détournée.
"Dickie dans l'Espace", par Pieter De Poortere, Glénat, 2016.
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Caricature Michel Rocard
La Semaine de Suzette Zombi. Lundi : L'hommage le plus surréaliste à M. Rocard : "Trois femmes et quatre enfants, un homme de tribu." ("Elle")
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L'Homme qui tua Lucky-Luke
Heureuse coïncidence, notre rédac chef publie une critique de "L'Homme qui tua Lucky Luke" le jour même où j’emprunte le livre à la bibliothèque.
C’est énervant et décourageant de voir autant de talent dans chaque case de chaque page. Le dessin est vraiment éblouissant de maîtrise, l’œil se délecte tant du trait que du cadrage, du rendu du mouvement, de la couleur. J’ai retrouvé la virtuosité et la force évocatrice d’un Jean Giraud dans les meilleurs Blueberry.
Mais la lecture m’a un peu ennuyé, j’ai trouvé le scénario faible et les personnages plats, et je partage l’avis de l’hebdomadaire La Vie pour qui « Un peu plus d’humour n’aurait cependant pas nui ». Cela dit, cet album est autrement plus digne de Morris que la reprise de la série par le successeur officiel qui, pour le coup, pourrait bien incarner l’homme qui, véritablement, tua Lucky Luke.
L’Enigmatique LB (ci-contre : dessin original de Morris)