dessin par WANER
FANZINE ZEBRA BANDE-DESSINEE ET CARICATURE
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Caricature déradicalisation
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Caricature Fortunes de France
par l'Enigmatique LB (à suivre aussi dans "Siné-Mensuel")
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Le Chant du Cygne (2)
Petit feuilleton historique estival
Snobinette
A travers son Journal, le peintre belge Henry de Groux (1866-1930) est un témoin de premier plan, quoique méconnu, de l'art de son temps.
Praticien exigeant, admirateur d'Eugène Delacroix comme Baudelaire, de Groux se montre le plus souvent sévère avec ses contemporains. Son engagement total au service de l'art et son amitié avec le pamphlétaire Léon Bloy le tiendront à l'écart des circuits officiels de l'art ; l'artiste belge, à demi-marginal, parviendra non sans difficultés à vivre de sa peinture.
Extrait de son Journal (Eds Kimé) :
22 Août (1902) : - Viens un peu voir, maman, comme Félicien Rops* a fait des progrès, profère une toute petite snobinette de quatorze ans, entraînant sa mère devant le "Pornokratès" exposé chez Le Barc de Bouteville.
*"Pornokratès" (ci-contre), par le caricaturiste namurois Félicien Rops, où la pornographie est représentée comme une muse moderne, se laissant aveuglément guider par un porc.
- Moins connu, mais encore de F. Rops, ce "Combat des sexes au temps de la préhistoire" (ci-après).
- Rops, à certains égards, peut passer pour précurseur de l'humour bête et méchant de "Hara-Kiri" - par exemple quand il dessine un bourgeois sodomisant une truie, avec la légende suivante : "Ne faites pas aux truies ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fît."
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Caricature Bachar el Assad
par l'Enigmatique LB (à suivre aussi dans "Siné-Mensuel")
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Le Sacre de la Bande-dessinée
Si ce numéro de l'épaisse revue "Le Débat" (mai-août 2017), intitulé "Le sacre de la bande-dessinée", prouve bien une chose, c'est l'intellectualisme ambiant.
Outre les thuriféraires professionnels habituels de la bande-dessinée que sont T. Groensteen, B. Mouchart ou B. Peeters, le sommaire de "Le Débat" regroupe en effet quelques universitaires polyvalents, tels que Rémi Brague ou Jean-Luc Marion, des chercheurs au CNRS, un ex-politicien (Hubert Védrine), des critiques d'art (Philippe Dagen, Fabrice Piault) - ainsi que quelques autres plumitifs, journalistes ou romanciers.
D'emblée il saute aux yeux que, contrairement à Napoléon, les auteurs de BD ne sont pas assez fortiches pour se coiffer eux-mêmes de la couronne. En effet, Jacques Tardi est le seul auteur qui participe à cette cérémonie, et encore, c'est pour notifier son désintérêt : - ça m'indiffère totalement, même si, à mon avis, le but d'une bande-dessinée est d'être imprimée et lue dans un livre ou un journal et pas d'être exposée sur un mur. Présenter des planches comme des oeuvres d'art flatte peut-être certains auteurs en quête de reconnaissance, mais ça ne m'intéresse absolument pas.
Comme Tardi est poli, il n'envisage que la flatterie, sans mentionner l'aspect mercantile, pourtant caractéristique de la production d'oeuvres d'art contemporaine, bien au-delà de la seule bande-dessinée. Quelle production se prête mieux à la spéculation financière que la production artistique ? Aucune, car la valeur de l'art aujourd'hui est on ne peut plus incertaine. En atteste le triplement récent des bénéfices sur le marché de l'art, au point que l'on peut parler (sans jeu de mots) de "bulle spéculative" dans ce domaine. Les artistes et leurs producteurs joueront-ils un rôle déclencheur dans la prochaine crise mondiale et ses dommages collatéraux (guerres civiles, famines, génocides, terrorisme) ?
La spéculation est caractéristique -ô combien- du génie ultra-moderne. Il aurait ainsi convenu de se demander plus précisément, pour éviter des digressions oiseuses, si la BD est un art spéculatif, et dans quelle mesure ?
Le débat, qui selon l'apparence constitue la raison sociale de cette revue, est hélas à peu près absent de ses pages, qui relatent de façon très séquentielle et narrative comment les auteurs de bande-dessinée sont devenus des gens respectables en dépit de leur inaptitude atavique à se vêtir convenablement et s'exprimer sans fautes d'orthographe.
Pourquoi la bande-dessinée est-elle soudain en odeur de sainteté ? Est-ce dû à la disparition de toute forme d'esprit critique dans la société de consommation, ou bien à une autre raison ? On aurait pu se poser la question, laisser des avis divergents s'exprimer. Quelques réserves anciennes, ça et là, sont bien évoquées, mais c'est pour les qualifier aussitôt de "caduques". Comme la plus pertinente de ces critiques fait le lien entre la bande-dessinée (et le cinéma) et la "culture de masse", stigmatisant celle-ci comme un phénomène totalitaire, doit-on en déduire que la critique du totalitarisme est caduque ?
On aurait pu aussi relever que la bande-dessinée à l'usage du jeune public ("Tintin") se prête particulièrement au jeu de "l'artification" de la BD, pour reprendre l'expression hideuse de la sociologue Nathalie Heinich (la laideur de son vocabulaire est le principal gage de sérieux de la sociologie). C'est probablement dû à la sophistication des moyens mis en oeuvre dans ce genre destiné aux enfants où l'ellipse n'est pas permise. Si la ligne de Hergé est "claire", c'est surtout du point de vue du récit, exempt de "second degré" ; celui-ci est caractéristique au contraire des ouvrages humoristiques, ou encore des fables mythologiques, tandis que les "aventures de Tintin" sont dépourvues de ce relief. Qu'elle ait un ressort "inconscient" n'indique absolument pas la profondeur du travail d'Hergé.
Encore une fois, ce numéro est un numéro d'intellectuels, et il en dit plus long sur le rôle de l'intellectuel (prolongeant celui du prêtre) dans la société moderne, que sur la bande-dessinée elle-même. Sur la valeur et les limites du genre de BD qu'il pratique, le propos assez pragmatique de J. Tardi est le plus éclairant.
En feuilletant ces pages, on peut se laisser aller à son tour au jeu de la remise des prix ou des titres, dont les intellectuels sont friands :
- "Tintin, ce n'est pas rien !" (Rémi Brague) : Prix de la "ligne claire" pour ce titre-coup de bluff.
- "Cette déflation de la chasse au bijou (au trésor) disparu, où le vol n'est plus réel mais apparent, se marque par la déflation parallèle de la chasse aux voleurs (...)" (Jean-Luc Marion) : Prix "Alcofribas Nasier" de la tournure amphigourique destinée à camoufler l'indigence du propos.
- "Chez Hergé, l'histoire reste un cadre, pas un matériau, comme elle l'est chez Jacobs [?] et d'autres plus proches de l'esprit d'Alexandre Dumas [?], ce géant, dans "Les Trois Mousquetaires" (Hubert Védrine) : Prix de l'euphémisme, puisque Tintin est aussi éloigné de l'histoire que l'est la propagande politique.
- "Dans les bibliothèques publiques les plus récentes, la bande dessinée occupe une place de choix. Avec environ 20% des prêts, elle a la réputation non usurpée d'une star des bibliothèques publiques - à tel point que le terme de "produit d'appel" a parfois été prononcé à son sujet." (Antoine Torrens) : Prix "Angoulême" du plus bel emballage.
Etc.
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Caricature En marche
dessin par KROKUS
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Le Chant du Cygne (1)
Petit feuilleton historique estival
Seul Rodin...
A travers son Journal, le peintre belge Henry de Groux (1866-1930) est un témoin de premier plan, quoique méconnu, de l'art de son temps.
Praticien exigeant, admirateur d'Eugène Delacroix comme Baudelaire, de Groux se montre le plus souvent sévère avec ses contemporains. Son engagement total au service de l'art et son amitié avec le pamphlétaire Léon Bloy le tiendront à l'écart des circuits officiels de l'art ; l'artiste belge, à demi-marginal, parviendra difficilement à vivre de sa peinture.
Extrait de son Journal (Eds Kimé) :
1er Mai (1898) : Visite au Salon du Champ de Mars. Peinture nulle ; absolument nulle. Rien de rien ! Vulgarité, banalité, ordure. Sculpture : le Balzac de Rodin. L'oeuvre est étrange, audacieuse, déconcertante au premier abord. Peu à peu, on se rend compte de la réelle grandeur, de la véritable aristocratie de la conception et on comprend, en persistant, la colère du public, véritablement outré et détraqué de désappointement. C'est une rumeur d'indignation ininterrompue et réjouissante, vraiment le mufle se sent défié et montre les dents.
En somme, la seule oeuvre du Salon.
L'oeuvre surabonde de style et de caractère original en sa simplicité très puissante.
Sentiment que je serai vraiment le seul peintre à l'heure actuelle qui sache son métier à fond et comprenne son art supérieurement. (...)
*Ci-contre : caricature illustrant la réception du Balzac de Rodin.