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Revue de presse BD (149)

  Extraits de la revue de presse illustrée publiée chaque semaine en intégralité dans l'hebdo Zébra.webzine,bd,zébra,gratuit,fanzine,bande-dessinée,actualité,revue de presse,hebdomadaire,mai,2015,chérif kouachi,courrier international,reportage,gianluca costantini,kazuto tatsuta,fukushima,ted rall,afghanistan,charlie-hebdo,luz,zineb el razhoui,riss,country life,shakespeare,herball,mark griffiths,william cecil,francis bacon,william rogers,john gerard,freud,mark twain,nietzsche

 

+ Scoop littéraire du siècle, selon le directeur de « Country Life » (19 mai), la publication du premier portrait authentique de Shakespeare, exhumé par l’historien et botaniste Mark Griffiths. Le portrait supposé figure au frontispice d’un ouvrage savant de botanique de près de 1500 pages, rédigé par John Gerard, et vieux de quatre siècles (1598), « The Herball of general Historie of Plantes ». Le fameux poète et tragédien a été dessiné par William Rogers en compagnie de trois autres personnages contemporains du règne d’Elisabeth 1re (dont William Cecil, trésorier de la Reine et politicien de premier plan), qui ont permis à Mark Griffiths, au terme de cinq années d’enquête d’identifier Shakespeare, de même que les différents symboles utilisés par le dessinateur. On peut être surpris par la présence de Shakespeare au fronton d’un ouvrage de botanique, mais c’est ignorer l’esprit humaniste de la Renaissance, qui unit et rassemble les sciences au lieu de les étudier séparément ; de plus les lecteurs de Shakespeare savent qu’à l’instar des poètes antiques, le tragédien anglais possède la botanique et en tire de nombreuses métaphores.

Jusqu’ici on ne disposait que de portraits fantaisistes de Shakespeare, seulement propices à entretenir le folklore, et la découverte de M. Griffiths, si elle s’avère exacte, pourrait bien avoir un impact considérable. On remarque en effet d’emblée que le portrait de Shakespeare illustrant la page de titre de « The Herball » n’a que très peu de ressemblance avec le personnage au visage poupin et au front dégarni, dépourvu d’expression comme un masque, sur lequel le roman national anglais s’est appuyé pendant longtemps.

Cette trouvaille pourrait avoir pour effet de redonner de la vigueur à une querelle déjà ancienne à propos de l’attribution à l’acteur natif de Stratford-sur-Avon de l’œuvre monumentale de Shakespeare, qui oppose « grosso modo » l’université ou la science scolastique à quelques francs-tireurs isolés, dont la renommée, à défaut du nombre, suffit à contrebalancer le poids de la scolastique : Mark Twain en tête, mais aussi S. Freud et F. Nietzsche.

La piste Francis Bacon, notamment, pourrait être relancée, non seulement en raison d’un profil physique similaire, mais du rapport étroit entre Bacon et les autres personnages. Bacon a en outre publié des ouvrages de botanique, de chimie, de diététique et de jardinage.

L’Angleterre, persuadée d’avoir engendré le Homère des temps modernes se passionne déjà pour cette découverte, qui suscite l’ironie, l’enthousiasme ou la curiosité.

+ En « Une » de « Courrier international » (13-20 mai), un bandeau annonce fièrement en lettres capitales « SPECIAL REPORTAGES BD » ; la Une est en outre illustrée par un dessin représentant Chérif Kouachi, extrait de l’un des reportages. Un peu trop fièrement, car l’hebdomadaire ne propose en réalité qu’une vingtaine de pages en tout de reportages-BD, par des dessinateurs italien, américain, serbe, iranien et japonais ; de plus ces reportages n’en sont pas vraiment…

De l’aveu même de Gianluca Costantini, qui retrace pour ses compatriotes l’itinéraire des frères Kouachi jusqu’à la fin que l’on sait, son travail est plus un exutoire, un exercice qui lui a permis de surmonter le choc psychologique de l’attentat, qu’un véritable reportage. Les faits que l’auteur rassemble et résume sont déjà parus dans la presse, pour ne pas dire que la télévision en a fait ses choux gras. Un vrai reportage aurait pu consister, par exemple, à s’approcher plus près de la « filière irakienne du XIXe », suivant l’appellation des experts de la police, et d’une population jeune, issue de l’immigration, partagée entre la résignation de faire partie d’une sorte de réservoir de main-d’œuvre bon marché, la petite délinquance et la révolte sous des prétextes politico-religieux.

De même, si l’auteur de manga qui relate le travail à la centrale de Fukushima y a bien été employé, avant de publier une bande-dessinée qui a fait un carton dans son pays, « Courrier international » indique que Kazuto Tatsuta a été suspecté d’être à la solde de son ancien employeur, tant son propos était bénin.

Le procédé narratif propre à la BD pour enfants, dans lequel certains voient la quintessence de la BD, est plus propice au récit de fiction et au divertissement qu’au reportage. En revanche le dessin d’observation, auquel certains dessinateurs de BD sont entraînés (pas tous), leur donne parfois un regard plus aigu. Le dessin est un art plus réaliste que la photographie ou le cinéma. C’est d’ailleurs un reporter BD américain (Ted Rall) qui a dénoncé la mise en scène de l’actualité par les grands « networks » anglo-saxons présents sur le terrain des opérations militaires.

« Courrier international » relève la difficulté pour le reportage en BD de trouver une place à l’heure où l’information est produite avec des méthodes et en quantité industrielles. L’hebdomadaire fournit quelques liens vers des sites proposant des reportages en ligne comme www.symboliamag.com (payant) ou www.graphic-news.com (italien).

 + Parmi les rares dessinateurs rescapés de « Charlie-Hebdo », Luz a fini par donner sa démission, comme on pouvait le prévoir, rattrapé par l’absurdité du défi qu’il s’était lancé avec ses confrères, dans un sursaut d’orgueil, de relever « Charlie-Hebdo », décapité au mois de janvier dernier. Contrairement aux magazines à forts tirages, liés à des groupes industriels et qui sont presque des marques, « Charlie-Hebdo » est lié à la personnalité de ses fondateurs, notamment Cabu (devant lequel la jeune génération s’inclinait). A l’exécution s’est ajoutée la récupération politique par le gouvernement, qui a contribué à décrédibiliser la publication auprès de son lectorat naturel, plus avide d’humour et de satire que de sermons laïcs (pas de laïcité sans police ni armée pour la faire appliquer).

Difficile aussi sans doute pour un dessinateur de commenter et prendre du recul sur une actualité qui l’a, d’une certaine façon, dévoré. On note enfin que Luz tient un discours anthropologique quasiment mystique, parlant de « se reconstruire » (?) et prenant  des poses pour les photographes qui évoquent le culte de la personnalité des stars de la chanson ou du cinéma.

En marge d’un conflit qui l’oppose à Riss, son nouveau directeur, Zineb El Razhoui a fustigé la tutelle et l’ingérence de certains avocats dans la gestion du capital de l’hebdomadaire.

 

 

 

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