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los angeles

  • Caricature & Révolution**

    Quelques journalistes et caricaturistes étrangers ont fait cette remarque après l'attentat contre "Charlie-webzine,bd,zébra,fanzine,gratuit,bande-dessinée,caricature,critique,révolution française,1789,james cuno,los angeles,jacques-louis david,james gillray,michel melot,ronald paulson,albert boimeHebdo" : la caricature française est née dans la violence terroriste. En effet la première République française a usé simultanément de la violence des armes, de la guillotine et des caricatures pour s'imposer.

    "On a malheureusement peu écrit sur la caricature française de l'époque révolutionnaire.", écrit James Cuno (Université de Los Angeles) en préambule d'un épais catalogue d'exposition paru à l'occasion du bicentenaire de la Révolution française. Le rôle de mythe fondateur joué par la Révolution française dans le roman national français n'est pas étranger à la rareté des commentaires.

    On le comprend, James Cuno et son équipe entendent remédier à cette lacune par leur ouvrage, divisé en six essais, rédigés par trois profs Américains, deux Français et un Allemand.

    Ce n'est pas une mauvaise idée a priori de confier à des profs d'Histoire étasuniens, peu impliqués dans le roman national français, le soin d'exposer dans quelles conditions morales, religieuses, esthétiques, politiques, la caricature a fait son apparition en France.

    Ces universitaires se lancent dans des pistes intéressantes. Ainsi Albert Boime (Los Angeles) tente de démontrer, dans un article consacré aux caricatures de Jacques-Louis David, que les pratiques par le peintre de la caricature et de l'art néo-classique, apparemment contradictoires, sont bien cohérentes. Malheureusement la démonstration de cet universitaire se perd dans la brume des théories freudiennes, qui ont apparemment un grand crédit Outre-Atlantique.

    Dire que la caricature est la manifestation d'une certaine violence virile est comme enfoncer une porte ouverte ; postuler un lien entre cette violence et la sodomie présente un intérêt limité. Quant au jargon freudien à base de déterminisme oedipien, il frise parfois le ridicule et desservirait plutôt la démonstration.

    David intervient d'ailleurs comme chef d'orchestre ou comme général de la propagande révolutionnaire jacobine ; excellent portraitiste, David n'est pas moins un caricaturiste improvisé ; il travaille sur commande et par conviction, s'emparant de la caricature comme d'une arme à sa portée, tout en s'inspirant de Hogarth et de son contemporain l'Anglais James Gillray. Ce dernier est en effet bien mieux exercé que David à l'art de la caricature, peu prisé en France à la fin du XVIIIe siècle.

    Ici on note que David et Gillray s'admiraient réciproquement, bien qu'ils fussent politiquement ennemis.

    Deux chapitres plus clairs de Michel Melot (Centre Pompidou) et Ronald Paulson (Baltimore, Maryland) permettent de cerner pourquoi la caricature est l'art le moins français qui soit à la fin du XVIIIe siècle, et ne s'y épanouira pas avant la monarchie de Juillet.

    La censure monarchique, rétablie juste après avoir été abolie par la Convention (dès le 31 juillet 1789), puis encore renforcée ultérieurement, ne permet pas d'expliquer à elle seule le retard de la France sur le Royaume-Uni et la Hollande. La propagande révolutionnaire, qui justifie la censure, diffuse des images qui sont rarement subtiles mais bien plutôt destinées à frapper les esprits.

    Tandis qu'il existe en Angleterre et en Hollande un public capable d'apprécier la caricature satirique, ce public n'existe pas encore en France. La nouvelle classe moyenne, intermédiaire entre le petit peuple et la bourgeoisie, suffisamment cultivée pour apprécier la caricature et l'humour, n'est pas encore assez nombreuse. Ni l'aristocratie, ni la bourgeoisie proche de cette dernière, n'a intérêt à se moquer publiquement de la figure du roi et des emblèmes du pouvoir ; en Angleterre, des caricaturistes conservateurs comme Gillray n'hésitent pas à se payer la tête du roi - le leur, et ceux des royaumes voisins.

    En revanche la violence politique de la Convention et son usage systématique de la guillotine ne manquèrent pas d'inspirer les caricaturistes étrangers, qui exercèrent leur verve au détriment des Sans-Culottes et de leurs chefs.

    Un peu plus d'un siècle et demi après, les caricatures de "Charlie-Hebdo" ont un sens et une tonalité très différents de ceux des caricatures révolutionnaires. Le pouvoir impérial, puis le pouvoir républicain ont succédé à la monarchie ; l'âge d'or de la caricature est passé par là, Louis-Philippe ayant voulu se faire passer pour un monarque anglais, moderne et tolérant. Une classe moyenne suffisamment cultivée pour apprécier la presse satirique est apparue, qui conserve aussi assez de distance avec le pouvoir pour ne pas craindre l'effet subversif de la satire.

    Les caricaturistes de "Charlie-Hebdo" étaient a contrario les moins engagés des journalistes de leur temps, c'est-à-dire les plus indépendants des partis politiques contrôlant la plupart des journaux. Cavanna et Choron ne cherchaient pas à mobiliser les foules, mais à provoquer seulement des réactions chez quelques dizaines de milliers de lecteurs. S'agissant de "Hara-Kiri", Choron parle de retourner l'arme de la vulgarité contre la bourgeoisie, ce qui sous-entend bien une forme de combat, mais selon un moyen beaucoup plus subtil que la polémique et les charges violentes d'un parti révolutionnaire décidé à s'emparer du pouvoir.

    La Caricature française et la Révolution (1789-1799), catalogue de l'exposition organisée à l'UCLA (Los Angeles) et à la BNF, rédigé par James Cuno, Albert Boime, Michel Melot, Lynn Hunt, Claude Langlois, Ronald Paulson, Klaus Herding.

  • Revue de presse BD (86)

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    (Autoportrait de Tanxxx en preux chevalier de la BD)

    + "Sinon le Festival International de la Bouffe Dégueulasse, Festival Interminable de la Bedaine Déflagrante, Festival Ignoble de Baveux Démoniaques, bref, le FIBD approche donc. (...)": ainsi Tanxxx, linograveuse et auteur de BD de son état, dénigre-t-elle son gagne-pain. Comme la limite entre le travail et la prostitution est assez subjective, on ne peut pas lui en vouloir. Tanxxx a rédigé en outre sur son blog une note émouvante, où elle dit vouloir tout envoyer promener : la BD, la linogravure, son dessin de style américain qui finit par l'écoeurer: "(...) Ben ouais : comment passer à autre chose maintenant que je suis bien coincée dans Tanxxx ? Le dessin léché m'emmerde désormais assez prodigieusement. Je crois que c'est Benasayag qui, parlant de progrès dans une de ses conférences, expliquait qu'avec la technique on sait ce qu'on gagne mais on ne sait pas ce qu'on perd (...)"

    + A propos du FIBD, un différend ténébreux oppose l'académie des jurés d'Angoulême aux organisateurs du festival à propos du mode de scrutin. Mais, pour l'instant, aucun académicien n'a été pris en flagrant-délit par un paparazzi, se faufilant hors de sa garçonnière.

    + C'est l'Américain Bill Watterson ("Calvin & Hobbes"), le Japonais Katsuhiro Otomo ("Akira") ou le Britannique Alan Moore ("Watchmen") qui succèdera au caricaturiste Willem pour présider le FIBD et en dessiner l'affiche. Le trio a été élu par 1600 auteurs professionnels. Le festival d'Angoulême cherche ainsi à se donner une dimension internationale.

    + Le Jury Révélation blog 2014 a rendu son verdict et sélectionné Duanra, Shyle et Tarmasz pour la finale. Le prix sera remis au cours du festival.

    + Li-An, "auteur de BD et bavard impénitent", a lu le volumineux ouvrage d'E. Pollaud-Dulian consacré à Gus Bofa (éd. Cornélius) et le commente sur son blog.

    + Le concours "dessinateurs de demain" du prochain festival "BD-fil" de Lausanne, présidé par Lewis Trondheim, est ouvert jusqu'au 30 juin et doté de trois prix d'une valeur totale de 3600 euros. 

    + Les éditions Dargaud ouvrent leurs archives (situées dans le XVIIIe arr. de Paris), montrant comment on maquettait un "Blueberry" dans les années 70. 

    + Petit détour par la musique et la littérature : on trouve dans le magazine américain "Sheamagazine" (Los Angeles) cette comparaison entre Johnny Rotten (John Robert Lydon), des "Sex Pistols", et Louis-Ferdinand Céline (Louis Destouche) : "(...) Céline et Rotten ont pas mal de points communs, dont la colère n'est pas le moindre, c'est-à-dire l'indignation et le mépris à l'égard d'un monde qu'ils estiment en proie à la bêtise et à l'hypocrisie - un monde gouverné par des politiciens boursouflés qui exigent de nous qu'on se fasse tuer pour dieu et la patrie, au nom de la paix et du bien commun ; c'est pour notre bien si on se fait bousiller à la guerre, ou bien exploiter à mort en trimant dans une fabrique de chaussures. Rotten était un jeune type en colère, Céline était un vieux type en colère, mais tous les deux étaient bel et bien colère, aimaient tous les deux jouer les méchants ; chacun s'est choisi "un masque de Guy Fawkes [Anonymous]", pour ainsi dire, changeant son nom afin de mieux coller à sa personnalité, et mener ainsi sa vendetta satirique contre le système. Ils furent courageux dans leurs manifestations de dégoût, et non deux merdes comme on est censé dire. (...) Tony Shea détaille ensuite sa comparaison. Si ces deux artistes sont en effet diabolisés (la récente réédition de "Féérie" a été partiellement censurée), précisons quand même que Céline est cependant éloigné de l'idée niaise ou cynique de libération par le sexe, la drogue et le rockn'roll, plus proche du consentement à l'esclavage que de l'anarchisme.

    + Le dessin de la semaine est une aquarelle de Renaud de Heyn (Rif marocain) :

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