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- Au programme cette semaine : 1. Le dernier opus historique de François Bourgeon ("Le Sang des Cerises" - tome 2) ; 2. L'affaire Bastien Vivès (suite) ; 3. Le "Franc-Tireur" embusqué de C. Fourest et R. Enthoven ; 4. "La Liste de George Orwell" par Carlos Hernandez.
(illu. extraite de "Le Sang des Cerises" - tome 2)
Cerise sur le gâteau ?
Les deux derniers opus de la saga de François Bourgeon, « Les Passagers du Vent », "Le Sang des Cerises" (tome 2), ont des airs de guides touristiques. Ils entraînent en effet le lecteur à travers Paris, sur les lieux emblématiques de la Commune. Cela donne de belles illustrations (ci-dessus, l'enterrement de Jules Vallès, place de la Bastille), mais la dramaturgie est sacrifiée sur l'autel de la documentation. La Bretagne (où réside F. Bourgeon) n'est pas oubliée, avec de beaux bateaux, de belles tempêtes et de belles plages.
On trouve le même défaut aux BD historiques de J. Tardi, obsédé lui aussi par les détails architecturaux (manie de dessinateur de BD ?).
La sympathie non dissimulée de François Bourgeon pour Louise Michel et les Communards le pousse à souligner l'extraordinaire violence de la répression, mais l'empêche d'avoir un regard critique sur une aventure politique suicidaire. Petit interlude comique : François et Pénélope Fillon, caricaturés dans le tome 2 en bourgeois radins.
L'Affaire Bastien Vivès (suite)
Bien que le festival d'Angoulême ait déprogrammé l'exposition de planches de Bastien Vivès après le tollé provoqué par cette initiative (une pétition en ligne a recueilli plus de 100.000 signatures), deux associations de protection de l'enfance ont porté plainte contre Bastien Vivès et son éditeur, Glénat, qu'elles accusent de diffuser des images pédopornographiques.
En vendant ces BD sous emballage scellé, l'éditeur pensait sans doute empêcher une action en justice. Quant à l'auteur (âgé de 38 ans), il invoque le caractère burlesque de sa pornographie, et s'est excusé auprès des personnes choquées par ses BD.
(Anniversaire de "Franc-Tireur" par Lefrançois)
Franc-Tireur embusqué
« Charlie-Hebdo » n’est pas seulement confronté à des dépenses exorbitantes pour assurer la sécurité de sa rédaction ; cet hebdo doit, depuis la campagne pour les présidentielles, affronter la concurrence d’un nouvel hebdo satirique, « Franc-Tireur », dirigé par Raphaël Enthoven et Caroline Fourest, hérauts de la gauche macroniste, ciblant donc les principaux adversaires de la politique du chef de l’Etat.
Financée par le millionnaire tchèque Daniel Krétinski, qui a investi une partie de ses avoirs dans la presse française, la formule n’est pas très « fair-play » pour « Charlie-Hebdo » ; elle reprend en effet les mêmes ingrédients, à savoir le mélange de caricatures, d’éditoriaux de gauche et de pensums sociologiques ; "Le Figaro" prête à "Franc-Tireur" une dizaine de milliers d'abonnés.
Poutine dispose-t-il d'un tel outil de propagande ? Un hebdo "satirique" qui flingue ses adversaires...
L'Itinéraire de George Orwell
Le projet de l’auteur «de gauche» de cette BD, Carlos Hernandez, est assez absurde puisqu’il voudrait empêcher «la droite» de récupérer Georges Orwell ? Or non seulement Orwell est inclassable sur l'échiquier politique contemporain, mais le vocabulaire politique, au stade totalitaire, a perdu selon Orwell sa signification univoque (la démocratie n’est qu’un slogan).
Cette observation s’articule d’ailleurs avec la mise en cause par Orwell des «intellectuels», principaux producteurs de l'idéologie politique. Les discours partisans, voire les sciences partisanes (économie et sociologie), contribuent du point de vue orwellien au mensonge totalitaire.
Heureusement le prétexte bizarre de Carlos Hernandez affecte peu la présentation biographique de l'auteur de "1984" proposée par cette BD. On comprend d’ailleurs, grâce à cette présentation, succincte mais utile, que l’indétermination politique d’Orwell est due à une existence marginale ; O. a exercé des tas de métiers différents (aussi bien manuels qu’intellectuels), vécu sous diverses latitudes (Angleterre, Birmanie, Espagne, France, Maroc, Ecosse…), fréquenté des personnes issues de milieux sociaux opposés…
«La liste d’Orwell» fait référence à une tentative de la presse britannique, en 1996, pour diffamer l’auteur de «1984» à partir d’une vraie-fausse liste de noms extorquée à Orwell par une amie ; de son vivant, G. Orwell fut censuré (avec efficacité) par le parti soviétique via ses ramifications londoniennes.
Cette « liste d’Orwell » est le fil conducteur du récit, conçu comme un dialogue entre deux potes ayant sur Orwell des opinions différentes, tout comme sur les contraintes sanitaires imposées par l’Etat à l'occasion de la pandémie de coronavirus.