+ La presse française, nationale ou régionale, n'a pas parue très inspirée au moment d'honorer la mémoire de Tomi Ungerer (disparu le 9 février). La plupart des journaux ont évoqué de façon répétitive son carton "Les Trois Brigands", publié par l'Ecole des Loisirs, qui laisse à beaucoup de bambin-e-s un souvenir impérissable.
Rappelons ici l'effort de Tomi Ungerer pour ne pas se laisser emprisonner dans la "littérature de genre", qui va grosso modo d'Alexandre Dumas à Hergé en passant par la Comtesse de Ségur.
Le prétexte éducatif (ou féministe) parfois sincère de cette littérature typiquement bourgeoise masque un déni de la réalité caractéristique ; cette culture rassurante n'est pas loin de la religion, aussi dénuée soit la littérature de genre de motif confessionnel apparent.
L'effort de Tomi Ungerer pour se distinguer est largement responsable de l'échec d'une carrière entamée aux Etats-Unis sur les chapeaux de roue, que l'artiste semble avoir pris un malin plaisir à briser comme un gosse brise le jouet qui a cessé de le délasser. La satire soviétique de la société américaine semble en effet bien mollassonne au regard des traits d'Ungerer. Qu'il s'agisse du féminisme, des droits de l'Homme humanistes, de l'antiracisme, de l'optimisme, de la sexualité heureuse... pas un seul des bibelots rutilants de la vitrine américaine n'a échappé au massacre de Tomi Ungerer (ill. ci-dessus extraite de "The Party" (1966), réédité par Les Cahiers dessinés).
(caricature de Chappatte dans "Le Canard enchaîné")
+ On reproche parfois au "Canard Enchaîné" son point de vue excessivement franco-français, pour ne pas dire "chauvin" ; cela comporte un risque de décalage à l'heure de la mondialisation où la notion de "politique intérieure" est dépassée, par conséquent les querelles politiciennes intestines un gaspillage supplémentaire de ressources.
La rédaction du "Canard" cherche peut-être à pallier ce problème en s'attachant les services du caricaturiste (Patrick) Chappatte ? Les journaux américain ("International Herald Tribune"), suisse ("Le Temps") et allemand ("Spiegel") publient les dessins de ce caricaturiste né au Pakistan depuis des lustres.
Chappatte signe donc depuis quelques semaines des dessins dans le "Canard". On sait le penchant des Français à donner des leçons de morale au monde entier, penchant qui trouve son origine dans la culture nationaliste enseignée à l'école. A plusieurs reprises ces dernières années les dessins de Chappatte ont montré qu'il a du recul sur cette culture "franco-française". Rien de tel qu'un étranger à la religion locale pour en montrer le ridicule et les travers.
+ "Expérimentation", publié par l'association libanaise Samandal, a remporté en janvier dernier le prix du fanzine décerné chaque année lors du festival d'Angoulême. Chapeautées par Alex Baladi, les expérimentations des auteurs de ce collectif beyrouthin trahissent l'influence d'autres expérimentations publiées il y a une trentaine d'années en Europe francophone par de petites maisons d'édition indépendantes comme "L'Association", "Cornélius", "Atrabile" (Suisse)...
Comme il se fait sentir sur la bande dessinée pour ados, le tropisme de l'album ou du livre se fait sentir aussi sur les fanzines, désormais souvent distribués en librairie au rayon BD.
+ Il reste encore quelques jours aux étudiants pour envoyer leurs meilleures caricatures à l'école Estienne (Paris XIIIe) qui organise dans le cadre de la semaine de la presse le trophée "Presse-Citron" de la meilleure caricature (jusqu'au 13 mars).
L'originalité de ce concours, assorti depuis quelques années d'une bourse, est de soumettre les dessins de caricaturistes débutants au vote d'un jury de caricaturistes expérimentés.