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younn locard

  • Revue de presse BD (113)

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    + Illustration de couverture d'"Accidents", mini-bd signée Younn Locard consultable sur le site "Grandpapier".

    + La nomination de Fleur Pellerin au ministère de la Culture, en remplacement d'Aurélie Filippetti "lassée d'avaler des couleuvres" (sic) coïncide parfaitement avec l'exposition organisée en ce moment par la Cité des Sciences (jusqu'au 5 janvier) sur le thème de l'art et des robots. La nouvelle ministre a la réputation d'être une vraie "geek". Pour beaucoup, l'art est fait pour mettre de l'huile dans les rouages de la politique.

    + La polémique enfle - et pas qu'elle -, depuis que Milo Manara, expert ès formes féminines bien connu des étudiants en bande-dessinée frustrés, a dessiné la couverture du dernier "Spider-Woman", représentant cette héroïne dans la position de la levrette, où la femme moderne ne saurait retomber. Sous prétexte que l'humour est le propre de l'homme, le féminisme doit-il mener à son abolition pure et simple ?

    + Achille Talon, célèbre personnage créé par Greg, revient dans un nouvel album, en dépit de la casserole qu'il traîne d'un humour franco-belge un peu démodé. Comme quoi, le président Hollande (dont le personnage présente quelque ressemblance avec A. Talon, en plus hétérosexuel) n'est pas forcément "fini" comme certains pensent.

    + "Le Figaro" revient sur les circonstances du vol de la Joconde le 22 août 2011. J'apprends que le vitrier d'origine italienne, auteur du vol, passa pour un héros dans son pays natal en plaidant qu'il avait voulu reprendre la Joconde aux Français, bénéficiant ainsi de circonstances atténuantes. Comme quoi le patriotisme excuse tous les crimes, même les plus absurdes.

    + Jacques Drillon ironise quelque peu dans le "Nouvel Obs" sur le sens ésotérique caché que certains croient discerner dans l'oeuvre de Tintin. Après tout, c'est une tradition qui remonte à l'Antiquité de décrypter le sens caché de la mythologie. Une difficulté tient sans doute à ce que la mythologie occidentale mélange souvent bizarrement des symboles païens avec des symboles chrétiens en principe opposés, à la manière de Dante Alighieri dans sa "Divine comédie".

    + Curiator : ça vient de sortir, c'est le nom d'un nouveau réseau social inventé par un jeune Belge et un jeune Batave, qui permet de partager des photographies d'oeuvres d'art libres de droit, puisque prises par des personnes privées, et de créer sa propre collection. Le portrait de Tintin par Parra ci-dessous, tiré de Curiator, est le dessin de la semaine.

    (NB : Quelques exemplaires du dernier fanzine Zébra - avec la participation de W.Schinski, Naumasq, Nabaloum Boureima, Philgreff, Monsieur Pyl,Pirikk, Frank K. May, Zinocircus, Zombi, Saki, Bertrand Demagny, Aurélie Dekeyser, François Leroux - sont disponibles à la librairie anarchiste "Publico", 145 rue Amelot, Paris XIe et sur le site de vente en ligne Priceminister.) 

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  • Eloi****

    Une goélette française, la «Renommée», rentre de Nouvelle-Calédonie à son port d’attache,webzine,bd,gratuit,zébra,fanzine,bande-dessinée,éloi,florent grouazel,younn locard,actes sud,nouvelle-calédonie,canaque,roman,passagers du vent,françois bourgeon,colonialisme,dramaturgie transportant un canaque, baptisé dans la religion chrétienne «Eloi». Pour des motifs troubles, mais selon son gré et celui de sa tribu, cet indigène de la Nouvelle-Calédonie a embarqué pour ce voyage au très long cours. Cédant aux instances d’un ami d’enfance, qui se pique d’ethnologie, contre toute attente le capitaine du navire a accepté que le jeune Eloi se joigne à son équipage de rudes marins.

    Cet invité de dernière minute est le personnage central d’un huis-clos maritime mené de main de maître par Younn Locard et Florent Grouazel (dessin). Les faits se déroulent dans la première moitié du XIXe siècle.

    Les amateurs de navigation et de bande-dessinée connaissent peut-être «Les Passagers du Vent», best-seller de François Bourgeon paru dans les années 80. Si, au premier abord, «Eloi» rappelle cette série, par ses thèmes généraux, voire le dessin, les auteurs parviennent ici à donner à leur intrigue romanesque une densité psychologique qui faisait défaut aux «Passagers du Vent», BD pleine de bons sentiments anti-esclavagistes, mais peu crédible en raison de personnages et d’un scénario trop manichéens.

    Beaucoup plus ambigus, les personnages de Locard et Grouazel sont, du même coup, plus humains et, surtout, moins prévisibles, ce qui bénéficie à la dramaturgie. Peu à peu, l’étau se resserre autour du «sauvage», que tous considèrent comme tel à l’exception du prêtre qui l’a baptisé. Le contexte de la navigation en mer, parmi des hommes réunis par la stricte hiérarchie régnant à bord des navires, ne laisse aucun échappatoire à l'imprudent aventurier canaque.

    Et l’étau se resserre sans qu’on sache d’où le coup fatal va venir : des hommes d’équipage, les plus frustes, méfiants et brutaux vis-à-vis de l’intrus, ou bien de ceux, plus rares, qui manifestent, par amitié, par esprit religieux, ou encore par curiosité, le plus de bienveillance ? On navigue dans le brouillard et l’atmosphère est très tendue car on devine que la tempête peut éclater à tout moment. La peinture des gens de mer est aussi réussie, en particulier le portrait du capitaine du navire, sympathique mais pusillanime, qui sent dès le départ qu’il commet une erreur en acceptant qu’Eloi monte à son bord, mais ne peut s’empêcher de commettre cette erreur.

    Le destin de l’Occident moderne est tellement lié à l’aventure coloniale que ce roman, s’il se présente comme un roman historique, manie un thème d’actualité crucial. Le canaque Eloi est entouré de personnages dont les intentions sont toutes équivoques, des marins hostiles, à qui les mœurs cannibales des canaques inspirent la peur, en même temps qu’elles excitent leur curiosité, jusque au prêtre adepte de la fraternisation, en passant par l’ethnologue dont on ne sait si le prétexte scientifique recouvre une véritable soif de savoir, ou bien un désir de gloire. Et on peut dire qu’Eloi lui-même se jette dans le piège tête baissée.

    De même, si les anciennes préventions contre les cultures primitives des tribus ou des peuples colonisés ont été officiellement abolies pour faire place aux bonnes intentions, le rapport des nations occidentales avec les anciennes colonies demeurent un rapport de domination et de soumission réciproque. Encore et toujours, l’ambiguïté est partout, les bons sentiments se mêlent inextricablement à la défiance et à la haine, la curiosité, comme dans l’intrigue de cette BD.   

     

    Eloi, par Grouazel et Locard, Actes Sud-l’An 2, 2013, 222 p.