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métamorphose

  • Varulf***

    La Meute - tome 1webzine,bd,gratuit,zébra,fanzine,bande-dessinée,critique,varulf,la meute,kritik,gwen de bonneval,hugo piette,école saint-luc,fable,fantastique,conte,métamorphose,kafka,renard,gallimard,bayou,jean anouilh,antisémite,amérique,blogueuse-bd,renard

    Gwen de Bonneval au scénario et Hugo Piette au dessin donnent un conte fantastique dans la collection Bayou (Gallimard), sur le thème du loup-garou. « Varulf » est un terme scandinave pour dire la métamorphose de l’homme en animal sauvage.

    On déplore la présentation éditoriale en deux tomes, ce qui permet tout au plus, quand le premier tome est décevant, de faire l’économie du second (on connaît la préoccupation des éditeurs de la déforestation et du gaspillage de papier). Ce n’est pas le cas du premier tome de «Varulf», qui propose une variation originale, à ma connaissance, sur le thème de la métamorphose, puisque les enfants d’un village de paysans se transforment en bêtes sauvages et cruelles à la nuit tombée, et massacrent ensuite leurs parents.

    Il m’est difficile de conjecturer sur le sens de ce conte, n’ayant pas encore lu le second tome. Mais la signification morale et politique de la métamorphose de l’homme en animal est archi-connue. Parmi les métamorphoses récentes moins connues que celle de Kafka en insecte, exprimant son sentiment d’une modernité totalitaire oppressante, une blogueuse-bd s’est transformée en renard au cours de son récit introspectif, avant d’entamer une brillante carrière. Les contes nordiques décrivant des loups bernés par des renards semblent dire le déclin de la puissance virile physique au profit de… disons l’habileté féminine. Dans une fable à connotation antisémite de Jean Anouilh, les Juifs sont des rats (capables de creuser des galeries pour s’enfuir jusqu’en Amérique), les Allemands des chats (amateurs de jeux cruels), et les Français des chiens (braves et stupides).

    S’agit-il dans «Varulf» d’une fable fantastique et prémonitoire sur la fracture cruelle entre les générations ? Il est trop tôt pour le dire.

    Le dessin d’Hugo Piette (diplômé de l’Ecole Saint-Luc) est dans le style «ligne claire», un peu abstrait et puritain à mon goût, mais rendant le conte plus lisible.

     

    Varulf – tome 1, Gwen de Bonneval & Hugo Piette, Gallimard-Bayou, 2013.

  • La Nuit du Capricorne***

    Le capricorne dessiné sur la couverture indique d’emblée le ton kafkaïen de cette BD de Grégoire webzine,gratuit,bd,zébra,bd,bande-dessinée,kritik,critique,la nuit du capricorne,l'association,grégoire carlé,voltaire,kafka,kafkaïen,métamorphose,rousseau,autofiction,biographie,adolescence,labyrinthe,sphinx,énigme,dédale,oedipeCarlé, publiée par L’Association.

    Il est vrai que l’adolescence est l’âge où, pour beaucoup, la sensation d’être éphémère est la plus intense. Autour de dix-sept ans, l’adolescent est comme un acrobate évoluant sans filet. Tout peut arriver à cet âge, les plus belles prouesses poétiques comme le pire : être écrasé comme un moucheron en un instant par la tapette géante du destin : slash ! Aucun principe de précaution ne peut rien contre ça. Hasard et mort sont la providence des adolescents modernes.

    Cette période de métamorphose est une sorte de «no man’s land» ou de terrain vague ; G. Carlé le fait bien sentir, à l’aide d’un dessin difforme fantastique, qui permet à son flash back sur cet épisode crucial de sa vie d’éviter la platitude.

    C’est le risque de l’autofiction, puisque en société tout le monde feint de se passionner pour autrui, mais que chacun ne s’intéresse vraiment qu’à soi. Il faut éviter de tomber dans une sorte de pornographie de l’âme à l’attention d’un public de voyeurs trop émotifs pour mater des corps. Et Voltaire, Rousseau ou Céline, chacun de ces maîtres du genre a un truc pour éviter ça.

    Son truc, à G. Carlé, est de suggérer pourquoi le terrain vague de l’adolescence fascine, malgré ses contours indéfinissables et ses relents macabres. L’existence, après la mue, semble aussi palpitante qu’un horaire de chemin de fer ; tout semble joué d’avance : l’heure de départ, le parcours du train jusqu’au butoir, et le défilement morne d’un paysage qu’on n’a même pas le temps d’admirer. L’existence paraît ainsi à l’adolescent en train de muer, et plus encore parfois à l’adulte blanchi sous le harnais. L’adolescence a plus de charme que ce programme.

    « Il paraît que dans son labyrinthe, Dédale fit en sorte, non pas que l’on ne puisse pas, mais que l’on ne veuille pas en sortir. »

    Ici, on pense encore à Kafka, à l’avilissement que les arcanes oppressants de la technocratie lui font subir. En effet, le monde moderne se présente comme une devinette, à la manière du Sphinx devant Œdipe - une devinette qui laisse penser que le tour de force du monde moderne est de ne pas se laisser percer à jour.

     

    La Nuit du Capricorne, Grégoire Carlé, L’Association, 2013.

    Zombi (leloublan@gmx.fr)