fanzine - Page 605
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La semaine de Zombi
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La semaine de Zombi
Lundi : Et de trois oscars pour l'acteur Daniel-Day Lewis.
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Chat continue
Le dessinateur bruxellois Philippe Geluck a annoncé qu'il cessait de dessiner Le Chat. Mais les chats sont des animaux imprévisibles, alors chat continue...
(Une parodie de Zombi - pas de produits dérivés pour l'instant)
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Le Roi des Mouches*
Charles Bukowski (1920-94) excelle dans deux ou trois de ses meilleurs bouquins à peindre les Etats-Unis comme le culot de l’enfer, tout en introduisant dans cette peinture des touches burlesques. Je crois qu’on peut encore aujourd'hui, malgré l’enrichissement de cette nation depuis "Women" ou "Ham on rye", éprouver la dureté contondante de l’âme américaine, affleurant sous la grasse vaseline du pognon, lorsqu'on y séjourne.
La mécanique hurle moins de douleur quand elle bien huilée, mais ça reste la mécanique, et les sorties de route, c’est pas ça qui manque, que ce soit cahin-caha ou à pleine tube.
L’humour vengeur fait la différence entre Bukowski et les esthéticiens putassiers de l’enfer, qu’il conspua utilement de son vivant: Henry Miller, et même Hemingway, pressentant sans doute des imitateurs à encore pires à venir. De l’enfer, comme du mur de Berlin, on peut très bien fourguer de petites parcelles au rayon "Culture". Il y aura toujours des clients pour ça. Et, en effet, Bret Easton Ellis ou David Lynch sont venus après, avec leurs gadgets rutilants porno-chics, qui donnent des frissons aux critiques de «Madame Figaro» ou «Voici».
Peu d’artistes ayant vraiment séjourné en enfer en ont ramené des images plaisantes à l’œil. Plus souvent l’humour, sans doute la disposition d’esprit qui leur a permis de survivre. Or, seule cette expérience et cet humour nous intéressent ; non le trafic de mauvais sentiments du suppôt de Satan à sa maman. Les messes noires sont aussi chiantes que les blanches, dès lors qu’elles se répètent tous les samedis, et que curé débarque en hélicoptère au "Parc des Princes".
C’est à peu près là que je situe les trois tomes signés Mezzo et Pirus, regroupés sous le titre générique: "Le Roi des Mouches", et situés dans l’Amérique profonde. Plus près de l’esthétique que de la sincérité. Et quelle esthétique: celle de Victor Hubinon, en plus raide, pour ceux qui connaissent «Buck Danny», série des années 60 destinée à inculquer aux petits Français ou Belges l’admiration des Etats-Unis. Le clicheton américain 100%. Même pas une boîte de nuit de province, aujourd’hui, qui voudrait encore de ce look ou ce design (à vérifier quand même). Un pot d’encre par page + la couleur par dessus le marché.
Au départ, premier tome, on sent une volonté des auteurs de nous entraîner dans une sorte de virée entre mauvais garçons et mauvaises filles qui font des trucs cochons entre eux (qui n’en fait pas aujourd’hui, c’est presque devenu obligatoire), et ça va mal se terminer, vu qu’ils conduisent leur buick comme des garnements. Lourde insistance sur le climat d’inceste qui règne au sein des familles américaines. Un truc vu et revu. D’où l’exigence du lecteur.
Deux ou trois personnages sont esquissés, qu’on est tenté de suivre ; mais non, au fil des pages, les auteurs ne parviennent pas à donner de l’étoffe à leurs paumés; est-ce que ce n’est pas plus facile, pourtant, de donner du relief à un mauvais garçon qu’à un diplômé de Harvard ou un pilote de chasse («Buck Danny») ?
Dernier tome: les auteurs ont renoncé à tout autre projet que celui de dessiner à la manière des auteurs de comics yankees.
Ça peut paraître étrange, mais j’ai éprouvé plus de malaise à la lecture des "Malheurs de Sophie" qu’à celle de cette trilogie. Vous savez, l’histoire de la petite garce de Ségur, qui torture les animaux et pousse son cousin Paul au vice. Ils ne se tringlent pas encore entre eux à l’arrière des voitures, mais on sent que ça ne va pas tarder. Toute la perversité est dans le non-dit, le minimalisme japonisant des sévices mutuellement administrés. Ambiance Xavier Dupont de Ligonès, ou Florence Dupré-Latour, pour citer deux artistes qui savent, eux, ce que c’est de faire régner un climat malsain, sans le déguisement d’Halloween ou je ne sais quel millième groupe de «heavy metal» à boulons chromés.
"Le Roi des Mouches", Mezzo et Pirus, éd. Drugstore, 2013.
(par Zombi - leloublan@gmx.fr)
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Pourquoi Zébra ?
Quelqu'un répondra-t-il un jour à cette question, dissipant ainsi le brouillard émollient du hasard, qui enveloppe les petits enfants avant de les dévorer tout crus ?
Sigmund Freud qualifiait les surréalistes de "fous intégraux". Si certains jugements de Freud en matière d'art sont contestables, celui-ci est particulièrement juste. Il y a bien une forme d'intégrité chez certains fous, conservatrice des facultés mentales, qui se traduit par le souci excessif des détails. Dans le cas de Dali, et c'est pourquoi il n'est pas forcément le plus représentatif, de même que la folie est entièrement feinte, l'intégrité est toute relative puisque c'est celle du commerçant.
Expo. Dali jusqu'au 25 mars pour aller résoudre cette énigme au musée Pompidou...
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Strip Lola
Etoile des neiges (1)
(A SUIVRE)
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La semaine de Zombi
Vendredi : La création dans la mythologie de la première femme (Pandore), par Vulcain, dieu de la forge et, partant, de la technique et des techniciens, explique la fascination exercée par le canular pornographique de Courbet dans la culture technocratique. Le "morceau" a acquis le statut d'icône religieuse, comme témoigne la notice quasi-sulpicienne du Musée d'Orsay, qui s'efforce d'occulter l'activité (alimentaire) de Courbet de fournisseur d'images pornographiques au service du sultan collectionneur de femmes Khalil-Bey. S'il y a bien une part de l'art français qui devrait revenir logiquement aux hypocrites tyrans du Golfe persique (puritanisme et respect du Coran pour le peuple/pornographie pour les élites), c'est celle-là.
- Un autre aspect où l'histoire de l'art, dispensée par les conservateurs de musée, rejoint le fantasme, c'est à propos du caractère subversif attribué à "L'Origine du Monde". D'abord on est assez loin de l'apologie sadienne du viol et de la torture sexuelle; le sultan Khalil Bey n'était somme toute qu'un banal partouzard selon des moeurs assez répandues dans son milieu; ensuite l'érotisme n'est scandaleux ou provocateur que dans les sociétés ou les milieux puritains. Tel n'était pas le milieu où Courbet évoluait. Communiste par ailleurs, le peintre ne songeait pas à propager dans le prolétariat une imagerie où la femme est représentée comme un pur objet de désir.
Du puritanisme excessif du XXe siècle, où l'Etat va jusqu'à s'immiscer dans les ébats amoureux, on ne peut pas déduire semblable puritanisme au XIXe siècle, en particulier dans le milieu artistique, assez éloigné des manuels d'éducation sexuelle modernes. Un mot provocateur de Baudelaire permet de mesurer le décalage avec notre époque policée; quand ce poète et critique d'art (décisif) indique qu'à ses yeux, l'artiste qui n'a pas contracté la syphilis ne peut pas être un véritable artiste. Il suffit de remplacer la vérole par "le sida", pour mesurer le niveau de provocation du XIXe siècle, par comparaison au nôtre (Baudelaire veut dire par là qu'on ne peut être un artiste, à ses yeux, sans avoir effectué un séjour aux enfers).
Tout simplement, la bourgeoisie industrielle n'avait pas encore procédé complètement à la liquidation des Lumières française du XVIIIe siècle, siècle dans lequel certains historiens, et non des moindres, voient un sommet en matière de liberté d'expression, domaine où l'érotisme n'a jamais joué aucun rôle, à aucune époque.