John « Derf » Backderf a connu un succès d’estime l’année dernière de ce côté-ci de l’Atlantique avec « Mon Ami Dahmer », dans lequel il faisait le portrait d’un authentique tueur en série, Jeffrey Dahmer, fréquenté sur les bancs du lycée., et plus largement la peinture de l’Amérique profonde (Ohio) des années 70-80.
Son éditeur français présente ainsi Derf Backderf : « né en 1959 à Richfield, une petite ville de l’Ohio où il passera toute son enfance. Après un bref passage dans une école d’art, il retourne chez lui et travaille comme éboueur, avant de recevoir une bourse pour l’université de l’Ohio, où il suivra un cursus en journalisme tout en réalisant des illustrations pour le journal local. Une fois diplômé, il devient journaliste pour un quotidien de Floride, puis abandonne cette carrière pour se lancer dans la réalisation d’un strip., The City, qui durera vingt-deux ans et sera publié dans plus de cinquante hebdomadaires américains. (…) Il a reçu de très nombreuses récompenses pour son travail de dessinateur de presse dont le prestigieux Robert F. Kennedy Journalism Award du dessin politique en 2006 (…) ».
Les lecteurs de « Mon Ami Dahmer », ouvrage chronologiquement postérieur en VO, retrouveront dans cette BD à peu près le même ton, les mêmes lycéens un peu paumés, et le même portrait d’une Amérique au bord de la crise de nerf, dont les débordements de quelques-uns servent parfois de prétexte, notamment au cinéma, à une esthétique de la violence pour le moins ambiguë. Des reportages nous montrent parfois de jeunes GI abreuvés de culture de masse séquentielle avant de monter en première ligne, et pendant, comme autrefois on fourrait de la gnôle à 50° dans les rations des poilus pour doper leur amour de la patrie. Derf Backderf, lui; lorgne plutôt du côté de Bukowski et de Crumb, c’est-à-dire de l’humour.
Le titre et la « play-list » punk-rock de l’auteur en page de garde peuvent dissuader ceux qui, comme votre serviteur, n’apprécient pas tant la musique que le silence. En réalité le « punk-rock » est plutôt un mouvement de jeunes poètes rebelles qui, d’après ce que j’ai pu comprendre, ne sont pas particulièrement doués pour jouer d’un instrument de musique ni chanter, mais plutôt pour haranguer leur auditoire. De même la façon un peu bizarre de Derf Backderf de dessiner les personnages comme des pantins articulés, sert le récit.
Punk Rock & Mobile Homes, Derk Backderf, traduit de l'américain, éds çàetlà, 2014.