L'hydrie est un grand vase grec orné de figures mythologiques. En principe destinée à recevoir de l'eau, une hydrie sert de dénouement à l'intrigue de la BD muette de Nicolas Presl, située dans la Grèce antique.
Cet ancien tailleur de pierre reconnaît sa dette vis-à-vis de Picasso, dont les amateurs savent qu'il s'est lui-même inspiré de l'art grec pour la déformation de ses figures (qui permettent d'exhiber plus sur une surface plane, vase ou tableau, que l'angle de vue ne permet de voir).
Mon intérêt pour la mythologie et les peintures de vases, le sens exceptionnel de la forme des artistes qui les incisaient, peut faire soupçonner une critique partiale. Mais le propos de "L'Hydrie" de Nicolas Presl n'est pas vraiment homérique ou tragique ; il serait plutôt romain, presque "existentialiste" : l'amour, la guerre, le coït, l'avortement, la religion, la famille, la trahison, la gloire, sont mis en scène dans cette BD - toutes les passions en quoi l'homme reflète la nature et ses rythmes apparemment immuables, d'où viennent plaisir et douleur. A la limite, on pourrait presque traduire la BD de Presl comme un pamphlet contre la culture, c'est-à-dire contre le discours par lequel l'homme parvient à se convaincre qu'il a, au cours des millénaires, évolué "en bien".
Ou encore c'est un éloge de la nature, en comparaison de laquelle l'homme paraît un bien pâle imitateur, encore plus grotesque quand il aime s'attribuer le premier rôle dans la conduite du monde, le coït, la religion, la guerre, l'art, etc.
(Ed. Atrabile, 2011, 230 p.)
- Aparté : sur la manière des éds. Atrabile de publier ce genre de bouquin, je m'interroge : pourquoi 230 p. N&B à 22 euros, quand "L'Hydrie" aurait pu être ramenée à trois fois moins de pages, et son prix divisé par deux ? ça donne l'impression d'une BD produite pour les bibliothèques municipales...