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Voeux d'Amérique

J’ai eu l’occasion de m’entretenir (via msn-messenger) avec l’illustratrice et ex-danseuse de cabaret new-yorkaise Molly Crabapple. Celle-ci a fondé un mouvement international pour le renouveau de l’apprentissage du dessin d’après le modèle vivant (anti-art school); ce mouvement se heurte en France à l'hostilité du «château» (l’administration publique), dont les raisons seraient trop longues à expliquer ici, mais qui sont «grosso modo» celles de la féodalité moderne.

Je tentai, sans succès, de convaincre Miss Crabapple de venir s’installer à Paris où, malgré ce que je viens de dire auparavant, les contraintes qui pèsent sur l’art sont moins lourdes qu’aux Etats-Unis, d’après mon expérience.

Vous trouverez ci-dessous ma traduction (de l’américain) des vœux de Molly Crabapple pour le Nouvel An, voeux qui sont en fait des conseils prodigués aux artistes en herbe, par une qui a «fait carrière», comme disent les Yankees, sans toujours s’apercevoir que l’art n’est pas exactement, comme la mécanique, fondé sur la lumière et l’énergie. Miss Crabapple est régulièrement employée par le «New Yorker». Les conseils virils de Molly sont loin d’être dépourvus de vertu...

(Zombi)

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Caricature de Molly Crabapple en sainte patronne des artistes en herbe, par Z.

(J’ai rédigé ça il y a un an. Mais comme on continue de me réclamer des conseils, je remets ça.)

-          - Bosse dur, fais-toi des potes, ne baisse pas les bras.

        - Quelques précisions : sois opportuniste en diable, et ne rate aucune occasion, aucun moyen de mettre en avant ton art. Sois exigeant avec toi-même. Fuis les recommandations cul-cul-la praline données aux artistes, du genre : «Accroche-toi à tes rêves !», ou «Nourris ta créativité !», toute cette daube ne sert qu’à fourguer aux artistes du dimanche des manuels bidons.

-          Préoccupe-toi du pognon. T'en auras besoin. Si ce n’est maintenant, quand tu seras malade, vieux, ou que t'auras un gosse. N’écoute jamais ceux qui essaient de te faire honte parce que tu gagnes des thunes.

-          Comporte-toi avec la plupart des clients en mercenaire, mais sois le plus généreux possible, au contraire, avec tes compagnons d’armes, qui te soutiennent. Je continue de faire pas mal de travaux, gratuitement ou pour des clopinettes, pour le groupe de musiciens BFF ou pour «Occupy Wall-Street». Je peux me le permettre, parce que je fais casquer un max mes commanditaires ordinaires.

-          Souviens-toi que tu fais des choses que les gens paient pour avoir, et que s’ils ne s’intéressent pas à ce que tu fais, ce n'est pas parce qu’ils sont d’horribles Philistins. Fais plutôt en sorte de faire des progrès et de trouver ton public.

-          Aies l’audace de projets personnels. Bosse dur dessus. Montre-les. N’illustre pas gratuitement des livres pour enfants auto-édités. Crois-moi. Lie connaissance avec des personnes hors du milieu des artistes, qui s’intéressent à autre chose que l’art : des hackers, des chefs d’entreprise, des journalistes, des top-models, des ouvriers du bâtiment, des profs. Dessine tout le temps. N'oublie-pas ton carnet de croquis. Va dans les cours de modèle vivant. Copie les dessins de maîtres. Sois exigeant avec toi-même et corrige tes erreurs. Trouve le ton juste.

-          Souviens-toi que le futur appartient aux mutants pluridisciplinaires, et qu’un galeriste-faisant fonction de père, ou bien un agent, ne risque pas de craquer sur toi si tu restes enfermé dans ton appart’ à dessiner toute la journée.

-          Observe comment des secteurs tels que le marketing ou les médias fonctionnent aujourd’hui. Ce n’est pas une science occulte. Tu peux apprendre à rédiger un communiqué de presse en cinq minutes sur Google. Y'a pas de honte à faire sa propre promo. Personne ne le fera à ta place, sauf si tu fais déjà du blé, et dans ce cas on te lèchera la bite de tous les côtés.

-          Investis dans un matériel de qualité, permettant une bonne présentation. Des photos pourries avec un iPhone ne te ramèneront pas du boulot. Paie tes impôts par tranches. Prends un comptable dès que tu peux. Les travailleurs en «free-lance» se font baiser aux Etats-Unis.

-          Ne claque pas 150.000 dollars dans un diplôme d’art.

-          Monte un site internet sympa.

-          MAIS SURTOUT : si tu veux devenir artiste, tu ne peux pas te permettre d’y mettre une couille sur deux. Il faut le vouloir plus que tout, et être prêt à sacrifier son sommeil, sa vie sociale, les histoires d’amour merdiques de fac, les soirées au bar à s’en jeter derrière la cravate après le turbin, bref, à peu près toutes les expériences agréables qu’un jeune adulte autour de vingt ans peut connaître. Si tu n’y es pas prêt, devenir artiste à plein temps n’est pas pour toi. Il n’y a aucune honte à ça. Dessiner pour le plaisir, parce qu'on aime ça, est une chose merveilleuse. Mais si tu es certain de ne pouvoir faire autre chose qu’une activité artistique toute la journée, que tu es né pour ça, il te faudra faire des sacrifices.

-          Bonne chance !

-          Molly Crabapple

Commentaires

  • There is nothing in the world more favourable to genius than leisurely poverty.

  • Elle connaît rien à la vie, votre petite diablesse d'Amérique! Ce qui est difficile pour un artiste, c'est de pas gagner d'argent ; pour la putasserie c'est facile, suffit de pas avoir froid aux yeux et d'accepter les inconvénients.

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